intrigue en cours Entre les Enfants de Prométhée et l'Ordre de l'Hydre, la guerre semble à présent inévitable. Les uns comme les autres se préparent à l'affrontement. De son côté, le Conclave Écarlate peine à se faire à l'absence des Fawkes et au nouveau leadership des Ackerman. À moins que les laboratoires d'Amaranth Pharmaceuticals ne fassent de grandes découvertes dans peu de temps, ou que le Conclave ne mette la main sur un immortel, il se pourrait bien que ces tensions coûtent cher à l'organisation... Et après être longtemps resté dans l'ombre, un vieil ennemi s'apprête à refaire surface.
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(#) With or without you. || ft. Santiago    Ven 24 Sep - 22:15

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J’ai cette image, très précise en tête, qui me hante sans cesse.

Ta silhouette en redingote sombre, près de la cheminée de marbre blanc du fumoir de Père. Un verre à la main, à converser avec lui. Je ne me souviens pas du sujet de la discussion, et à vrai dire je n’en ai pas écouté un seul mot. Beaucoup d’hommes ce jour-là, entre mes frères et leurs amis des clubs privés d’académie, en train de refaire toute la société britannique au sein de leur petit comité.
Beaucoup d’homme et je ne voyais que toi.
Et j’apercevais ton large sourire, à travers la fumée.
Et je te connaissais déjà, sans savoir qui tu étais. On me l’avait soufflé, entre deux verres de whisky imposés : « Notre très chère Merry nous a ramené un lord hispanique comme futur époux, notre famille va se parer de nouveaux accents fleuris !»
Le verbe serpentaire de Henry avait de quoi faire rire, à l’époque.
Je ne l’ai pas fait, au contraire de mes aînés.

La mine basse, je comprenais le plus terrible, le pire des fardeaux à venir.
Te rencontrer officiellement, te sourire, et réprimer mon désir pour le fiancé de ma sœur.

J’étais résolu à cette idée. Isobel me rendait heureux, j’en étais convaincu, elle était parvenue à endormir mes instincts d'antan. Je pouvais y arriver, et n’avais aucune raison d’en douter, j’étais père, fier, honoré d’être parvenu à porter l’héritage des Moncreiff, moi aussi.

Et j’ai tenu, véritablement. Une poignée de minutes, jusqu’à ce que nous regards ne se croisent vraiment.

Et que tout ne s’efface pour ne laisser que Toi.

[…]

Samedi. 20h50.
Il pleut sur Londres et les passants se pressent, la nuit tombe et les couloirs se délitent, un à un. Les rames filent et les taxis foncent ; la tempête arrive, rentrez chez vous, auprès des vôtres. Le calme est une chimère, elle s’évanouit dés que le vent se lève, elle se tapie derrière les remparts de la guerre à venir.
Celle qui règne dans le coeur d’Anthony tonne déjà bien plus fort que n’importe quel orage.
Debout devant la porte du perron du 116 Bury Street, les gouttes l’attaquent, griffent ses joues de rafles gelées. Elles se glissent dans sa nuque comme autant d’aiguilles qu’il ne sent plus dans sa peau morte.
Il est en avance.
Il n’avait pas prévu de l’être, bien qu’affreusement pressé.
La librairie voisine est déjà fermée, aucun autre endroit où se cacher.

Il doit y aller.

Samedi. 20H55.
Les marches ont craqué sous sa montée, une litanie de bois qui l’a accompagné comme un condamné. L’immeuble fait parti du vieux cachet londonien, une sorte de construction des années soixante-dix, à peine remise aux normes de sécurité. Peu de place, peu de traces. Une planque, comme il pourrait l’entendre.
Ca ne te va pas si mal.
La pensée le traverse quand il atteint le second étage. Sa bouche est aussi sèche que son par-dessus est trempé. L’océan de ses yeux fixe la porte sans bouger.

Un instant, il la considère, comme pour voir au-travers.
Si tout se passe comme prévu, il doit déjà savoir qu’il est là.

Ne serait-ce qu’à cause de l’impulsion d’un moment perdu, à la sortie du métro, un quart d’heure plus tôt. Un sms, jeté dans le vide. « J’arrive. » Sans signature ni formule, une bouteille lancée dans la mer de données. Prévenir l'intéressé, pour lui laisser le temps de se préparer, ou de fuir.
Désespoir paradoxal, doutes et redoute. Anthony les avaient pourtant cherchées, ces coordonnées, mû par une volonté étrange de posséder quelque chose le reliant à lui. Kyle les lui avait données pour payer sa dette du remplacement au pied levé, mais lui avait fait juré de lui raconter ce qu’il s’était passé à la radio ce jour-là. Une promesse en l’air, il le savait déjà. Tout le monde le savait déjà…

Samedi, 20h59.

Sa main effleure la surface plane de la porte, une caresse fébrile, ténue.
Il devrait frapper.
Il devrait entrer pour recueillir sa vérité.
Rien d’autre ne vaut de souffrir autant.

Samedi, 21h00.

Son poing s’enroule et cogne. Une fois. Plusieurs fois.
L’intensité varie, il veut qu’il entende, où qu’il soit.  

Et elle finit par s’ouvrir, comme réponse à ses appels.

Les yeux se retrouvent. Mer en abysses.
Vague à l’âme.

J’étais résolu à cette idée.
Jusqu’à ce nos regards ne se croisent vraiment.
Et que tout ne s’efface pour ne laisser que Toi.

« … Bonsoir. » La voix d'Anthony s’éraille en marmonnement, ne laisse rien passer d’autre. Tout se joue dans cet échange bien plus éloquent, entre ces deux pairs d’orbes d’un autre temps que leur présent.

Bonsoir, Santiago.
Tu vois, je suis là.
Je ne suis pas homme à trahir mes serments, moi.


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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Lun 27 Sep - 17:49


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T’as galéré plus que de raison à dormir, ces dernières semaines. D’aucuns mettraient ça sur le dos de ton canapé-lit qui te sert de pieu, matelas minable préféré au king size installé dans la chambre maîtresse, mais tu préfères dire que c’est la faute à la lune et d’autres conneries. T’as plus le droit d’être païen (encore que, ça revient), alors au lieu d’en vouloir à des dieux furieux tu te tournes vers l’astrologie. Tu grognes que c’est la pleine lune qui t’rend imbitable, qu’c’est la faute dégueulassée par l’acide d’une nuit sans sommeil si t’es mal tourné et que non, Jake, j’suis plus sympa les autres jours, maintenant casses-toi si tu veux pas mon pied dans les couilles.
Des excuses pour justifier un comportement de merde qui ne va qu’en s’empirant au fur et à mesure que les jours s’en vont et que les dates s’égrènent. Une pleine lune qui dure deux semaines : personne n’a jamais vu ça ?

