Raffaella •• Losing an illusion makes you wiser than finding a truth.

[1971] Naître à l’opéra, ce n’est pas donné à tout le monde et Raffaella peut aisément raconter les conditions de sa naissance. Oh, elle ne s’en souvient pas, mais les nombreuses fois où ses parents la lui ont raconté. À croire que, dans leurs esprits, ça lui prédominait à un amour éternel de l’Opéra ; disons qu’elle en a tellement vu, jusqu’à sa majorité, qu’elle a eu besoin d’en faire une pause pendant quelques années. Entendre un grand nombre de faits historiques, en grandissant – commençant par ceux de l’Opéra, étrangement – l’a beaucoup plus passionnée, en revanche. À défaut de lui lire un chapitre d’une histoire, ses parents se relayaient pour lui faire découvrir un pan de l’histoire. Enfant unique, elle apprit plus tard qu’après sa naissance, sa mère ne pouvait plus avoir d’enfant, à moins de vouloir risquer sa vie et celle de l’hypothétique bébé, Raffaella a grandit dans une famille aimante et ne s’est jamais sentie autrement qu’aimée et chérie. C’est sans surprise que cette complicité se retrouve dans un intérêt commun, à savoir l’histoire. Et si aujourd’hui elle ne prétendra jamais tout connaître sur le bout des doigts, elle n’en demeure pas moins très cultivée à ce sujet. Mais l’histoire, ça reste vaste et ça reste les objets nourrissant les légendes qui la fascinent depuis toute jeune, à l’image de son père et dans une moindre mesure, sa mère.

[1986] Cette fascination les a menées à voyager autour du monde et Raffaella compte parmi les chanceuses. S’ils n’ont jamais vraiment rien trouvé, ils se sont toujours estimés heureux de chaque expérience, chaque voyage les nourrissant et les enrichissant encore plus. C’est ce à quoi ils aspiraient, à apprendre toujours un peu plus, pour mieux comprendre le monde et les autres. Cette fascination, comme beaucoup de ces dernières, les a aussi menées à leur perte et elle si elle s’en est sortie, c’est uniquement parce que ses parents l’ont protégé. Sur la piste d’une légende, curieux et toujours optimiste, ils se sont retrouvés au mauvais endroit, au mauvais moment. Si à l’époque elle ignorait tout de ce qui s’est passé, aujourd’hui, ça n’est plus le cas. À moitié consciente, elle a vu le bras d’une personne se remettre en place de lui-même et c’est plus tard, qu’elle a été tirée des débris par une personne la sauvant d’un éboulement du bâtiment déjà affaibli par l’explosion.

[1991] Elle ignore que l’immortel l’ayant sauvé ne parlait pas du Conclave, quand il a mentionné une organisation visant à protéger l’existence des siens – plus tard, Ben en aura des choses à dire sur le sujet, mais elle ignore tout de qui est Benjamin Bailey, à cette époque. Comment se retrouve-t-elle en contact avec le Conclave, alors ? Tout porte à croire que plusieurs conflits avaient lieu à l’endroit où ses parents et elle se trouvaient à cette époque et la personne l’ayant recruté a quelque peu… menti, sur son affiliation. Donnant à l’organisation une image de protecteur de l’humanité, de chercheur, travaillant pour le bien des autres. Tout ce genre de conneries qu’une adolescente, toute juste orpheline et remplie de rancœur est prête à croire, on a encore le temps de la polir dans ce sens, à quinze ans et une fois la vingtaine entamée, elle peut réellement être utile à l’organisation, cherchant via l’histoire des preuves indéniables de l’influence d’immortels. Elle ignore ce que le français faisait dans le coin, en revanche, mais cette interrogation est vite mise de côté. Alors, elle a étudié à en faire des nuits blanches, nourris par la colère et le deuil. Ainsi que par le désir de marcher dans les traces de ses parents. Encore aujourd’hui, elle ignore que le responsable de la mort de ses parents et celui l’ayant sauvé (Elle ne sait pas qu’il s’agit d’un.e immortel.le pour ce dernier), font partie de deux factions différentes et que le premier en avait assez de voir des humains mettre leur nez dans l’Histoire et, pensant agir contre des agents des Adorateurs donc de l’Hydre, a décidé d’agir son propre fait.

[1993] Elle a travaillé avec acharnement, Raffa et elle a déjà commencé à faire ses preuves, trouvant des connexions ici et là, pour le Conclave. Mais aussi, elle continue d’étudier pour rendre ses parents fiers d’elle, même s’ils ne sont plus là. C’est peut-être pour ça que son recruteur évite de trop l’impliquer dans les machinations de l’organisation, témoin de son plus grand attachement à ses parents qu’à ses idéaux. Son objectif, à Raffaella – ou du moins, l’un d’entre eux – est de venir professeuresse en université. D’histoire, évidemment, mais aussi chercheuse. Ça lui prendra encore plusieurs années, mais elle atteindra son objectif, enseignant sa passion à d’autres âmes, mais aussi en continuant de voyager à gauche et à droite, dans ce monde si vaste. C’est en complet décalage horaire qu’elle s’arrête un 18 septembre dans un bar, ayant passé des heures dans un avion. L’air frais, est agréable et elle a grandement besoin d’un verre. Le second lui étant offert par le jeune bien agréable à l’œil, qui doit en avoir un sacré coup dans le nez. Mais c’est amusant et si le sujet de la conversation n’est pas le plus passionnant, elle continue la conversation, notamment quand il est question de moto. Oh, elle doit le barber avec son histoire, mais c’est à charge de revanche, non ? Elle envoie un sourire d’excuse à la jeune femme avec laquelle elle avait trinqué à distance, qui lui répond par un haussement d’épaules et un clin d’œil. C’est la vie, non ?

