out of nowhere. (Caleb)

"We're a mess, you and I, but the truth is, you captivate me in ways no soul ever will." @Caleb Faust

Ce sont les rayons du soleil venant caresser sa joue qui réveillent Alma. Elle ouvre les yeux lentement, immergeant d’un sommeil profond et serein, ce qui n’était pas toujours le cas. Et tandis qu’elle s’habitue à la semi-obscurité qui englobe encore la pièce, elle met un instant à comprendre trois faits bien distincts. Ou plutôt, trois faits liés, même si le rapprochement mais du temps à se faire. Premièrement, elle n’est pas chez elle. Deuxièmement, elle est nue. Elle ne dort jamais nue, toujours prête à fuir si un membre du conclave venait à la retrouver et s’immiscer chez elle. Et enfin, dernier fait et non des moindres : elle n’est pas seule. Elle sent une présence dans son dos et elle fronce les sourcils en réfléchissant, cerveau encore trop endormi pour qu’elle ne se souvienne de tout. Elle se redresse et quand ses yeux tombent sur la silhouette à ses côtés, tout lui revient. « Bordel de merde. » Un murmure parce que s’il y a bien une chose qu’elle ne voulait pas, c’était réveiller l’homme à ses côtés. Si Caleb remue un peu, il reste profondément endormi, au grand soulagement de la brune. Tout lui revient alors. Milo, Cassandra et Ophelia qu’elle avait gardé la veille, le repas partagé parce que Milo, justement, avait insisté et qu’elle était tout bonnement incapable de refuser quoi que ce soit à cet enfant. Les regards échangés étaient certes plutôt équivoques concernant l’attrait qu’ils pouvaient chacun éprouver, mais elle ne s’était pas imaginée que ça irait plus loin… Même si à aucun moment, elle n’avait esquissé le moindre moment pour partir une fois le repas terminé. Il avait fallu qu’il taise une de ses remarques cyniques sur un sujet déjà oublié par un baiser et les choses s’étaient ensuite enchaînées rapidement. Il lui arrivait d’avoir des aventures, à Alma. C’était rare, mais ça pouvait arriver. Mais jamais elle ne s’endormait, l’immortelle préférant rentrer chez elle aussitôt pour éviter tout moment gênant. Un soupire quitte ses lèvres alors qu’elle quitte le lit le plus délicatement possible. Elle récupère ses vêtements qu’elle s’empresse d’enfiler, jetant de temps en temps un coup d’œil vers la silhouette de l’homme. Ce n’était pas qu’elle regrettait – la nuit avait été des plus plaisantes – mais elle n’aimait pas ces moments quand ni l’un ni l’autre ne savait agir avec l’autre. Alma n’était pas très douée en termes d’interactions sociales et en général, elle préférait les fuir le plus possible. Alors, une fois habillée, elle quitte la chambre, déterminée à partir d’ici le plus rapidement possible.

C’était sans compter sur la scène absolument adorable qui se déroulait dans la cuisine. Alors qu’elle progressait sur la pointe des pieds pour ne réveiller ni Caleb, ni ses enfants, un léger bruit venant de la cuisine attira son attention. Intriguée, elle s’y rendit pour tomber sur Milo, qui tentait de pousser une chaise vers un meuble sans doute trop haut pour lui. Quand il l’entendit arriver, il se tourna vers elle, un air désolé au visage. « Je veux faire mon chocolat mais papa dort encore… » S’il ne demande rien, il n’en a pas besoin. Il suffit qu’elle croise le regard de l’enfant pour que toute résolution ne fonde et qu’une tendresse qu’elle n’avait que trop rarement éprouvé ne vienne serrer son cœur. « Si tu veux, je peux t’aider Milo. » Et tant pis pour le moment gênant qui arrivera forcément ; ça en vaut bien la peine, quand elle observe le sourire rayonnant qui orne les lippes du garçon. Elle s’approche et récupère le nécessaire dans l’armoire, avant d’hésiter et de se tourner vers Milo. « Et si on faisait des pancakes pour ton père et tes sœurs ? » Nouveau sourire. « C’est vrai, on peut ? » Elle hoche la tête tandis qu’elle saisit les différents ingrédients dont ils auraient besoin. La préparation se fait dans un calme tout relatif. Si Alma tente d’être la plus discrète possible, Milo ne cesse de lui raconter ce qui lui passe par la tête. Non pas que ça la dérange. Elle l’écoute attentivement tout en l’aidant avec la pâte, hochant la tête et répondant de temps à autre. Elle ignorait d’où venait ce besoin de rendre heureux Milo – elle savait simplement qu’il réveillait chez elle une certaine tendresse et un désir de le savoir heureux. Et alors qu’ils s’occupent tous les deux de la cuisson d’une pile de pancakes probablement un peu trop importante, l’immortelle entend Caleb s’approcher alors que Milo lui explique en détail la vie de la poupée qu’il avait depuis peu. Elle tourne la tête vers l’homme, ne sachant comment réagir, avant de se contenter d’un sobre « Milo voulait faire des pancakes. » Déjà, le garçon se rue vers son père en courant. Inutile de préciser que l’idée des pancakes venaient d’elle – déjà, elle reporte son attention sur la préparation devant elle tandis qu’elle cherche déjà comment elle pourra s’extirper de cette situation.