Pourquoi tu lui as donné rendez-vous, t’as cru que tu pourrais tout arranger, c’est ça ? Face à ton miroir, ce soir, tu passes et repasses ton peigne et tes doigts sans réussir à coiffer tes cheveux. Indomptables comme toi. Crevés comme toi. Tu te concentres sur tes mèches à défaut de savoir pourquoi t’as pas annulé et pourquoi t’as proposé ça : tu aurais pu régler le tout d’un coup de traître, dans le dos, et te barrer en courant comme la dernière fois.
(Son corps dans le sang qui s’échappe de lui, l’odeur de poudre, la rigole rougie)

Quand ça toque à ta porte, t’es même pas prêt.
Ta maison ne sent rien et pourtant le cendrier est rempli. Fumeur nerveux aux poumons autoréparants, t’en es à un paquet par jour et demi depuis ces quelques semaines d’angoisse. Ca te va bien, la cigarette et l’insomnie. T’as mis du Febreze à mort jusqu’à ce que tout soit libéré. Ca toque à la porte, bouge ton cul, Santiago. Tes doigts tâchés d’encre de la journée ont du mal à actionner la foutue poignée – ton regard a du mal à faire le focus sur le visage du mec que t’as buté.

« Salut. »

Tu te décales dans ton couloir peuplé de chaussures et de sacs, d’un blouson de cuir et d’un carton à peine ouvert d’où dépassent des draps et des coussins. « Rentre. On en a pas pour longtemps. » La porte de ton salon est haute et grince plus que de raison. Tu le guides jusqu’à ton canapé, heureusement replié, et t’assoit sur le fauteuil en face, dos à la cheminée éteinte. « Je t’en prie, assieds-toi, Anthony. » Son nom brûle tes lèvres. Un instant, t’as envie de le dire encore et de le sentir crâmer ta langue. Tu toussotes pour chasser les pensées incohérentes. Te penches et attrape un coffret en bois, l’ouvre avec précaution.
Pose l’arme si belle, si terrible, entre vous deux. La crosse abîmée tournée vers ses doigts, le canon pointé vers toi.
« Tu m’écoutes et si tu juges que ça ne te va pas, tu as de quoi te venger sur le court terme. » Atone est ta voix, morts sont tes yeux. Tu préfères ne plus rien ressentir car tu sais ce qu’il va choisir. Ton coeur va souffrir un peu trop.
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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Lun 27 Sep - 21:59

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L’appartement empeste les odeurs artificielles. A défaut de paradis, Anthony se sent graviter dans un entre-deux, une succursale du purgatoire où les aveux seront jugés. Le chemin à venir dépend de cette soirée, il en a conscience. Et pourtant il prend du temps à entrer, à pénétrer cet endroit indéchiffrable, où ses sens se brouillent. Il l’observe, depuis l’entrée, comme on jauge une arène. Et finit par refermer la porte derrière lui, scellant la marche, suivant l’appel.
Il est venu.
Il a accepté cette invitation.
Reste à savoir s’il ne le regrettera pas.

Il écoute à demi les mots de Santiago, erre en silence dans les lieux comme pour s’en imprégner, suit en silence les mouvements de l’homme qui s’assoit dans le canapé.
Il ne répond rien, que pourrait-il dire, lui, quand il n’est qu’un spectateur, qu’un juge en devenir ? Il le considère à peine, cet Autre qui signifie pourtant tant de choses. Comme pour se protéger lui-même, encore, toujours plus, de l’image qui s’imprègne dans sa rétine perpétuellement humide.

Cet endroit ne te ressemble pas, mais il porte toutes tes traces.
Les traces d’un passé où tu m’as enterré…


Sa réflexion se coupe dés lors que la boîte en bois est approchée. D’abord sceptique, Anthony dissimule mal le blanchiment de son teint déjà pâle, dés que Santiago en ôte le couvercle.

Elle est ici.
Elle a toujours été là, auprès de lui.

L’arme honnie.


Silence métallique. Anthony réprime un haut le coeur, une envie de vomir grandissante à la vue de la crosse argentée et du canon élimé. Elle ne signifiait rien autrefois, si ce n’était un point brillant à sa ceinture, un artefact sublime témoin d’un ouvrage de maître.

Une pièce funèbre, qu’il ressent jusque dans sa chair encore aujourd’hui. Son dos lui fait mal, effet fantôme, en trois points précis.

L’instrument de sa propre mort, redouté comme un prédateur sorti de sa cage.

Les yeux azur se flétrissent, se plissent, s’emplissent. L’écossais marque plusieurs temps, avant de susurrer, entre amertume et contemplation :

« Tu l’as gardé... »

Oui, il l’a gardé.
Comme j’ai gardé les lettres, années après années.
Cette époque collée à fleur de coeur, pour l’un comme pour l’autre.
Est-ce là toute ta provocation, mon amour ? Ou bien au contraire ton absolution, ton pardon distillé dans ce canon, tendu vers moi ?
L’égalité ne nous guette pas encore, tu le sais.
Il me faut un peu plus que cela.


Ce pistolet les lie, à jamais. Lui pour l’avoir brandi, l’autre pour l’avoir subi. Trois plombs qui charge le regard d’Anthony, quand il s’assoit enfin sur le fauteuil.

« Il est aussi abîmé que toi. »

Phrasé laconique lâché, après avoir observé l’arme plus longuement. En métaphore filée, les orbes bleus viennent s’ancrer dans les onyx lointaines.
L’homme est ailleurs.
Retourné jusqu’aux confins de ses crimes, du moins l’espère sa victime, qui s’impatiente.

« Trêve de cérémonie, Santiago. Il me semble que j’ai assez attendu. »

Sa voix s’affirme, son corps se tend. Il ne quitte pas son regard pour autant.
Il subira, s’il le faut encore, de nouvelles balles qui perceront ses illusions.
Prêt à les encaisser, au nom de leur vérité.