[1995] Toujours plongée dans les études, c’est sur le chemin d’un doctorat qu’elle se dirige pour qu’arriver trente, elle puisse officiellement reprendre le poste de professeure et conférencière à l’université. Elle en est encore loin et on ne met pas la charrue avant les bœufs, dit-on, il n’empêche qu’elle est impatiente, Raffaella. Il y également un nouveau drame la touchant, le décès de son beau-frère et s’il est important pour elle d’obtenir ce qu’elle veut, la famille, ça a une place bien au-dessus. Alors, elle est présente comme elle le peut pour Benjamin et les parents de ses derniers. Touchée par un chagrin qui fait écho à celui, plus vieux, auquel elle ne s’est jamais vraiment remise. Sur une note plus charmante, elle se souvient encore parfaitement quand Benjamin l’a demandé en mariage et la cérémonie en question se déroule à merveille. Elle plus qu’émue que ses grand-parents aient accepté de prendre l’avion pour y assister tout comme elle l’est encore plus qu’ils l’accompagnent tous les deux, quand elle remonte l’allée. Elle se fiche bien de savoir combien ça va à l’encontre de la tradition. Ses deux grands-mères sont les meilleures et elle n’est pas certaine, qui des quatre, à le plus la larme à l’œil. Tout ce qu’elle est reconnaissante de les voir ici, elle doit reconnaître être intimidée par l’événement et ça n’a rien à voir avec le principal concerné qui la regarde comme si elle est la plus importante personne du moment.

[1997] La vie la prend par surprise quand elle apprend être enceinte. Elle a beau avoir la tête dans les bouquins, elle a très vite suspecté la chose, merci bien. Elle a été stupide de penser que Benjamin ne réagirait autrement que bien et si la grossesse se déroule bien – elle doit ralentir sur ses recherches, détail un peu frustrant, mais elle s’y fait rapidement – l’accouchement se déroule bien à l’hôpital et c’est beaucoup moins dramatique que sa naissance à elle, mais c’est en sûreté et ça compte beaucoup plus que prendre sa première bouffée d’air à l’opéra. Si on lui demande si ça a été le plus beau jour de sa vie, elle vous rira au nez, en clamant haut et fort que non. Que bordel de merde, ça fait mal. Et qu’une fois sera bien suffisamment. Tenir son bébé contre elle pour la première fois, en revanche, ça l’est. Une seule fois, disait-elle. S’il ne fallait pas être deux, elle blâmerait Ben. C’est une discussion importante et elle est surprise par combien la grossesse l’épuise énormément. Quant à la naissance, elle se fait bien plus tôt que prévu et au moins sa fille aura-t-elle le mérite d’avoir un abonnement gratuit pour le métro jusqu’à sa majorité. Moins de panache, beaucoup plus pratique. À croire que les femmes dans la famille doivent naître dramatiquement. Ça lui prend du temps, de s’en remettre. En plus de s’occuper de deux enfants, mais Benjamin est un ange, certes pas toujours, ces enfants n’auraient jamais vu le jour, autrement. Quand elle est bien remise sur pieds, elle peut recommencer à étudier. Devinez quels types d’histoire elle raconte aux enfants ?

[2006] Enfin, elle est une assistante conférencière à l’université. Ah, combien elle se rit des mauvaises langues qui sifflaient dans son dos qu’elle devait abandonner. Qu’elle n’avait pas sa place ici, maintenant qu’elle était mère. « Et les enfants, alors, qui s’en occupe ? » Elle n’a pas terminé de les entendre, ses vipères « Tu sais que mon mari n’est pas là que pour faire jolie quand on va au restaurant ? » Mais elle s’en fiche bien, son but, elle l' atteint et elle découvre toujours plus l’Histoire. Elle voyage aussi un peu moins, mais dans la vie, il faut faire des compromis.

[2012] Conférencière, enfin, c’est une de ses plus grandes victoires personnelles. Est-ce qu’elle a dû parfois emmener ses enfants avec elle ? Tout à fait. Est-ce que ça a fait jaser ? Oh, mais tellement. Elle espère que de là où ils sont, ses parents sont fiers d’elle. Elle sent aussi la distance qui s’installe avec Gilles l’ayant recruté au sein du conclave. En même temps, elle n’a jamais caché l’importance de la famille pour elle, alors elle est contactée de plus en plus rarement à mesure que les années passent, mais son expertise reste respectée. Un e-mail, un appel, elle est là, Raffaella.

[2021] Ses enfants sont bien grands, maintenant. Plus grand qu’elle, déjà, un scandale, vraiment. Elle est sur le point de devenir grand-mère et c’est une sensation particulièrement étrange d’être témoin de son bébé passé par là où elle est passée. Ça l’a attristé, aussi. Inconsolable, un soir, quand elle a réalisé tout ce qui a été volé à ses parents. Il y a aussi cette petite, déterminée à faire ses preuves et elle en veut à Gilles et cette habitude qu’il semble avoir à recruter les jeunes femmes dans cette organisation. Alors elle garde un œil sur elle, autant qu’elle le peut.