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They didn’t agree on much. In fact, they didn’t agree on anything. They fought all the time and challenged each other ever day. But despite their differences, they had one important thing in common. They were crazy about each other. @Alma Moreno

Merde. C’est la première pensée qui traverse l’esprit de Caleb lorsqu’il ouvre les yeux, et ne trouve personne à côté de lui. Merde. Un grognement de frustration lui échappe tandis qu’il se redresse en repoussant les draps. Il se sent un brin honteux et surtout, terriblement stupide. Un peu comme un adolescent vivant ses premiers émois amoureux – et ses premières déceptions. Il a beau réfléchir, il ne se souvient pas du moment où les choses ont dérapé. Du moment où il est devenu le cliché du père qui couche avec la babysitteur de ses enfants. Pourtant, franchement, Alma n’est pas… Eh bien, Alma n’est pas la première personne à laquelle on pense quand on doit faire garder ses bambins. Non pas que la jeune femme ne soit pas pleine de qualités, mais… Mais la patience n’en fait pas partie. C’était pourtant elle qu’il avait appelé pour lui demander de garder les enfants, sa babysitteur habituelle étant indisponible ce soir-là… Et elle avait accepté, apparemment parce qu’elle ne pouvait pas résister à Milo. En fin de compte, Caleb n’était pas rentré aussi tard qu’il le pensait, juste à temps pour dîner avec les enfants… Et inviter Alma à leur table, puisque les petits avaient insisté. Puis ils étaient allés se coucher, elle était restée un peu et… Les choses avaient dérapé. À quel moment exactement, Caleb est incapable de s’en souvenir mais une chose est sûre, c’est avec la belle Cubaine qu’il s’est endormi la veille. C’est pourtant seul qu’il s’est réveillé, seul avec la désagréable impression d’avoir fait quelque chose de mal. Il faut dire que c’est la première fois qu’il partage son lit avec une femme depuis la mort de sa femme, il y a deux ans. Deux ans déjà. Et pourtant il se sent comme écrasé par une vague de culpabilité, comme s’il avait trompé Helen et foutu en l’air leurs vœux de mariage. Sauf qu’Helen est morte, ses cendres ont été dispersées et il n’y a guère que dans ses cauchemars qu’elle viendrait lui reprocher de recommencer à vivre. Mais deux ans de deuil, est-ce trop long ou pas assez ? La question se posera plus tard. Il y a de l’agitation dans la cuisine ; vu l’heure, les enfants sont probablement tous debout, à attendre qu’il vienne leur préparer leur petit-déjeuner. Caleb se dépêche de se rhabiller, avant que l’un d’entre eux ne débarque dans la chambre comme une petite tornade morte de faim.

Ce n’est pourtant pas trois petites têtes blondes affamées qu’il trouve dans la cuisine. Il y a Milo, assis sur une chaise trop haute pour lui avec sa poupée préférée entre les mains, et… Et Alma, occupée à préparer des pancakes, apparemment. Caleb n’a pas le temps de dire quoi que ce soit que Milo descend maladroitement de sa chaise pour venir se jeter dans ses bras. « Alma m’a aidé à faire mon chocolat, parce que tu dormais encore ! Et puis on fait des pancakes pour Lia et Cassie, aussi. » « Hmhm… Et si tu allais réveiller tes sœurs, justement ? » « Il faut donner son petit-déjeuner à Bear, aussi ! » « Je m’en occupe, promis. Allez, vas-y. » Caleb repose Milo par terre, et le petit trottine joyeusement jusqu’à la chambre des jumelles, qui vont certainement râler avant de sentir la bonne odeur des pancakes. Leur père, quant à lui, profite de deux minutes de répit, le temps de donner à manger au chien. Deux minutes, le temps de songer à la façon la mieux appropriée et la moins gênante d’adresser la situation. De toute évidence, Alma n’est pas plus à l’aise que lui, puisqu’elle évite soigneusement de croiser son regard. Caleb fait durer le supplice, le temps de mettre la table pour le petit-déjeuner, allant même jusqu’à sortir trois bouteilles de jus de fruit différentes. Mais en fin de compte, il ne fait que reculer pour mieux sauter. Adossé contre le comptoir central de la cuisine, Caleb s’éclaircit doucement la voix. « C’est drôle, d’habitude, Milo ne réclame que de la brioche, avec son chocolat chaud… » Façon à peine détournée de faire comprendre à la jeune femme que son histoire de pancakes ne tient pas vraiment la route. À n’en pas douter, Milo est encore parvenu à l’embobiner d’une façon ou d’une autre. Du haut de ses deux ans, avec ses bouclettes d’angelot et ses petites lunettes, il est passé maître dans l’art d’obtenir tout ce qu’il veut de presque tout le monde. La seule exception étant ses sœurs, qui arrivent dans la cuisine en ronchonnant, en bâillant et en se frottant les yeux. Ophelia et Cassandra vont s’asseoir à table, avant de remarquer la présence d’Alma. Merde. Ophelia ouvre de grands yeux ronds et Caleb a l’impression de voir la lumière se faire dans son esprit, tandis que Cassandra met directement les pieds dans le plat. « Tu es restée dormir à la maison ? » Caleb ouvre la bouche pour répondre, limiter la casse, mais aucun esprit n’est plus vif que celui d’un bambin de deux ans surexcité. « Oui, avec papa ! » C’est vrai ce qu’on dit, il n’y a que la vérité qui sort de la bouche des enfants.