« Je t’écoute. »

Entièrement.

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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Mer 6 Oct - 17:36


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T’as pas réfléchi à ce que tu lui dirais. T’as retourné le problème dans tous les sens et toi, le littéraire au sang chaud qui fait des mots la seconde pire et pourtant piètre arme, tu n’as pas réussi à mettre sur l’acte que tu as commis des phrases cohérentes, des mots factuels. L’affaire est trop proche de ton coeur pour que tu le réussisses. Tu as préféré fumer et boire, dans un coin planqué de la pièce t’as ton sac de verres qui s’empilent. Le fond de bières de qualité, microbrasseries du coin, puis la bouteille de gin – seule, t’as jamais trop aimé ça – et celles de whiskey qui coûtent un bras. De loin. Tu t’es payé des gueules de bois dorées au goût des highlands sur la fin et ça n’a pas aidé ce que tu ressentais : la peur, le soulagement, l’angoisse, l’insatisfaction, la fraîcheur des draps et le creux vide entre tes bras. Les larmes qui ont chassé le malt de tes lèvres.

L’arme a été rechargée ce matin. Tu as eu du mal à trouver les balles adéquates mais avec un peu d’aide et d’argent, tout se fait. Elles ont été préparées spécialement pour aujourd’hui sur ta demande, elles se sont glissées dans leur chambre quelques heures plus tôt. Beautés fatales que tu vas accueillir sans surprise – la seule inconnue reste leur position. Oh, connaissant Anthony – du moins, tu le connaissais avant, ça doit jouer un peu – tu ne miserais pas pour une reprise fidèle de sa mort. Tu viserais le coeur, le front peut-être ? Le coeur, très certainement. T’as fait exprès de pas mettre de chemise trop lourde, juste pour ça, pour pas lui voler ta mort en lui compliquant la tâche. Il n’a pas ton expérience et t’aimerais qu’il n’ait pas à s’y reprendre à deux fois.

« Je l’ai gardé. »
Pour un jour qui est enfin venu.

Tu soulèves délicatement le fond de la boîte une fois que tu as son attention et qu’il attend. Tes doigts sont gourds mais tu n’as pas de mal à sortir quelques documents marqués du sceau de l’Hydre. Des copies de ton ancien ordre de mission, à une époque où celles-ci étaient infiniment plus simples à sortir… Si l’on savait où le faire. Tu as besoin de ça. D’un fil conducteur pour que ta stupidité soit excusée. « J’ai jamais été honnête avec toi. Comment aurais-je pu ? » Un début catastrophique qui te tire un sourire. Tu lui tends les documents tout en te levant pour aller attraper dans ton armoire deux verres et une bouteille. « Je tue des gens pour empêcher des catastrophes à l’échelle immortelle de se produire. On me missionne fréquemment pour… Comment dire. Stopper l’humanité de trop s’approcher de nous. Tu te rassois et remplis vos verres, en fait glisser un vers lui. L’alcool ambré t’appelle. Pauvre dingue. Et t’étais une menace, ce soir là. »


Le rapport entre ses doigts n’a pas changé de contenu depuis la nuit précédant sa mort. Son nom inscrit en grosses lettres noires que t’aurais voulu barrer. L’arme, remplie de ta main, l’heure et la date du foutu décès. T’as même signé comme t’as signé l’arrêt de la vie d’un millier d’autres ! (Ta main tremble quand tu t’enfiles une goulée d’alcool) Etat de la menace initial : important. Il n’aurait pourtant pas fait de mal à une mouche. Ca venait d’une vision, bien plus haut. Une vision qu’on t’avait pas confiée mais qui présentait l’homme que t’aimait comme « … Un immense danger. Pour l’organisation et pour le monde. Et j’ai tous les défauts du monde mais j’suis loyal et tu le sais. »

Ce n’est pas trahir que d’assassiner.
Tu remarques pas que t’as une larme qui a coulé.
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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Dim 10 Oct - 20:28

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L’instant se décompose en images ralenties. Anthony perçoit chaque geste, chaque silence de Santiago comme un pas de plus vers sa propre libération. Il va savoir. Il va enfin savoir, au rythme des mots égrainés, de la peine viscérale qui les enserre l’un et l’autre. Il va enfin savoir, alors que le couvercle du fond de la boîte se soulève, que les papiers jaunis d’une autre époque se déplient et révèlent leur secret parfum poussière.

Il va enfin savoir.

Et tomber.


Tomber sans chercher à se rattraper, cette fois, tomber comme les gouttes qui s’écrasent contre les tuiles du toit.

Sa tête devient lourde sous les preuves, sous les épreuves.
Anthony comprend tout, à son corps défendant, ce qui lui a valu d’être criblé de balles.

L’ordre.
Le nom.
Le sceau.

L’Hydre.

Encore elle.
Toujours elle.
Les pièces assemblées forment un tableau grotesque, bardé d’ombres et de dents viciées. Les crocs furieux d’un monstre antique qui ont déjà tant pris en leur sein, même au cœur des proches de l’écossais.
Bastian.
Chiranth.

Et même Lui.

Santiago s’explique, s’absout, donne toutes ses couleurs à ce mystère qui les a séparé. Mais Anthony voit flou, aussi subitement que les échos s’imbriquent. Les nuances s’étiolent. Le froid nauséeux le prend à la gorge, le rendant incapable de parler. Le goût du sang et de la neige. Du fer entre les dents.
Les sensations de cette nuit fatidique reviennent en diapositive désenchanté.
Le bruit des pas écrasant la poudreuse au fond de l’allée.
La vue qui baisse jusqu’à se rompre derrière ses cils bancs.

Tout ça pour quoi ?

Pour cette plaisanterie ?


Une vision, un danger, une menace.

Le choc est beaucoup trop grand pour qu’il parvienne à en rire, pourtant l’ironie le prend aux tripes. Lui ! Parmi tout les autres, tout ces autres, bien plus terribles, bien plus cruels, lui, ô, le petit, le tout petit Anthony, le pauvre malingre, celui dont on ne fera rien, lui. Lui, devait être abattu pour la sécurité des éternels errants.

Rire, il n’y parvient pas.
Pleurer lui semble bien plus simple.

Les larmes glissent en gouttelettes, viennent ourler son identité inscrite sur le rapport qu’il est parvenu à saisir du bout des doigts. Lord Moncreiff se tâche. Lord Moncreiff disparaît sous l’encre d’un autre siècle.
Un siècle qui le détestait, presque autant qu’il se déteste aujourd’hui.

