Retour vers le présent (Sam)

Avec un haussement d'épaules, Lowen jeta un regard circonspect à Klara. Le provoquait-elle encore, une fois de plus ? Ou est-ce qu'elle était simplement sincère pour une rare fois dans sa vie ?

« Je pense que je me soucierai de ton bien-être le jour où on arrivera à ne pas se sauter à la gorge pour rien. C'est un fait qui a été prouvé depuis tout à l'heure : la seule chose qu'on veut tous les deux, c'est supporter l'autre le moins possible. Pour ça, il faut donc qu'on s'éloigne un peu, car visiblement, il y a trop de rancune pour qu'on accepte de rester trop longtemps dans la même pièce. Du moins, comme je l'ai dit, sans s'étriper. Et cette fois, si tu veux me tuer, je serais prêt. »

Il joua un instant avec un stylo posé sur le bureau, sans daigner s'asseoir face à la jeune femme. Il réfléchissait à plusieurs choses depuis tout à l'heure, et il fut donc sacrément étonné de la voir sortir une boîte de chocolat. Sérieusement ?

« Du chocolat, sérieusement ? Parce que tu crois que c'est ce qui va faire que la hache de guerre est enterrée ? J'espère au moins qu'il est bon, et pas empoisonné. »

Il en prit, évidemment.

C'était plutôt bon – du chocolat de qualité, en plus, et pas juste une boîte de ces trucs infâmes réservés aux gosses – et il en reprit donc. Très vite, il en oublia le reste : s'installant au bureau, il piocha allègrement dans la boîte, dévorant les chocolats comme s'il ne risquait pas de tomber malade. Et dans les faits, c'était vrai, car au pire des cas, il s'en remettrait bien vite.

« Ah, le chocolat ! La première fois que j'en ai pris, j'ai trouvé ça infâme. Les mecs avaient ramené du cacao pur et ils voulaient le consommer comme ça. Mais depuis, ils ont appris à faire des trucs bien, en matière de cuisine, ces mortels. Piquer leurs recettes et les améliorer me paraît naturel. As-tu déjà goûté un cake à l'ananas et au chocolat ? C'est tellement bon ! »

Allez, un effort, ça ne coûte rien. Il pouvait bien lui offrir ça, sachant qu'elle n'avait probablement aucunement l'intention d'en faire autant. Il pourrait alors le lui faire remarquer, une fois de plus, d'un air triomphant.

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@Samuel Lowe
"Je pense que...j’ai grandi. Pas changé mais grandi. Enfin tu comprends. Ou pas, peu importe en fait. A quoi bon se faire la guerre s’il n’y a plus d’enjeu ? Autrefois, il y avait ce frisson, ce truc entre nous qui pimentait notre relation. Aujourd’hui, à part deux étrangers qui se sont un jour aperçus, qui sommes-nous ?” Bras croisés, regard perdu dans ce lointain qu’elle survole de ses paroles. Pourquoi s’en prendre ouvertement à Lowen ? Quel bienfondé à cette jalousie déguisée qui l‘a assaillie plus tôt dans la journée ? Comme il l’a si bien dit, manquer se faire repérer. Créer du vent. Klara n’était que cela mais, aujourd’hui, elle aspire à plus. Ou peut-être pas. Néanmoins, se retrouver face à l'être aimé pour lequel elle se serait amputée de tous ses membres s'il l’avait fallu (heureusement que l’immortalité confère des gènes surdéveloppés qui réparent l’irréparable).