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Deux minutes, ça peut paraître court, surtout dans la vie d'un être immortel, mais dans les bonnes – ou mauvaises, au choix – circonstances, ça peut être affreusement long. Plus long qu'une vie, même. Deux minutes, c’est le temps que Caleb met à lui adresser la parole. Entre temps, il envoie Milo réveiller ses sœurs, s’occupe de nourrir le chien et de mettre la table en évitant soigneusement de la regarder. Il est évident que la situation l'indispose autant qu'elle, ce qui ne présage rien de bon concernant la suite des évènements. Alma n’est pas forcément mieux. Elle se concentre sur la préparation qui cuit sur ses yeux et sur cette pile de pancakes qui ne fait que grandir encore. Elle ne cherche pas à lui parler ni à poser le regard sur lui, encore trop gênée. Que pourrait-elle lui dire, de toute façon ? Que la nuit passée à ses côtés avait été incroyablement agréable mais qu’il s’agissait sans doute d’une erreur ? Qu’elle n’aurait pas dû, que tout cela la mettait extrêmement mal à l’aise et qu’elle aurait préféré ne jamais avoir à le croiser ce matin-là ? Elle était quasiment sûre que sans le lui dire, il devait arriver à la même conclusion. Et si elle s’efforce de chasser les souvenirs de cette nuit, elle n’en reste pas moins affreusement gênée, elle qui n’a pourtant jamais honte de rien. Sans doute que la présence des enfants était pour beaucoup dans cet état d’esprit qui ne lui ressemblait pas. Ça et, assurément, son manque d’appréhension et de compréhension des émotions en règle générale. Elle se fige pourtant quand la voix de l’homme raisonne, main posée sur la spatule faisant tourner le pancake en pleine cuisson. L'immortelle prend alors conscience qu'il sait que l'idée vient d'elle et sans savoir pourquoi, ça la gêne presque plus que la situation dans laquelle ils se trouvent tous les deux. « Il a sans doute voulu changer, cette fois. » Il ne la croira pas, forcément. Il connaissait suffisamment son fils et ses habitudes alimentaires pour savoir qu’elle mentait, parce que c’était plus facile. Un soupir quitte ses lèvres alors qu’elle dépose le dernier pancake sur la pile avant de se tourner vers Caleb, bras croisés sur sa poitrine. « J’voulais… J’voulais partir. Mais Milo était là.. » Milo utilisé comme justification à sa présence, alors même que l’enfant aurait probablement pu se débrouiller seul. Mais elle se voyait mal partir face à ces grands yeux auxquels elle peinait à résister. Heureusement – pas vraiment – ils ne restent pas seuls bien longtemps. La cuisine est bientôt envahie par Milo, Cassandra et Ophelia. Elle remarque leurs regards visiblement interloqués et surtout, les conclusions qu’elles semblent tirer en la voyant ici, vêtue de ses vêtements de la veille. Et comme si ça ne suffisait pas, Milo répond avec une spontanéité à la fois adorable et gênante pour l’immortelle, qui pourrait presque sentir ses joues chauffer sous l’effet de l’embarras éprouvé. « Oui en fait… On a beaucoup discuté avec votre père hier soir. On a pas fait attention à l’heure et comme il était tard… Votre père m’a gentiment proposé de rester dormir ici. » Le regard échangé par Ophelia et Cassandra lui fait comprendre qu’elles ne semblent pas réellement croire en cette excuse maladroitement proposée par Alma. Que pouvait-elle dire d’autre, de toute façon ? Son champ d’action était limité et elle faisait de son mieux pour ne pas céder sous la honte qui vient chauffer son visage. « Mais pourquoi t’as le droit de dormir dans le lit de papa ? Nous on a plus le droit parce que papa dit qu’on est grand ! » La cubaine se racle la gorge alors qu’elle tente de garder une certaine contenance – et surtout, elle se retient de ne pas s’enfuir en courant face au malaise grandissant qui la possède. Si elle adore les enfants, à cet instant précis, elle se demande ce qui a bien pu lui passer par la tête en acceptant de les garder. « Le canapé n’était pas assez grand pour moi. » L’excuse est bancale alors elle s’empresse de se retourner vers la pile de pancakes pour éviter les regards des enfants – mais aussi celui de Caleb. Elle saisit l’assiette et la pose au centre de la table déjà dressée. « J’vais vous laisser profiter de votre déjeuner, j’ai du travail en ville alors… » Et elle n’a pas le temps de finir sa phrase que cette fois, c’est Ophelia qui la coupe. « Mais hier quand tu nous gardais tu disais que tu travaillais pas aujourd’hui, alors pourquoi tu restes pas ? » Et cette fois, c’est vers Caleb qu’Alma tourne son regard, à court d’excuses et de prétextes, espérant qu’il saura les sortir de cette situation de plus en plus embarrassante. A cet instant, la brune se dit qu’elle préfèrerait affronter une armée d’agents du conclave que ces trois enfants bien trop perspicaces.
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Faites des enfants, qu’ils disaient… Caleb a l’impression que c’est lui, le gosse pris la main dans le sac. Impossible d’échapper aux trois paires d’yeux qui l’observent, Alma et lui. C’était exactement ce genre de situation qu’il voulait éviter. Le psychiatre de ses enfants lui avait pourtant bien dit que lorsqu’il déciderait de refaire sa vie, il ne faudrait pas qu’il cache la vérité aux petits. Très bien. Sauf que Caleb n’avait absolument pas prévu que sa relation avec Alma prendrait un tel tournant. Évidemment, il n’était pas aveugle, il avait bien entendu remarqué le charme de la Cubaine et son caractère piquant n’était pas pour lui déplaire. Mais deux ans après le décès d’Helen, il ne se pensait pas prêt à entamer une relation – quelle que soit son genre – avec une autre femme. Il pensait encore moins être pris sur le fait et se retrouver comme un idiot à chercher des explications à fournir à ses enfants. Du haut de ses deux ans, Milo ne comprend pas tout et il pourrait peut-être s’en sortir sans trop de dégâts avec lui… Mais les jumelles sont malignes, presque trop pour leur âge. Le sourire qu’elles affichent ne trompe personne, de même que les regards qu’elle lance à Alma. D’ordinaire, elles se seraient davantage intéressées aux pancakes, mais ce matin-là, il y a bien plus intéressant pour elles. Caleb manque de se frapper le front à la remarque de Milo qui, en fin de compte, n’est pas aussi dupe qu’il le pensait. Que répondre à cela ? Même le chien le regarde d’un drôle d’air. Il n’a qu’une envie, disparaître dans un trou de souris. Heureusement, Alma a plus de répartie que lui. « Oui, exactement, euh… Le canapé n’est pas très confortable. » Cassandra commence à ouvrir la bouche, alors il lui coupe l’herbe sous le pied. « Je veux dire, c’est un très bon canapé pour regarder des dessins animés, mais pas pour dormir. Et puis Alma et moi sommes de grandes personnes. » Et donc… ? Son excuse est pour le moins bancale, mais elle passe inaperçue. Cette fois, c’est Ophelia qui part à l’assaut tandis que sa jumelle et son frère se servent des pancakes. Pour Milo, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Caleb se sent rougir légèrement quand Alma se tourne vers lui, à court d’arguments pour convaincre les enfants. Cette fois, il ne retient pas son soupir contrit avant de s’éclaircir la gorge. « Les filles, et si vous aidiez Milo à aller s’habiller avant de faire de même, hein ? » Cassandra hausse les sourcils et parle la bouche pleine. « Mais ! J’ai pas fini mon petit-déjeuner ! » Effectivement. « Vous finirez plus tard, tu sais bien que je dois déposer Milo à la crèche plus tôt que vous à – » « Mais papa, on est samedi ! T’as déjà oublié la semaine dernière ! » Et merde. Merde, merde et encore merde. Il prend une profonde inspiration en songeant qu’il ne serait pas contre être frappé par la foudre dans la seconde.