Un geste mécanique de la main, et son verre d’alcool est englouti. La brûlure ne le raccroche pas plus à la réalité.
Anthony se sent toujours gelé.

« Loyal... »

Les deux syllabes sonnent rauques, comme un grognement de bête. Le cri du verre brisé dans un excès de colère trop longtemps contenue, lui, ponctue vers d’autres aigus. Anthony l’a lancé, sans viser, vers un mur adjacent.
Incapable de se contenir plus longtemps.
Le bleu pétillant de ses yeux se hérissent de piques assassines, braquées entièrement vers le guatémaltèque.

« J’en aurai entendu, des conneries. Mais celle-là... »

On ne connaît pas l'écossais pour sa vulgarité. Un homme distingué l’est aussi dans ses mots, on le lui a appris, c’est ancré en lui.
Mais plus rien ne le retient, pas même l’étiquette.
Sans réfléchir ses jambes le redressent, réduisent la distance, le portent vers l’autre immortel. Et le fixe de sa hauteur soudaine, la peine en étendard vicié.
« Regarde donc où ta sacro-sainte loyauté t’as mené. » Un regard dédaigneux vers les feuilles, toujours en main, qu’il finit par jeter au loin. « Tu dois être tellement heureux, aujourd’hui.  Avoue-le, au moins. Que j’étais un mal nécessaire. Que je ne valais rien de plus qu’un nom parmi beaucoup d’autre… que tout ce que nous avons vécu n’était qu’un piège. » Son ton torve s’accompagne un mouvement.

Anthony saisit le col de la chemise pour mettre debout son amour passé. Ses mains tremblent sans sourciller, les visages plus proches que jamais. La douleur, la fureur frustrée. Son regard pulse, ses veines s’arquent, se gonflent, le transportent d’une force inconnue. Une force bouillonnante,  brouillant le moindre de ses sens.

« Dis-le !! », peste-t-il, désespéré, à s'en arracher la bouche. « Dis-le que ça valait le coup de me tuer, vas-y, dis-le que tu me haïssais, que tu haïssais Meredith au point de la rendre folle de tristesse, dis-le que j’ai gâché ton existence en t'aimant, que c’était ta revanche, contre moi, contre ma famille, contre le monde entier, mais dis-le !!! »

L’excès laisse place au chagrin, plus pesant que le reste. Les soubresauts de ses sanglots le font hoqueter. Comme ses bras sont lourds, ils le relâchent, comme les larmes tombent à nouveau, en ravage sur ses traits.
Il se sent épuisé. Épuisé d’avoir chassé ses propres démons pour n’aboutir sur rien de plus que du vide.

« … Dis-moi que me trahir signifiait quelque chose pour toi… que ce n’était pas… pas juste un ordre ridicule…  »

Pour ce soir, pour cette fois,
Je t’en prie, je t’en supplie,
Mens-moi.


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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Mar 12 Oct - 20:37


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Ne mens pas, Santiago.
Tu savais que ça finirait comme ça.

Les larmes dans les yeux, les armes dégainées en souvenir d’un putain d’assassinat perpétré pour rien. Le rire dégueulassé par l’incrédulité, disbelief au fin fond de ta voix. Tu sais pas si ce que tu lui racontes trouve un écho en lui, s’il se souvient d’une seule manière de comment il est mort – s’il se rappelle ta main sur son épaule, le je suis désolé qui n’a rien effacé, le je t’aime avorté et tes pas sur la neige éclaboussée. T’as voulu crever ce jour-là. Il t’a jamais vu pleurer, boire comme un trou et hurler son nom dans ton oreiller pour essayer d’en perdre la raison à te casser la voix sur des sanglots ; mais les larmes se tarissent, ton foie toujours se répare de lui-même, et ton extinction de voix jamais ne dure. Seule est restée la douleur.

Stoïque, tu acceptes tout. Le verre qui vole et s’explose contre le mur ou la table, t’as pas bien vu. Les mouvements, ton corps qui se lève à sa demande : tu t’offres en corps volontaire, cadeau de chair à martyriser si ça peut lui faire du bien. Sans déconner. Sur ses mains en proie à retenir ton col, des larmes piquent et éclaboussent sans pouvoir les retenir – où est l’utilité ?

Tu n’es qu’un silence face à sa haine.

Tu l’avales et la fais tienne.
Calmement soupires pour les évacuer tes larmes et le fixes de l’air le plus neutre que tu connaisses : tu n’as pas le droit de ressentir quoi que ce soit. C’est sa colère et c’est sa mort, de ta faute certes mais c’est pas ton moment Santiago. Tes poings se serrent, tu te retiens de le retenir contre toi et d’apaiser ses peines, panser ses blessures et effacer la haine. Tu n’en as pas le droit.

Il faut beaucoup de courage pour réussir à rester de marbre face à l’homme que tu aimais. « Je ne voulais pas qu’un autre le fasse. Je n’aurais pas supporté de te savoir mort par leur faute et de devoir vivre tous les jours avec la certitude que t’étais mort sans que j’y ai rien fait. Ton souffle, ton dos. Droit. Serein. Des siècles d’entraînement. Alors oui, je t’ai assassiné par… Par jalousie, peut-être. Je n’aurais pas tenu le coup si c’était pas moi. Meredith, ton dieu ait son âme, elle aurait souffert de la même manière, tu ne crois pas ? » Tu te dégages de votre proximité, remplit ton verre à nouveau et le vide d’un trait. Marche dans les éclats de sa colère sur le plancher. (lui offre ton dos)

« Te tuer a été la chose la plus difficile de ma vie. J’aurais voulu que ton fantôme s’attache à mes pas pour me hanter chaque soir et me fasse perdre la raison. J’ai prié chaque soir ce Dieu que tu aimais pour qu’il m’accepte et te donne la pais, j’ai hurlé ton nom à ma hiérarchie sans qu’on me dise pourquoi. J’ai... J’ai voulu… Ta voix s’estompe quand tu ravales le trop-plein, si peu, d’émotions. Ta barbe est entremêlée de perles salines cachées à grand peine. J’ai voulu mourir d’être si loin de toi par ma propre faute. Mourir éternellement.  » Et je le veux encore.