“Sache, très cher Lowen que si j’avais voulu t’empoisonner, j’aurais usé d’un stratagème beaucoup plus fin. Me prendrais-tu pour une vulgaire sorcière issue d’un conte pour enfants ? Je pensais que tu m’estimais un peu plus mais je vois que je dois tout juste être placée au-dessus du genre humain. Hum...tu me blesses dans mon ego. Et tu devrais prendre le tien très au sérieux, si tel est le cas.” Et son geste radoucit l’humeur impétueuse de la belle qui gagne du terrain. Offrande difficile à donner. Partager ce n’est point la denrée la plus commune qu’offre Klara à ses ennemis. Était-il désormais dans la catégorie ami ? Réponse nébuleuse qu’elle ne cherche à creuser, du moins pour l’instant. Sourire plaqué contre les lèvres, mains qui balaient ses cheveux indisciplinés tentant de ramener de l’ordre dans son image déjà décadente aux yeux du bellâtre. Lui plaire, cela avait toujours été un enjeu. Ses yeux suivent ces boules pralinées qu’il ingurgite comme un vulgaire paquet de chips. Guère bas de gamme, consommait-il aussi la vie ainsi ? Sans saveur ? Malgré sa réussite notoire, il y a toujours eu ce fossé, ce vide qui l’incite à toujours faire plus quitte à paraître ridicule. Soupir peu aisé qui s’échappe contre ses joues et s’évapore aussitôt dispersé. "Les immortels comptent parmi les meilleurs chefs donc tu inverses, encore une fois, les rôles. Je connais un traiteur chinois tenu par une immortelle près de ma boutique, tu t’en décrocherais la mâchoire à chaque bouchée. Je n'imagine même pas les litres de salive qui couleraient le long de ton joli minois. Mieux qu’une paire de jambes humaine. Prenant l’humaine la mieux dotée génétiquement de cette fichue terre.” Coudes posés contre le bois du bureau, minute silencieuse où son regard détaille son interlocuteur. Rancœur. Haine. Curiosité. Trop de sentiments et de ressentiments qui l’assaillent. “Et si on faisait une pause Lowen. J’ai envie de découvrir ce monde dont tu me parles. Peut-être serais-tu capable de m’ouvrir à ce qui te distrait tant dans cette humanité qui me révulse ?”

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Suspendant son geste avec une énième praline dans la main, Lowen reste un instant stupéfait. Ou plutôt, surpris d'un tel revirement de la situation. Partager du chocolat était donc si efficace que ça ? Non, évidemment, mais il paraissait également certain que cela venait d'avoir un effet plutôt positif sur leur conversation profondément haineuse.

Ce qui expliquait sa surprise.

« Moi, inverser les rôles ? Jamais de la vie. Je suis simplement réaliste, et je sais pertinemment comment les choses se passent. »

Il dévora la praline avant qu'elle ne fonde dans sa main, puis fit un geste vague.

« Je pense, ma chère et tendre bis ex-femme, que tu n'as pas besoin de moi pour voir l'étendue du manque de clarté et d'intelligence des mortels. Tu en as encore eu un exemple aujourd'hui : un patron qui veut faire une farce douteuse à son employé favori, en lui collant la soubrette du pauvre... laquelle ne comprends ni ne voit le piège et se retrouve donc prise au dépourvu. Il n'y a pas grand chose de plus à dire de cette histoire-là. Mais tu veux savoir ce qui arrive à me fasciner autant ? »

Avec un sourire supplémentaire, il désigne l'extérieur de la pièce.

« Promène-toi dans la rue. Observe-les. Note toutes leurs manies, tous leurs caprices, et vois à quel point ce peut être frustrant de les sentir aussi limités. Ils veulent tout, tout de suite, maintenant, immédiatement, sans attendre ni sans bouger leur cul. Et pour autant, ils savent prendre le temps d'inventer des choses débiles et de faire des conneries. Va sur Youtube, ou sur les réseaux sociaux, et tu verras à quel point ils peuvent être cons. « Oh non, untel est mort, c'est trop de la faute du gouvernement » Et non, manque de pot ! C'est juste la bêtise humaine qui a fait ça. Tout est bon pour voir leurs esprits étriqués monter les pires complots pour se satisfaire intellectuellement. »

Klara n'a sans doute jamais été autant fascinée que lui par les mortels. Mais il faut dire que Lowen est un grand, un très grand curieux, et qu'il aime pointer tous les petits détails de la vie merdique des mortels. Quelqu'un doit le faire.

« J'adore cette curiosité, car elle prouve chaque jour un peu plus que nous avons raison. Et qu'ils ne méritent qu'une chose, être à notre botte. J'apprécie la main tendue, cela dit en passant, mais tu n'as pas véritablement besoin de moi pour voir tout ça, Klara. »

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@Samuel Lowe
Simple coup d’oeil dans sa direction lorsque les mots s’échappent de sa bouche. Fidèle à lui-même, égalité qui n'a que perduré à travers les âges. Difficile de faire plier celui passé maître dans l'art d'un stoïcisme certain. Bras que Klara croise sans s’en rendre compte face à l’agacement qui nait au creux de son myocarde. Pincée de zèle qu’elle n’avait mis et qui revient à la charge. Sa garde, abaissée il y a peu reprend aussitôt du service. Pourquoi s'abaisser à tempérer là il n’est possible de concéder ? Dualité qu’ils ont formée. Qu’ils forment encore et qui s’envole toujours en fumée. Ruines sur lesquelles on ne peut bâtir que des châteaux branlants. Incapacité à s'avouer vaincue, ils ont par plusieurs fauté mais on ne l’y reprendrait plus. Quelle mouche l’avait donc piquée pour devenir si mièvre ? Rien dans le bellâtre n'amenait à l'envie. Il était un déchet et comme tous, on s’en sert puis ils finissent enterrés ou brûlés par les pauvres mortels.