« Bon, alors on va… On va juste finir de prendre le petit-déjeuner tous ensemble. » Il lance un regard complètement navré à Alma avant de lui adresser un petit « Café ? » qui trahit toute la gêne qu’il éprouve à cet instant. Les tasses pleines, il en dépose une devant la jeune femme avant et va s’asseoir à côté de Milo, qui a profité de la diversion pour donner un pancake entier à Bear, couché sous la table au cas où quelqu’un d’autre déciderait de partager ses pancakes avec lui. Et c’est ainsi que commence le petit-déjeuner le plus long et le plus gênant de toute son existence. C’est samedi alors forcément, les petits prennent leur temps et en redemandent. Il se demanderait presque s’ils ne le feraient pas exprès. Les gloussements partagés entre Ophelia et Cassandra ne lui échappent pas ; pas plus que Milo qui tente de réciter à Alma la liste de tous les dinosaures qu’il connaît. C’est qu’il s’est vite attaché à la jeune femme, le petit. Il faut dire qu’il n’a jamais eu de figure maternelle dans sa vie. Leur grand-mère ne fait pas de grandes démonstrations d’affection, ils ont changé plusieurs fois de babysitteurs et s’il adore les assistantes maternelles de la crèche, ce n’est pas comme avoir quelqu’un pour lui tout seul, alors il en profite. Et ça lui brise le cœur, à Caleb. Parce qu’Alma n’a pas signé pour tout ça. La nuit précédente n’aurait même pas dû arriver et de toute évidence, elle avait prévu de filer sans demander son reste avant d’être interceptée par Milo et son envie de chocolat chaud. « Allez, tous les trois, filez vous habiller. Et n’oubliez pas de vous brosser les dents ! » « On peut aller au parc après, dis ? » « S’il ne pleut pas, oui. » Trois petites voix enjouées s’élèvent, et les trois enfants disparaissent dans leur chambre après quelques secondes. « Putain. » Caleb a pensé à voix haute. Il a l’impression d’avoir retenu son souffle pendant une bonne demi-heure ; c’est tout juste s’il a réussi à boire et manger quoi que ce soit. « Tu sais, tu n’étais pas obligée de… De rester. Pour Milo. Tu aurais pu l’envoyer me réveiller… Enfin… Merci pour lui, c’était adorable de ta part. » Il se racle la gorge. « Tu peux… Tu peux y aller, ils sont occupés pour un moment, Ophelia et Cassandra vont sans doute se disputer sur le choix des vêtements de Milo… » Ce n’est pas qu’il ait vraiment envie de la mettre dehors. Mais chaque seconde est plus catastrophique que la précédente, et il n’a pas le courage d’aborder la nuit qu’ils ont passée ensemble.

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Ces enfants sont beaucoup trop perspicaces. Voilà ce qu’elle se dit, Alma, alors que chaque mot semble être scruté, examiné sous une loupe détenue par ces mini enquêteurs en herbe. Pourtant, c’était justement cette intelligence et cette capacité à pousser leur réflexion qui avait, en partie, poussé Alma à s’attacher à eux. Il n’y avait évidemment pas que ça – les grands yeux de Milo et cette insouciance propre aux enfants avaient grandement aidé. Mais là, alors qu’elle avait l’impression d’être mise dos au mur, elle trouvait cette particularité drôlement agaçante. Ne pouvaient-ils tout simplement pas prendre ce qu’ils disaient pour argent comptant ? Caleb ne s’en sort pas beaucoup mieux ce qui, au fond, l’amuse un peu. Elle ne laisse pourtant rien paraître, mais le fait qu’il soit si hésitant avec ses propres enfants était quelque peu attendrissant. Réflexion qu’elle garde volontiers pour elle, Alma. Les enfants protestent et après des derniers arguments bancals, obtiennent gain de cause. Le regard qu’il lui lance alors témoigne du malaise qu’il éprouve assurément. « Merci. » offre-t-elle toutefois alors qu’il lui sert du café et qu’elle s’installe à table à son tour. Ce n’était pas comme si elle avait le choix… Ou plutôt, si, elle l’avait. Elle pourrait très bien partir mais cela pourrait probablement signer la fin de ses aventures de baby-sitter occasionnelle et elle ne saurait expliquer pourquoi, mais l’idée lui tort le cœur. Alors, elle prendra sur lui. La cubaine a survécu a bien pire par le passé, ce n’était pas un déjeuner qui allait venir à bout d’elle, n’est-ce pas ? Pourtant… Pourtant, elle aurait préféré se battre contre le premier membre du conclave venu que de devoir supporter un déjeuner si long. Heureusement, Milo ne lui demande pas beaucoup de participation, trop heureux de la voir l’écouter attentivement. Elle hoche la tête de temps en temps, sirotant son café par moment, alors qu’il semble ravi de lui faire part de toutes ses connaissances.