Le regard vers la fenêtre, la tête haute, les yeux dans le vide. Tu pleures à n’en plus finir, tes épaules agitées discrètement de soubresauts incontrôlables. Ce n’est pas une fin heureuse comme on a du tant lui en raconter, mais les histoires maudites ne se terminent jamais bien. Sous la lumière lunaire on dirait que de l’argent décore tes traits. Tu pleures du mercure en silence, les doigts autour de la table que tu enserres par automatisme – la peur de tomber. Si tu t’exploses, ça sera en arrière, le dos dans le verre et la nuque brisée. « Maintenant, tu as la vérité. » 
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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Mar 19 Oct - 22:16

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L’ombre se découpe dans la lumière des réverbères, fractales des gouttes contre le verre. Dans le flou artistique de ses yeux gonflés, Anthony n’y voit qu’une tâche contre sa rétine, l'injectant de sang. Les paroles ont terminé de l’achever, dernier clou contre sa poitrine, dernier morceau de bois de son cercueil plus vraiment si vide.
La vérité est là, prononcée sans visage, tournée vers la ville et son propre orage. La tempête de l’année.

L’écossais demeure sans réponse. Incapable, pendant un long, un trop long moment, de dire quoique ce soit. Que pourrait-il ajouter ? Rien. Face à la fatalité amère, les bras sont ballants, l’expression figée, le coeur à terre. Ses yeux glissent vers les dizaines de reflets, éclatés sur le sol. Tout autant de versions de lui-même qui, ailleurs, dans un autre temps, auraient pu connaître un tout autre dénouement.

Santiago se tient toujours droit, distant, factuel. Il se contient, comme prêt à encaisser tout ce qu’Anthony pourrait lui lancer. Mais les dagues de son regard se retournent contre lui. La fatigue, soudaine et pesante, face à la situation, font dériver la cible. Son chagrin s’estompe vers un lent, long, soupire sans son. La pièce est intacte mais n’y reste que ce dos. Ce dos érigé agit en bouclier, où se ricochent ses propres attaques, avant même qu’elles ne puissent naître.

Le temps tombe. Des minutes entières où Anthony pondère en silence différentes idées, entre s’enfuir d’ici, hurler à nouveau, ou utiliser le pistolet. Un tas de possibilités qu’il trouve, au final, stupidement vaines.
Il n’avancera pas. Il le sait, il le sent, il ne pourra pas continuer s’ils ne sont pas deux à s’affronter.

Non.
Regarde-moi.


Le passé, encore entre eux, fait office de creux géant. Anthony l’enjambe, retenant son souffle au-dessus du vide, jusqu’à atteindre Santiago.
D’aussi près qu’il le puisse, d’aussi près que ses miettes de courage le lui permettent.
Dans son dos, il devient lui aussi une ombre, qui hérisse une main pour attraper son épaule.
Le retourner vers lui. Confronter leurs yeux chargés. Une impasse à fissurer.

« Et donc ? »

Question ou couperet, la différence est minime.
Son ton se veut plus pondéré, plus réfléchi, presque épuisé.
La rage est calmée sur la mer, et à sa surface, on ne peut que constater ses dégâts.

« Je suis encore là, en dépit de la volonté de l’Ordre. Je suis toujours en vie. Toujours… une soi-disant menace. » Le mot s’écorche, encore suintant d’incrédulité. « Ils finiront par le savoir. Je parierais même que c’est déjà le cas. Peut-être même que ma résurrection faisait partie de leur plan alambiqué, qui sait... »

Il est bien mal placé pour savoir ce qui peut bien traverser l’esprit du Monstre antique. Trop de têtes à décortiquer pour en connaître les méandres synaptiques, pas de temps à perdre quand il s’agit de sa propre survie.
Il se raccroche aux faits pour comprendre le présent. Car c’est un peu tout ce qui compte, maintenant.
Ce qu’il est. Ce qu’ils sont.

« Mais quoiqu’il en soit, selon toute vraisemblance, ton rapport est faux. Tu as échoué à me tuer. Donc, je te le demande : qu’est-ce que tu comptes faire ? »

Son regard franc, au cœur des onyx, fermement planté. Dans ce tu intime, il y a ce nous sous-jacent, cette manière de rappeler qu’en scellant ces balles, c’est son destin qu’il a pris en main. Son baiser mortel, plus foudroyant que n’importe lequel d’entre eux. Le dernier, portant toute sa responsabilité.

Mais mon cher, cette histoire n’est pas terminée.

Il attend, la main délaissant le tissu. Ses bras viennent se croiser, en position affirmée, tout autant que protectrice. L'avenir lui a toujours fait peur, malgré tout.

« Réponds-moi honnêtement. Mais je te préviens : trois balles ne suffiront plus à m'écarter. J'ai la peau un peu plus dure que la dernière fois. »

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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Ven 22 Oct - 17:54


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Cat’s out of the bag, et ce connard te griffe les burnes et l’visage. La douleur de la révélation – des mots que tu n’as jamais prononcés, des choses sur lesquelles tu ne pensais jamais revenir – est glaciale dans ton coeur, pic de glace. Comme à ton habitude, tu montres rien : le néant empathique et émotionnel au fond de ton être s’est empli de regrets et d’images du passé, de souvenirs d’un temps heureux conclu dans le claquement d’une gâchette. Tu as mal et c’est bien. Tu souffres mille morts rien qu’en racontant comment, en bon chien obéissant, t’as assassiné sans t’retourner l’homme d’un bout de ta vie.
Tu pivotes et t’efforces d’être grand, d’être droit, d’être beau, d’être Santiago et pas juste Santi. Tadeas, t’es ridicule face à lui. Ta manche essuie tes joues et ta barbe afin de lui cacher les traînées de faiblesse que tu t’es autorisé. Pathétique.