"Tu veux juste avoir raison et n’a pas envie de te prendre la tête. Ce qui, je te le concède, est une preuve de maturité certaine” lâche-t-elle non pas sans un sourire amer. Acide. Violent et démesuré. Et il discourt sur toutes ces facéties qui font l’humanité. Une humanité volage. Une humanité stupide. Une Sandy qui sait reconnaître l'aura néanmoins. L’aura qu’il dégage. Ce magnétisme qui, un jour, l’a aussi fascinée. Histoires d’un passé qui ne sera déterré. “Tu me trouves chère et tendre ? Je suis effectivement au-dessus de tous moyens. Mais tendre, il y a longtemps que cet adjectif n’a pas été associé à ma personne. Tu es sûr de ne pas être malade ? Les compliments ne te ressemblent mais alors point du tout. Mais je comprends. Le mimétisme des humains. Je te plains. J’espère que tu ne te sers pas de youtube pour t’assurer des fans. Tu n’en as pas besoin. Et ce sera le seul compliment qui brûlera ma gorge mon très cher...Très cher quoi ? Très cher plus rien du tout.” Conversation qu’elle suspend d’un revers de la main tout en se redressant pour jeter la boîte désormais vide à la poubelle. Elle ne reprend son siège mais se pose contre le bureau, aux côtés de Lowen pour l'avoir en plein visuel.

“Néanmoins, j’avoue que tes discours m’ont manqué. Tu défends avec une telle ferveur tes croyances. C’est fascinant. Tu n’as jamais songé à faire de la politique ? Je sais que tu préfères l’ombre mais...Cela serait tellement amusant” suggestion totalement illusoire. “Fut un temps où j’avais besoin de toi” lâche-t-elle cependant, sans réel but.

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Se fendant d'un sourire maigre, Lowen observa un instant son ex-femme avant de lui répondre. La politique, ce terrain de jeu si ardu, si prenant, si dangereux !

« Ça va sans doute te surprendre, mais j'ai déjà essayé la politique. C'est notamment pour ça que je ne m'y aventure plus du tout, et donc pour ça que je préfère rester un homme de l'ombre. Quand tu m'as connu, j'avais déjà tellement essayé ! 911, quand Rollo a reçu des Francs la Normandie. Plus tard, j'ai murmuré à l'oreille des Papes pour les influencer dans leurs envies de croisades et autres conneries religieuses. J'ai même eu mon propre groupe de chevaliers fanatisés, c'est te dire ! Mais toute bonne chose a une fin. »

Il haussa les épaules.

« La politique ne me manque pas. As-tu déjà essayé ? C'est un repaire de vipères, de frelons, d'araignées et autres prédateurs sournois, qui alimentent un jeu vieux de plusieurs millénaires pour le profit du présent. Même nous, les immortels, nous nous livrons à ce jeu, car nous avons en plus le bénéfice de voir les effets sur la durée. Prends exemple : quand Lincoln a promis de faire du pays un endroit égalitaire pour les blancs et les noirs, tout le monde savait que c'était du vent. Pourtant, tout le monde l'a cru, ça lui a rapporté des votes, et basta. Mais est-ce que les choses ont changé ? Je crois pas. »

Il joua un instant avec ses cheveux, pensif.

« Non, clairement, ça ne me tente pas du tout d'y retourner. Je préfère observer, comme tu dis, c'est plus enrichissant et au final, c'est mieux. Car ainsi, je peux voir quel acte a quel effet, et comment le reproduire au mieux pour amplifier les conséquences et donc, l'améliorer. L'Ordre a besoin de gens comme ça, et c'est parfaitement ce que j'aime faire. Apollonia est bien au fait que me forcer à faire ce qui ne me plaît pas n'est pas une bonne idée, ainsi que les plus hautes instances. Donc... merci, mais non merci ! »

Il laissa planer un certain silence.