Heureusement, Caleb parvient à faire en sorte que les enfants partent provisoirement une fois le petit déjeuner terminé. Le soulagement l’envahit quand ils disparaissent, tension qui quitte ses épaules en même temps qu’un juron quitte les lèvres du père de famille. Elle n’aurait pas dit mieux, Alma. C’est Caleb qui prend l’anglais en premier, et la cubaine se contente d’hausser les épaules. « C’est rien. » Elle aurait pu ajouter que ça lui avait fait plaisir, mais elle n’en fait rien, trop habituée à ne jamais véritablement donner le fin fond de sa pensée. Les mots lancés un peu maladroitement ne lui plaisent étrangement pas, impression d’être un peu mise dehors – alors même qu’elle était la première à vouloir fuir quelques instants plus tôt. « T’as raison, je vais y aller. » L’immortelle se lève, fait quelques pas pour sortir de la cuisine… Avant de faire demi-tour et de revenir vers Caleb. « Non en fait j’vais pas partir maintenant. » Du moins, pas immédiatement. Bien sûr, elle n’allait pas traîner… Mais elle n’aimait pas cette sensation de malaise qui planait entre eux. Elle croise ses bras sur sa poitrine avant d’ajouter. « Écoute, j’sais que ce qui est arrivé hier n’était pas supposé arriver. » A aucun moment, elle ne voulait qu’il s’imagine qu’elle désirait une relation quelconque alors même que la simple notion d’engagement lui donnait des nausées. « Mais c’est arrivé. On est des adultes et on a couché ensemble, pas besoin d’en faire toute une histoire. » Non pas qu’Alma soit du genre à se laisser souvent aller dans les bras d’autrui, mais il n’avait pas besoin de le savoir… Tout comme elle ignorait sans doute à quel point ce moment pouvait l’avoir troublé. « De toute façon, ça n’arrivera plus, pas vrai ? Alors mettons ça sur le compte de… de la fatigue. Et si ça te gêne trop, on peut faire en sorte de ne plus en parler. Mais évitons de rendre ça plus gênant que ça ne l’est vraiment, d’accord ? » Elle ne précise pas qu’elle a peur que cet instant ait donné envie à Caleb de couper les ponts, la privant de ce lien si particulier qu’elle nouait avec les enfants par crainte qu’il ne réalise qu’elle s’attachait plus qu’elle ne le devrait réellement.

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Caleb a l’impression que son palpitant faire les montagnes russes. Ce n’est pas tout à fait la matinée qu’il s’attendait à passer. Pas plus qu’il ne s’attendait à passer la nuit en si charmante compagnie, et encore moins à la trouver toujours chez lui au réveil. Non pas qu’Alma soit moins charmante le reste du temps, mais… Mais Caleb n’arrive plus à penser, il a l’esprit aussi embrumé que s’il avait avalé une bouteille d’alcool entière. C’est d’autant plus compliqué à gérer qu’il faut jouer la comédie devant les enfants ; enfants qui ne sont pas aussi naïfs qu’ils l’espèrent, il en est persuadé. Les petits partis s’habiller, il constate avec désarroi qu’il n’est pas plus à l’aise une fois seul avec Alma. Il ne s’est pas retrouvé dans une telle situation depuis ce qui lui semble être une éternité. Avec Helen, les choses s’étaient faites en douceur. Là, c’est complètement inattendu, exactement à l’image de la jeune femme qui lui fait face. Il n’a plus l’impression d’être un adulte, simplement d’être un gamin pris en faute et qui ne sait pas quoi dire pour s’expliquer. Les choses, pourtant, ne sont pas bien compliquées. Ce qui est arrivé est arrivé, entre deux adultes consentants, rien d’immoral là-dedans. En théorie. En pratique, c’est bien plus confus et il se sent aussi gauche qu’un bambin qui fait ses premiers pas. C’est drôle parce que d’ordinaire, Caleb est un type plutôt sûr de lui. Son métier l’exige, sa place au Conclave également. Il est excellent comédien, passé maître dans l’art de la manipulation, gentleman extraordinaire capable de se sortir de situations épineuses… Mais il y a quelque chose de presque surnaturel chez Alma qui lui fait perdre tous ses moyens. Pour parler franchement, en face d’elle, il se sent con. Alors il ne sait pas vraiment comment réagir lorsqu’elle réagit à ses paroles par l’affirmative et décide de s’en aller. Ou pas, en fin de compte, et il peut s’entendre déglutir bruyamment en même temps qu’il la regarde, les yeux ronds. Il ouvre la bouche pour dire quelque chose, mais Alma lui coupe l’herbe sous le pied. Elle lui coupe le sifflet, même. Alors il se retrouve à l’écouter vider son sac sans dire un mot, bien conscient qu’elle a parfaitement raison de lui dire tout ce qu’elle lui dit, et pourtant un brin horrifié par les mots qui sortent de sa bouche. Est-ce par qu’il n’a pas l’habitude qu’on soit aussi franc avec lui ? À moins qu’il ne soit plus coincé qu’il ne le soupçonnait… ? Il est obligé de faire le vide dans son esprit pour ne pas avoir l’air d’un parfait imbécile planté droit comme un piquet devant Alma.