« Nous n’avons que faire des immortels. » Ta réponse est sans appel. Tu fais un pas en arrière et t’éloignes de lui. Tout son être t’attire comme un papillon une flamme – sauf que c’est toi qui va le brûler s’il te touche. Tu avales difficilement ta salive et fais appel à tout ton calme olympéen… Ce calme dont tu n’as jamais disposé. « Ma mission était de te tuer ce jour-là. J’ai réussi. Tu te détournes de lui et retourne vers le canapé, attrape ton verre, te ressers. Ce soir-là, ton coeur a cessé de battre et tu as été déclaré mort. J’ai réussi ma mission. Personne n’a jamais parlé d’élimination totale, c’est pas possible. La preuve, je suis encore là. Et ils sont nombreux les connards qui voudraient te voir en poussière – Tony inclus. Ce qui t’arrive après la mort n’en fait pas partie. Pour ce que j’en sais, c’est p’têtre même ce qu’ils avaient prévus. »

Tu avales cul sec ton verre avant de te poser dans ton fauteuil. Affalé, les jambes un peu écartées, tes doigts jouent avec ta barbe et tu laisses le silence entre vous s’installer. Aussi pesant que réconfortant, des milliers de non-dits s’y cachent et emportent au fil des secondes les confessions que tu n’oseras jamais faire. « Tony. » Tu dis doucement. Le surnom roule sur tes lippes et ta langue intéressée darde entre tes dents pour lécher l’intérieur de ta lèvre pour le retenir en toi. Tu tournes tes iris sombres vers lui. « Tu ne devrais pas cacher ton accent Tu sais ce que j’en pense. »

Pourquoi maintenant ?

Parce que tu lui as tout dit. Que tu veux mourir en grande pompe dans la flamboyance qui est tienne. Qu’il te tue ce soir en sachant bien sur qui il tire. Sur le gars qui, cent ans plus tôt, l’a froidement buté de dos ; sur l’amant peu prévenant mais passionné qui a caché leur amour pour qu’ils puissent, justement s’aimer ; sur le beau-frère aimable, ami à la langue bien pendue, aux yeux sombres. Sur Santiago, sur Tadeas. Sur celui qui l’a aimé comme un fou se raccroche à sa dernière parcelle de raison.
Il était ton dernier lien avec l’humanité.

« Fais-le. »
La demande est douce. « Fais-le, Tony. » Une supplique pour l’homme que t’aimes encore. Il ne doit jamais je savoir.
« Tu te sentiras mieux. Fais-le. »
Tu veux plus de cette humanité qu’il a ravivée en toi.
S’il le fait pas...
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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Sam 23 Oct - 18:04

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Les justifications suintent d'illogisme. Anthony a du mal à saisir le modus operandi de l'Ordre, encore plus quand il est retranscrit par Santiago, érigé en défense face à la réalité. Oui, il l'a tué. Et pourtant, l'écossais est encore là. Le monstre devrait être à ses trousses pour l'écarter, toute menace qu'il soit. Qu'attendent-ils de lui, au juste ? Les rejoindre ? Ce serait le pire des combles.
Il pousse un soupire agacé, discret, quand il songe qu'il ne comprendra pas de sitôt ce qui a bien pu traverser leurs millier de têtes ce soir-là.

« Tu es à la solde des plus incroyables des imbéciles, dans ce cas. Une telle idiotie me dépasse... »

Pester lui fait du bien. Santiago n'est qu'un exécutant. Lui-même ne sait pas ce qui se trame en haut-lieu. Pour ce point, et pour ce point seulement, Anthony tendrait presque vers un magnanime de façade. Ne serait-ce que pour couvrir la tempête grondant toujours plus au fond de son être, celle qui déploie les émotions d'antan, d'avant la trahison. D'avant l'instant présent, où Santiago l'implore, invoque ce surnom pour l'amadouer, le ramène d'une petite pique à leurs moments partagés.
Les ficelles sont grosses mais font leur effet. Elles s'enroulent autour de la gorge de l'écossais, comme pour le pendre et l'empêcher de parler. Ses propres lèvres se scellent, se plissent, tremblent face à la demande implicite.
Son ancien bourreau s'offre en cible pour le soulager. Oeil pour œil, dent pour dent, trois balles pour trois balles. Il a préparé sa mise en scène en espérant qu'Anthony abdique et laisse la vengeance prendre le dessus. Et qu'elle l'emporte au passage.

Un espoir que l'écossais remplit, dans l'écho d'un silence de plomb. Sa main gantée vient lentement saisir l'arme d'un autre temps.
Son regard confronte celui de son autre, un dernier instant.

« Fais-le, Tony. »

Aie pitié.

La crosse ferme entre ses doigts, Anthony tire. Une fois, deux fois, tout autant de fois que nécessaire, jusqu'à vider entièrement le barillet.

Les impacts font grand bruit, tant pis pour les voisins. Dans le mur derrière le canapé, tout proches de la tête de Santiago sans jamais l'effleurer, sans jamais le toucher.
Pas une seule seconde Anthony n'a songé à lui accorder ce qu'il voulait.

L'arme est lourde au bout de son poignet. Il le laisse pendre, pris de quelques spasmes sporadiques.

« … Tu avais raison, je me sens un peu mieux. », finit-il par souffler. Sa propre respiration repart, comme elle l'a fait dans la neige, cent ans plus tôt.

Et son regard ne quitte pas celui de Santiago.

« Ton numéro est terminé ? Bien. » Un pas vers lui. La distance se réduit. Lui au fond du sofa, l'autre debout face à lui. « J'en ai assez entendu, Santi. C'est toi qui va m'écouter maintenant. »
Pour la première fois, Anthony se sent en contrôle total. Ce n'est que comme ça que son discours, longtemps refoulé, parvient à s'organiser. Par delà la rancœur et l'amertume, il ne reste que la déraison. « Tu vas vivre. Et tu vas vivre longtemps.  Avec cette certitude que je serais là, moi, encore debout, à être un témoin vivant de ce que tu as été, au-delà de la main implacable de l'Hydre, au-delà des mensonges pour te protéger. Je serai là, à te le rappeler, chaque seconde qui animera ta foutue carcasse immortelle. Je ne vais pas me gêner pour te faire comprendre que le petit lord du manoir d’Édimbourg croyait en toi, en vous deux, en tout ce que tu lui as montré et promis. Cet homme que tu as tiré des bas-fonds de lui-même, comme ma punition le fera avec toi. »  
Sa voix s'érode d'un tremblement, mais il tient bon.
« … Puisque c'est bien ça ta véritable peur, n'est-ce pas ? Te confronter à toi-même, à tes décisions et à tes crimes. C'est ça que tu fuis depuis le début, depuis que je suis entré ici, en dépit de la vérité. Tu fugues depuis toujours, même depuis notre histoire, j'ose le dire. Sauf quand ta garde se brise. Sauf quand j'ai pu voir... ce qu'il y avait derrière tout ça. »
Son poing se serre sur le pistolet vidé. Il ne bouge pas, ne cille pas. Assassine, à sa façon. « Tu agis en lâche, qui ne sait que se cacher pour survivre, aujourd'hui comme hier, qu'il s'agisse d'un faux mariage ou derrière les têtes d'une organisation. Tu as abandonné l'illusion du choix pour quelque chose de trop facile, de pathétique et de trivial, comme l'ombre de l'homme que j'ai aimé, comme... ce que tu as osé me présenter. »
Un pas encore.
Anthony se penche, l'affronte toujours plus. Le courage le pousse au plus près de cet autre visage, des traits terriblement attirant contre lesquels il se dompte lui-même. Ne pas sombrer. Ne pas lui dire. Ne pas... « Mais je ne suis pas comme toi. Je ne tire rien à verser le sang pour faire payer. Je ne te laisserai plus t'enfuir. Et je ne te donnerai pas ce que tu veux. Mais uniquement ce dont tu as besoin. » Il se redresse, désigne les rapports et les identités bafouées, la sienne parmi tant d'autres. « Je me battrai pour et contre toi, Santiago Ortega. Je te le jure. Et je le jure au nom de tout ces autres sur cette table, y comprit Anthony Moncreiff. »