« Fut un temps où j'étais content que tu ais ce besoin. Mais après ce qu'il s'est passé, je doute beaucoup que la « troisième serait la bonne » ou un truc du genre. Réussir à parler sans s'étriper constitue déjà une forme d'exploit olympique. »

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@Samuel Lowe
“Tout cela est tellement ennuyant. Si la finalité avait été la corruption ou de t’aider dans ton ascension, je prendrais le temps de me pencher sur tes propos mais là...tellement insipide.” Ressenti qui lui tire un frisson. Difficile de maquiller ce manque de transparence ce qu’elle camoufle sous un bâillement étouffé de sa main redressée. Fut un temps où elle aurait apprécié côtoyer son univers, écouter durant des heures ses propres histoires mais à quoi se fourvoyer pour tomber dans des travers qu’ils ont maintes fois écumés ? Des travers qui ont nourri cette haine de l’autre et l’insulte serait triste si elle devait le nommer “ennemi”. Car tel il n’est. Tel il ne pourrait demeurer. Malgré ses apparences houleuses, il demeure au fond de ce cœur rempli de ténèbres une place toute spéciale pour Lowen. Bien enfouie sous un tas de ronces acérées. Bras croisés, yeux braqués sur l’objet d’une convoitise non évidente à déterminer, Klara délie ses lippes pour déclamer : “Sans cesse ces histoires de couleur. Tout est tellement plus saillant que le blanc, au teint.” Comparaison qui n’engage que son esprit critique, exempt de toutes pressions sociales et décriant ces appartenances auxquelles aiment se raccrocher les humains. Lorsque vient l’heure du jugement dernier, ils sont tous mis à nu sans distinction. D’un puéril et mauvais goût certain. "Très cher ex-époux, crois-tu vraiment que je perdrais mon temps à faire de la politique ? Ces humains n’ont pas besoin de moi et jamais je ne m’abaisserais à devenir la reine des fourmis. Plutôt...mourir, ce qui est cocasse, tu en conviendras.” Conversation qui dévie sur leurs appartenances communes, sur la “politique” envers laquelle ils ont, quelque part, prêté serment. Silence qui s’installe, brisée par le cellulaire de l’immortelle. Quelques notes s’échappent du combiné, sous forme textuelle. Grimace qui hante son visage un labs de temps certain. Silence conjoint à celui de son interlocuteur, seulement brisée par sa voix qui désormais s’additionne à celle de l’homme. “J’aimerais...” Mots qui se meurent avant de naître. "On est pas faits de ce bois. Remettre éternellement le couvert. On est au-dessus de ça...l’expérience qui parle certainement ? Mais j’ai besoin de toi, le membre de l’Ordre qui devait m’accompagner sur une mission ne pourra finalement pas. Est-ce qu’au nom de ce bon vieux temps, je peux te demander de mettre nos rancoeurs de côté pour, une dernière fois, goûter au plaisir d’entendre tes sarcastiques commentaires et apprécier ton bon goût vestimentaire ? Et de m'accompagner, au nom de ces nombreux dragons que nous avons terrassés.”

CODAGE PAR AMATIS

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Avec un sourire légèrement crispé, Lowen essaya de déterminer s'il s'agissait d'une blague ou non. Mais visiblement, il avait beau retourner les mots de Klara dans tous les sens, il lui était impossible d'en voir le piège. Elle semblait sincère, aussi bien dans ses paroles que dans ses gestes, et elle savait ce qu'elle voulait. Tout comme elle semblait savoir ce que ça lui coûtait de faire cette demande pour le moins innattendue.

Et évidemment, Samuel ne pouvait qu'accepter une offre aussi tentante.

« C'est un défi, on dirait. Et j'aime les défis comme ça ! »

Il se leva, tendant la main franchement pour serrer celle de Klara.

« Je jure de rester fidèle à moi-même pour le bien de la mission : casse-pieds, sarcastique, plein de mauvaise volonté et d'ironie, mais toujours aussi modeste et bien vêtu qu'à l'accoutumée, et totalement dévoué à faire le boulot comme il faut. Tu me connais, je suis incorrigible. »

Il laissa son sourire devenir plus sincère, et il attendit que la jeune femme réagisse avant de poursuivre. Car accepter était certes l'étape la plus facile, mais aussi la plus compliquée pour eux ; il convenait toutefois de parvenir à s'entendre sur la suite. Quel était ce boulot, qu'allait-il se passer, et comment allaient-ils parvenir à s'en sortir sans se tuer mutuellement ? Car oui, c'était là aussi un sujet à débat !

Ou plutôt, un sujet tout simplement houleux et dangereux pour le duo. Car ils avaient manqué de s'étriper quelques minutes auparavant, et il paraissait plausible que cela arriverait de nouveau s'ils ne faisaient pas attention.

« Maintenant, les explications. Se lancer dans l'inconnu est certes amusant et excitant, mais je te cache pas que je préfère en savoir un peu plus avant qu'on aille plus loin. Les préliminaires, c'est toujours important. »

» key + le passé est la pierre du présent et le reflet du futur...
» (1f/1m) — le retour d'une mère + un vieil ami
» remise en question — (indéterminé) (finie, je suis de retour)