Il est obligé de s’éclaircir bruyamment la gorge avant de lui répondre, et pour essayer de se redonner une certaine contenance, il croise les bras. « Oui, oui, tu as raison… Nous sommes deux adultes… Responsables… » Heureusement pour Caleb que le ridicule ne tue pas, il serait tombé raide mort aux pieds de la demoiselle, sinon. Il se mort la langue pour toutefois arguer qu’ils n’étaient si fatigués que ça la veille au soir, mais il craint les répercussions qu’auraient une telle remarque – remarque stupide s’il en est. « Ne plus en parler ? Non… Enfin je veux dire oui, bien sûr, n’en parlons plus… Ce qui est arrivé est arrivé et… C’est tout. » C’est tout ? Oh non, certainement pas. Mais Caleb a la désagréable impression d’être pris entre le marteau et l’enclume. Si Alma ne veut plus en parler, il ne peut pas – et ne veut pas – la forcer à le faire. De toute évidence la situation est aussi gênante pour elle qu’elle l’est pour lui, alors à quoi bon enfoncer le clou ? Tout ce qu’il espère, c’est qu’elle ne prenne pas la poudre d’escampette pour ne plus jamais lui donner de nouvelles. Elle en aurait tout à fait le droit, mais les enfants ne le comprendraient pas. Milo encore moins que les jumelles, parce qu’il s’est bien trop attaché à Alma. C’est de sa faute, et Caleb le sait : le petit n’a jamais eu de véritable figure maternelle, au milieu de ses différentes babysitteurs et du personnel de la crèche. Alma est la première à être restée assez longtemps pour qu’il puisse développer un lien avec elle. Il parle toujours de la Cubaine avec des étoiles dans les yeux, alors l’idée qu’elle puisse disparaître de sa vie d’un coup serre le cœur de son père. C’est d’ailleurs au moment où il s’apprête à demander à Alma si elle compte revenir que les trois petites têtes blondes refont leur apparition. Cassandra et Ophelia ont décidé d’habiller Milo tout en rose, et il n’a de toute évidence pas protesté. La seule chose qui semble le rendre perplexe, ce sont les couettes que ses sœurs ont essayé de lui faire. « On est prêts ! Et on s’est bien lavé les dents. Même que Milo a mis du dentifrice partout. » « Mais ! J’ai même pas fait exprès ! C’est tombé dans l’évier quand j’ai voulu le mettre sur ma brosse à dents ! » Le petit bonhomme croise les bras d’une façon assez similaire à celle de son père et l’air boudeur, il va se cacher derrière Alma. Ce qui ne semble pas perturber les jumelles le moins du monde, puisqu’elles se rapprochent de leur père avec ce petit air espiègle qu’il reconnaît si bien. « Dis, papa, puisque tu ne travailles pas aujourd’hui, on peut aller au parc alors ? Pour une fois, il pleut même pas ! Peut-être même qu’Alma peut venir avec nous ? Hein, Alma ? » « Allez, dis oui, dis oui, dis oui ! » Caleb retient un soupir. Comment est-il censé se sortir de ce pétrin, quand ces trois-là n’aident pas du tout sa cause ?

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"We're a mess, you and I, but the truth is, you captivate me in ways no soul ever will." @Caleb Faust

Elle ne sait pas à quoi elle s’attend, Alma, mais certainement pas à ça. Elle est surprise par l’hésitation dont fait preuve Caleb, par sa difficulté à former des phrases correctes. Jusqu’à présent, il avait toujours été assez éloquent et sûr de lui et elle ne voyait pas ce qui avait changé. Enfin, si… Mais une simple aventure ne pouvait tout de même pas le transformer autant, pas vrai ? Il semble hésiter, comme s’il n’était pas tout à fait d’accord avec l’idée de ne plus parler de l’accident les ayant lié la nuit passée. La cubaine s’était pourtant imaginée que c’était ce qu’il désirait, et c’était bien pour cela qu’elle lui avait servi cette opportunité de prétendre que rien n’était arrivé sur un plateau. Le silence qui suit l’affirmation de Caleb lui fait comprendre que le malaise instauré était toujours présent en dépit des efforts de la brune. Un soupir quitte ses lèvres alors qu’elle ne sait pas ce qu’elle pourrait dire pour que tout redevient comme avant. « Écoute, c’est pas... » Elle n’a pas le temps de continuer, d’essayer de le rassurer que les enfants font leur retour dans la cuisine. La tenue et la coiffure de Milo lui arrachent un sourire amusé alors que le petit ne semble pas gêné du tout par les couettes approximatives qui ornent son crâne. Milo se cache derrière lui alors que les jumelles passent à nouveau à l’attaque. Décidément… Elles semblaient vouloir garder Alma le plus longtemps possible avec eux et le cœur de l’immortelle se serre. Sans doute qu’elles s’imaginaient qu’il y avait quelque chose de sérieux entre eux, qu’elle prendrait peut-être une place plus importante dans leur vie et l’idée de leur briser le cœur quand elles finiront par comprendre que ce n’était pas le cas réveille en elle des sentiments de culpabilité. C’est peut-être pour cette raison qu’elle finit par hocher la tête. « Bien sûr. Allez mettre vos chaussures et votre veste et on y va. » Les jumelles laissent échapper un petit cri de joie avant de courir vers l’entrée pour récupérer leurs chaussures. « Je m’occupe de Milo. » lance-t-elle tout naturellement à Caleb alors que le garçon glisse sa petite main dans celle de la cubaine qui la guide jusqu’au canapé. Elle récupère ses affaires et l’aide à enfiler ses chaussures et sa veste, avant de le débarrasser des couettes loupées et de le recoiffer correctement dans un geste affectueux. La brune récupère son propre sac et file vers l’entrée où les jumelles sont déjà prêtes, tandis que Milo se met à courir pour la rattraper et saisir à nouveau sa main. Une fois Caleb prêt, ils sortent tous les deux et pour une fois, Alma n’est que trop heureuse des bavardages incessants des filles qui n’ont de cesse d’accaparer l’attention de leur père alors qu’elle se contente de répondre aux questions de Milo, évitant un autre moment gênant entre les deux adultes. Le parc n’est pas très loin et il ne faudra qu’une dizaine de minutes pour qu’ils ne l’atteignent. Le temps clément – bien que toujours trop froid d’après la cubaine habituée à de plus fortes chaleurs – fait que le parc n’est pas tout à fait vide. « On fait la course ? » Elle tourne la tête vers Milo et ce sourire auquel elle ne résiste toujours pas. « Tu sais quoi ? On tient à deux et les filles feront équipe aussi. Ton père sera l’arbitre… Si ça vous va à tous. » Elle pointe du doigt deux arbres situés à une dizaine de mètres d’eux et se met en position de départ une fois que tout le monde a accepté. Quand le signal de départ est donné, Alma s’empresse de porter Milo qui rit aux éclats quand elle se met à courir et dépasse les filles qui ne manquent pas de râler. Elle atteint l’arbre avant Ophelia et Cassandra, ce qui pousse le plus jeune à s’exclamer. « On a gagné ! » Si les filles n’hésitent pas à critiquer la victoire qui, d’après eux, est arrivée parce qu’ils auraient triché, Alma se penche pour déposer Milo au sol. « C’est grâce à toi, t’es un vrai champion ! » Il est plus que ravi, Milo, alors que Caleb arrive à leur hauteur. Apercevant une balançoire libre un peu plus loin, les enfants se mettent à courir en sa direction, laissant à nouveau Caleb et Alma seuls… Enfin pas tout à fait. Ils étaient toujours accompagnés par ce malaise présent depuis le réveil. « J’peux toujours les garder quand t’en as besoin. » lance-t-elle d’une traite, sans l’avoir réellement prévu. La brune tente un regard vers l’homme, essayant de jauger sa réaction. « Enfin si tu veux. J’peux comprendre si tu préfères éviter, avec ce qui est arrivé. » Elle peut comprendre, oui, mais elle sait déjà qu’elle ne le vivrait pas bien.