Quelques pas en arrière, il s'éloigne et glisse le pistolet dans la doublure de son manteau.

« Je le garde. Ce n'est pas cher payé, tu en conviendras. »

Ses jambes le portent vers l'entrée, pour repartir, la conscience plus légère. Il lui a dit. Il lui a dit, à demi-mot, il s'est laissé emporté et a tout avoué.
Mais il avait raison.
Il se sent... soulagé d'un poids.

« Au fait. » Sa marche s'arrête. La main sur la poignée, prêt à partir. Dos à lui, le risque est grand, il le sait. Mais il n'en a pas peur. Ses comptes sont réglés. « … C'est moi qui les aies. Les lettres sur ma tombe. Ne les cherche plus et... n'en écrit plus, non plus. »

Pourquoi les évoquer ? Il l'ignore.
D'autant qu'il pourrait s'en aller, tout en se sachant désormais incapable de renoncer à lui.
Tout comme il aurait pu le tuer, ici et maintenant.
Il vient au contraire de s'attacher à nouveau, payant sa liberté de tout un tas de secrets, pour mitrailler celui qui détient son cœur.
Alors il n'en est plus à un près...

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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Sam 23 Oct - 19:07


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Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, Fais-le, fais-le, fais-le, fais-le, fais-le. La litanie dans ta tête incessante appelle au meurtre et à la vengeance celui qui hante tes pensées depuis trop longtemps. Combien de nuits as-tu rêvé de lui, en hurlant son nom dans ton oreiller au réveil ? Combien de fois, de retour en Ecosse, as-tu voulu retrouver une tombe à son nom auprès des siens et l’arracher aux entrailles de la terre nourricière pour lui donner ton sang devant les dieux et le faire revenir par tous les moyens ?
Tu veux qu’il tire.
T’es affreux, mais tu veux qu’il tire pour toi.

L’arme est dans sa main. Soulagé, tu regardes la mort en face et suit le canon du regard. Une. Deux. Trois. Aucune ne rate, toutes t’évitent.
(tu voudrais pleurer)
(tues-moi, c’est trop demander ? )

Rien ne transparaît tandis qu’il se rapproche de toi – tu sais camoufler ta déception. Silencieux, muet comme le cadavre que t’es, pas meilleur qu’un mort-vivant, tu fermes ta gueule pour le laisser causer. Depuis le début tu monopolises l’air et la conversation de ta diatribe inutile afin d’empêcher qu’Anthony ne parle vraiment : t’as peur au fond de tes boyaux tordus en nœuds anxieux qu’il t’dise ce que t’as toujours pas envie d’entendre. Il est plutôt fort à ça, te mettre le nez dans ta propre merde. Assis au fin fond d’ton fauteuil, tu croises les mains sur tes genoux et clos ta mouille pour te surprendre à rêver dans l’accent profond emplissant ton salon. Tu sais que la situation s’y prête pas, mais tu fermerais les yeux et tu te croirais de retour au siècle d’avant.

Concentres-toi, Santiago.
« Tu vas vivre. Et tu vas vivre longtemps.  Avec cette certitude que je serais là, moi, encore debout, à être un témoin vivant de ce que tu as été, au-delà de la main implacable de l'Hydre, au-delà des mensonges pour te protéger. Je serai là, à te le rappeler, chaque seconde qui animera ta foutue carcasse immortelle »
Mais bien sûr, Tony. Il n’est pas le premier immortel que tu crées (une histoire pour une autre fois), et jusque là, t’as réussi à vivre sans penser à eux. Tu n’écoutes pas vraiment, Santi. Tes doigts se resserrent entre eux et tu essayes de pas te jeter sur lui pour qu’il réplique et t’brises contre la table basse. (Quand est-ce que tu arrêteras d’échapper à tes sentiments par la mort ? )

La tentation de l’embrasser est forte.
Celle de lui mettre un coup de tête aussi.

Le silence gagne. Il gagne toujours.

Tu n’as pas cillé.
En contrepartie, t’as essayé de pas retenir ce qu’il te disait. Trop tard : les mots se gravent au fer rouge au fond de ton cerveau, s’ancrent à jamais dans ta foutue mémoire illimitée. Qui est le con qui a pensé ça, dénoncez-vous. Tu serres les dents et laisse échapper un soupir agacé. S’il y a une chose que tu ne supportes pas, c’est bel et bien que l’on tente de guider ta conduite et que l’on veuille, d’une manière ou d’une autre, te réguler. En ça, l’Ordre te convient parfaitement : ils s’en branlent de ce que tu fais tant que tu gardes tes mains ensanglantées.