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They didn’t agree on much. In fact, they didn’t agree on anything. They fought all the time and challenged each other ever day. But despite their differences, they had one important thing in common. They were crazy about each other. @Alma Moreno

Caleb est totalement dépassé par la situation. Ses charmantes têtes blondes ont pris le contrôle, il n’est plus qu’un spectateur impuissant face à leur volonté. Volonté à laquelle il est bien difficile de résister, aussi bien pour lui que pour Alma. Comment pourraient-ils ne serait-ce que songer à briser leurs petits cœurs ? De toute évidence, les jumelles et Milo se sont tous les trois beaucoup attachés à Alma. Vite, trop vite. Mais comment aurait-il pu éviter ça ? Depuis la mort d’Helen, hormis leur grand-mère, ils n’ont pas eu de figure féminine dans leur vie. Encore moins de figure maternelle. Alma n’est pas leur première babysitteur, mais elle est la première à ne pas lâcher l’affaire et à ne pas se plaindre des horaires parfois difficiles de Caleb. Sans compter que trois enfants, ce n’est pas rien… Trois enfants orphelins de mère, prompts à s’attacher à cette femme qui fait partie de leur quotidien depuis déjà plusieurs semaines. Et maintenant qu’elle a passé la nuit chez eux, avec lui… Caleb se retient d’étouffer un rire nerveux. Ils sont tous les trois trop jeunes pour comprendre qu’entre les adultes, les choses ne sont pas toujours sérieuses. La vraie vie, ce n’est pas comme dans leurs contes de fées, ils vivent rarement heureux jusqu’à la fin de temps. Et c’est bien dommage, d’ailleurs. Un soupir lui échappe et il hoche la tête, s’avouant vaincu : direction le parc, tous ensemble. Les trois enfants éclatent de joie après qu’Alma ait accepté de les accompagner et il n’a même pas le temps de lui dire qu’elle n’est pas obligée que déjà, elle va aider Milo à terminer de s’habiller. Cassandra et Ophelia disparaissent comme deux petites tornades pour aller enfiler leurs chaussures et leurs vestes et lui, il… Reste planté comme un idiot dans la cuisine, les bras le long du corps. « Bon, eh bah… Je suppose que je vais m’occuper de Bear. » Le chien incline la tête et l’interroge du regard après avoir entendu son nom. Caleb n’a plus qu’à faire son deuil ; le contrôle de la situation lui a échappé. Et quand il met sa laisse à Bear, il se demande lequel des deux promènera l’autre, au final.

Dieu merci, le parc n’est pas très loin et les jumelles accaparent trop son attention pour qu’il puisse trop s’appesantir sur cette situation pour le moins embarrassante. Quant à Milo, il a le monopole sur Alma, qu’il ne semble pas avoir l’intention de lâcher. Cette vision lui réchauffe le cœur autant qu’elle le lui fend. Sa mère, le petit garçon ne l’a connue que les premières semaines de sa vie, avant qu’elle n’ait son accident. Alors, forcément, pour lui la jeune Cubaine est la parfaite figure maternelle. En a-t-elle conscience ? Sans doute, elle n’est pas idiote, mais ce n’est pas ce jour-là que Caleb aura le courage de le lui demander. Lorsqu’ils arrivent au parc, Milo leur propose immédiatement de faire la course et encore une fois, Caleb n’a pas le temps de réfléchir à une réponse qu’Alma a déjà tout organisé. Il se contente donc de hocher la tête, soulagé de n’obtenir que le rôle d’arbitre. Avant la course toutefois, il détache Bear, conscient que l’Akita risque fort de s’emporter et de leur courir après et la dernière chose dont il a envie, c’est d’être emporté derrière lui… Il s’est déjà fait avoir plus d’une fois, et n’a pas envie de se ridiculiser devant Alma. « Vous êtes prêts ? À trois ! Un… Deux… Trois ! » Et les voilà partis. Les filles ont beau courir vite sur leurs petites jambes, elles ne font pas le poids face à Alma, qui porte Milo jusqu’à la ligne d’arrivée. Comme son fils, Caleb ne peut s’empêcher d’éclater de rire. Cassandra et Ophelia ne sont pas convaincues que les règles aient été scrupuleusement suivies, mais elles sont de bonne composition et concèdent volontiers la victoire à leur petit frère. Et puis, elles trouvent vite de quoi s’occuper. Les balançoires viennent de se libérer, et c’est un fait suffisamment rare pour mériter d’être souligné. « Les filles, n’oubliez pas d’aider Milo à monter sur la sienne ! Et faites attention ! » Les jumelles lui répondent en cœur, et aident Milo à s’installer sur la balançoire la plus appropriée à son âge. Caleb rappelle Bear à son pied, et lui tend l’un de ses jouets favoris pour l’occuper et éviter qu’il ne coure partout dans le parc.

Caleb ne peut s’empêcher de soupirer avant de passer une main dans sa nuque, visiblement mal à l’aise, quand Alma – qui ne perd pas une seconde – lui assure qu’elle peut continuer à garder les enfants s’il en a besoin. « Je, euh… » Tu parles d’un avocat éloquent, ne peut-il s’empêcher de penser en même temps qu’il lève les yeux au ciel. « Ce serait vraiment… Adorable de ta part. De continuer à les garder, je veux dire. Ils se sont beaucoup attachés à toi, tous les trois… Surtout Milo. Mais ça, je pense que tu l’avais déjà remarqué. » Il s’éclaircit la gorge et lui désigne un banc, juste derrière eux. Il va s’y asseoir le premier et reste silencieux un instant, le regard posé sur ses enfants. Tour à tour, Cassandra et Ophelia poussent Milo, qui leur demande de le faire monter plus haut, toujours plus haut. « Pour ne rien te cacher, les choses ont été un peu compliquées, depuis la mort de leur mère… Je fais de mon mieux, mais c’est… Je n’ai pas à me plaindre, je ne me plains pas d’ailleurs, ils sont tous les trois adorables, obéissants et tout ce qu’un parent rêve que ses enfants soient… Mais je n’ai pas un emploi du temps facile, alors ce n’est pas facile de trouver quelqu’un qui accepte de s’occupe d’eux à n’importe quelle heure de la journée. » Il passe une main dans ses cheveux, sourire gêné sur le visage. « Bref, tout ça pour dire qu’ils seraient ravis de continuer à te voir, et moi aussi. » Ah, merde. « Que tu veuilles bien continuer à t’occuper d’eux, je veux dire. » Mais oui, bien sûr, elle sera totalement passée à côté du sous-entendu, imbécile.

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Elle n’était pas supposée s’attacher autant aux enfants, Alma. Ce n’était qu’un service rendu sur un coup de tête et c’était supposé le rester. Rien de plus. Pourtant… Elle se surprend à attendre avec impatience les instants passés avec les jumelles et Milo, à espérer que Caleb aura besoin d’elle pour les garder. L’accident de la nuit précédente risquait d’entacher ce lien si particulier qu’elle avait finalement noué avec eux. C’était bien pour ça que cela ne devait plus se produire. Aussi agréable que cette nuit avait été, les conséquences pouvaient être trop désastreuses pour que la cubaine ne prenne le risque de réitérer l’expérience. Alors, fidèle à elle-même, elle ne perd pas un instant et met les pieds dans le plat en abordant avec l’avocat ce sujet compliqué mais nécessaire. Elle n’aimait pas être dans le flou et elle refusait de passer ses journées à attendre de voir si oui ou non, Caleb finirait par la contacter. L’immortelle perçoit aisément le malaise de l’homme face à sa franchise sans doute déconcertante mais elle choisit de se concentrer sur Milo, Ophelia et Cassandra, dont les rires joyeux venaient jusqu’à eux. Un fin sourire étire toutefois ses lèvres quand il souligne l’attachement éprouvé par les enfants. Elle l’avait remarqué, bien entendu. Au fond, elle craignait un peu qu’ils ne s’attachent trop – elle n’était pas leur mère et ils ne devaient surtout pas la considérer comme telle alors même que son train de vie la poussait à si souvent disparaître dès lors qu’elle pensait que son identité était en danger. Et si elle devait quitter la ville du jour au lendemain, sans même les prévenir ? L’idée lui brise le cœur et pourtant, elle ne peut pas être exclue. Elle devra forcément partir un jour… Alma préfère ne pas y penser et se concentre sur les mots de Caleb, alors qu’elle s’est installée à ses côtés sur un banc. Son cœur se serre alors qu’elle ne peut imaginer la douleur qu’il éprouve et les épreuves par lesquels il est passé depuis la mort de sa femme. Et les enfants… Ils n’auraient jamais du être privés de leur mère. Alors qu’elle cherche les mots, la brune est surprise par l’aveu de l’avocat qui, bien qu’il tente de se corriger, ne passe pas inaperçu. « Tant mieux. Je serais très contente de pouvoir continuer à les voir. Et toi aussi. » Amusée à l’idée de pouvoir le déstabiliser un peu plus, elle n’en dit toutefois pas plus à ce sujet, ayant l’impression de s’être déjà bien trop dévoilée, ce qui ne lui ressemble pas. « Pour ce que ça vaut, je trouve que t’es un père formidable. Ils ont de la chance de t’avoir alors… Tu ne devrais pas culpabiliser parce que tu travailles autant et que tu as besoin d’aide de temps en temps. » Regard qu’elle détourne alors de sa silhouette en se raclant la gorge – c’était assez de sentimentalisme pour la journée. Voir même pour le mois, à bien y réfléchir. « Hm, c’est qu’on a presque l’air d’adultes civilisés, à discuter comme on le fait. » Sourire amusé étirant ses lèvres – étant donné la façon dont avait commencé la journée, rien ne présageait qu’ils parviendraient à discuter réellement. C’était maladroit, certes, mais l’essentiel avait été évoqué et ça lui permettait de respirer un peu mieux, maintenant qu’elle savait qu’il ne la priverait pas de revoir les enfants… Et peut-être lui aussi, même si elle n’admet pas réellement ce fait. Une dispute éclate entre les jumelles et Milo et, de loin, elle les voit arriver vers eux en courant. « Je crois que la pause est terminée. » Et pour sûr, dès qu’ils arrivent, il faut régler le conflit visiblement d’une importance capitale, ce que Caleb fait d’une main de maître, avant qu’ils ne partent ensemble vers une autre partie du parc. Et bien malgré elle, elle ne peut réprimer la chaleur qui englobe son être face à ce moment particulier qu’elle partage avec eux. Rien n’était totalement réglé et elle ne savait pas de quoi le lendemain sera fait mais… Elle se sentait bien, là, avec eux, c’était tout ce qui comptait, pas vrai ?


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