« Je les cherchais pas. » Menteur. « Et j’fais ce que je veux. De ce que j’en sais, tu es mort. Ca me reviendrait trop cher d’arrêter. » T’as du mal à te dire qu’il les a lues – tout ton sang sur une page, année après année. Des badineries dans l’air du temps et des déclarations secrètes, puis ouvertes. Sur sa tombe année après année. Dans ton coeur, année après année. Tu te penches pour attraper la bouteille et remplir ton verre à moitié. D’un pas droit, tu t’éloignes dans la direction opposée à Anthony. Rejoins la cuisine, la machine à glaçons, la pince. Remplit ton verre au-delà du raisonnable – cette cuvée, une fois préparée dans un verre convenable, a l’odeur d’amande plus qu’agréable. (t’aurais du changer le tapis, va falloir le relaver) « Tu attends quelque chose d’autre ou je peux retourner à mes occupations ? Il faut que je fasse du plâtre pour réparer tes bêtises, love. »
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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Sam 23 Oct - 20:39

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Bien sûr qu'il ne s'attendait à rien d'autre.
Tirer sur le mur était une évidence, un pari moins risqué : les balles auraient ricoché partout sur la carapace de déni, fièrement portée par son très cher Santiago.
Une matière impénétrable, visiblement, renforcé avec une bonne couche d'obstination reluisante.
Soit.
Anthony reste sourd aux provocations, la main cramponnée à la poignet. Il doit y aller. Spark l'attend, il doit avoir envie de sortir malgré la pluie. Puis il doit répondre au mail de Lorna aussi, une histoire de planning ou d'un voyage à Washington, il ne sait plus très bien. Peut-être Anthea l'a appelé aussi, son portable est éteint depuis 21h00, il devrait vérifier.
Bref, lui aussi a un million d'autre choses à faire plutôt que de perdre son temps ici.
Pourtant il y a cette petite voix qui le pousse à rester pour se défendre, à se retourner pour le suivre dans la cuisine et lui asséner la gifle la plus sonore de toute son existence, avant et après meurtre. La baffe cinglante qui s'écrase contre la joue du guatémaltèque, au ralenti, puissante jusqu'à en déplacer un ou deux morceaux de cartilage.
Une première mise en bouche avant de lui hurler dessus, sans retenue, sans protocole, sans belles phrases, l'anti-thèse de son discours éloquent d'il y a quelques instants.
La rage passionnelle à l'état pure.
Et une fois ses poumons vidés, il les remplie de son essence, de ce souffle perdu du siècle dernier, dans un baiser au moins aussi long que la gifle, encore plus profond, plus lointain, plus sincère encore que les insultes tonitruantes. Des gestes, des caresses, des soupirs, toujours, contre le sol de cette fichue cuisine dans ce fichu appartement de cette fichue ville, où rien ne ressemble à leur lit partagé d’Écosse, mais où tout parvient à s'exprimer de la même manière...

Oui, Antony ferait tout ça.
S'il en avait encore l'envie et le courage.
Retour à la réalité. Aux derniers mots lancés, il ne réagira pas ainsi, se contentera de fixer la porte et de répondre platement :

« Non. »

Une aigreur à peine dissimulée.

« Bonne soirée. Amuse-toi bien. »

Il n'attend plus et part à son tour sans se retourner, mais en claquant la porte. Ce n'est pas une main dans sa gueule, pourtant ça fait son effet. Un brin dramatique, d'autant plus que tout l'immeuble a dû l'entendre, et il s'en fiche pas mal.
Quatre à quatre il descend les escaliers, de plus en plus en rapidement, loupant une marche, manquant de tomber, se redressant et courant dans l'orage. Les rues se sont vidées et le métro n'est pas si loin. Le vent dans le dos le porte et il disparaît, s'engouffre dans le noir de la rame pour rentrer chez lui.

Il pensera plus tard. Après une douche, après lecture de ses messages, après des heures devant la télé braillante, après avoir aliéné son cerveau par la fatigue, quand il tombera entre les draps et qu'il espérera dormir d'un trait. Il pensera au matin, à sa journée à venir, aux gens qu'il doit voir.
A tout, sauf à Lui.
Et à cette petite ritournelle lancinante qui lui vrille les tympans, un chant d'oiseau moqueur dans sa tête lourde :
Après plus de cent ans, encore et toujours au même point.
Naïf à en crever pour une cause désespérée.
Et toujours amoureux du type le plus insupportable de l'univers.


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(#) Re: With or without you. || ft. Santiago    Dim 24 Oct - 12:52


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Tu sais qu’il va partir et claquer la porte. Qu’le mur va trembler et toi avec. Tu t’attends à tout. Le nez baissé sur ton verre tu évites les orbes bleutés où tu pourrais perdre les restes d’âme qui tourbillonnent en toi. Tu regardes les glaçons fondre dans l’alcool, processus piqueté de tâches de neige. Fascinant.
Qu’il s’échappe. Qu’il te laisse. T’es fait pour être seul, Santi, pas pour l’avoir dans ta vie. T’as bien vu celleux d’ta constellation qui s’aiment et leurs regards niais à en vomir, leur « j’ai trouvé ma putain d’moitié » et les autres mensonges. Tu veux pas de ça. Tu veux pas d’Anthony comme ça, t’as jamais voulu de lui comme ça. La niaiserie et le romantisme ont été tués à coup de balle dans le dos avant même que vous ne vous rencontriez : si tu séduis, tu n’offres pas de fleurs ; si tu aimes, tu ne le prouves pas spécialement. T’es une horreur à porter dans le coeur.

La porte claque. Tu restes seul avec ton verre et tes démons. Tourbillonne le whiskey de plus en plus froid. Tu retournes t’asseoir dans ton fauteuil et éteins les lumières. D’un geste fatigué, tu envoies des sms à ton éditeur et à tes contacts préférés pour les avertir que tu entames une cure loin des réseaux pour la semaine à venir. (Ca ne devrait pas prendre tant de temps que ça.)
Au fond de ton crâne tourbillonnent les mots de celui qui fut ton homme. Tais-toi. Il n’en hurle que plus fort.

Le dernier glaçon a fini de disparaître. Riche idée que de remplacer par une solution de cyanure le tout et de créer pour toi et tes frennemies ces cubes mortels. Invisibles à l’oeil nu, tout juste l’odeur est-elle perceptible au nez averti. Jamais tu ne l’as utilisé en mission : trop de trace, trop de chance que ça rate. La valeur d’une capsule est contenue dans trois cubes de petite taille et tu en as mis six. Faudrait pas que tu te rates.
Les lettres sur ma tombe. Ferme-la, Tony. (Tes doigts agrippent le verre que tu portes à tes lèvres. Dans le noir la scène a une gueule de cauchemar ridicule. )

Et t’avales le tout.
A demain.

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