Thunder - ft Odin

ça lui parait quand même assez improbable. Ce genre de truc. Faire ami ami avec le gonze de la frangine ; ouais y’a rien d’exceptionnel à ça, surtout quand la sis’ est mariée avec le même gadjo depuis une plombe - mais ça d’vient un peu plus délicat quand il s’trouve que le frère en question a littéralement tué l’époux en question. Une fois. Il compte plus les fois où il a crevé le ciboulot de Al pourtant. Et vice versa d’ailleurs. Mais là, c’était pas très poli faut dire - il savait pas lui, qu’il allait revenir en fanfaronnant comme un paon, au bras de la soeur qui plus est. C’est le genre de chose qui picote un peu aux repas d’famille, c’est clair. Pas très jojo comme présentation de rigueur ; Hey tu t’souviens le jour où j’t’ai envoyé nourrir la poiscaille? qu’est ce qu’on s’marrait - passe moi l’sel - pas sûr que l’humour douteux ait matché avec ses souvenirs du fond de la rade. Mais si les débuts étaient fastidieux, il se tient à carreaux, Caïn, maintenant. Sans franchement avoir une affection particulière pour le type - rien de perso là dedans, c’est juste lui qu’ets pas trop friand des relation sociales et de copinage - c’est son respect et l’assurance qu’il prend soin de Avery qui prime sur les petites erreurs de parcours qu’il a foutu sur leur route. Nul n’est parfait hein. Pis lui encore moins que les autres. A ça, Odin en est probablement pleinement conscient.

C’est vrai que parfois, il a l’impression d’être cette saleté d’écharde dans le pied de sa sœur. Le truc qui l’empêche d’avancer pleinement, qui la retarde, qui lui cause des soucis. Alors des fois, il fait profil bas, se contente de traverser son quotidien un peu comme le ferait un fantôme errant qu’a rien à foutre au milieu d’autant d’lumière; La sienne. Celle de Nevada aussi. Parce qu’il y pense tout le temps à cette tête blonde. La rondeur de ses lèvres, le parfum de lys qu’elle dégage, les dorures de ses boucles, la profondeur du bleu de ses yeux. De quoi écorcher la carne animale de la bête qu’il est - mais de quoi lui rappeler aussi la douloureuse différence entre eux. Il est pas du bon côté d’la ligne. Enfin pas du bon côté de la leur. Et même si Avery, tout comme Nevada, ne tergiversent plus à le faire changer, il sait bien que ses humeurs sanguinolentes finiront par éclabousser leur aura et maculer leur halo de pourpre. Et l’truc qui le chiffonne, c’est qu’il tient bien trop à leur trogne pour se les voir arracher dans la violence et dans l'hémoglobine.

Caïn n’est pas quelqu’un de bien. C’est une vérité dont il ne s’affecte pas. D’une part parce qu’il contribue avec véhémence à servir d’intermédiaire à l’humanité à se tirer dans les pattes eux-même et d’autre part, parce qu’il prend plaisir à voir ces pauvres âmes mortelles se disloquer dans leur propre mal. Parce que quoi qu’on dise de lui, Caïn, il démord pas que le seul problème de cette foutue planète réside en leur occupant ; y’a que ces sales créatures pour inventer une entité suprême pour lequel tuer en son nom et détrôner selon leur bons désirs, y’a que ces choses hideuses pour cracher du flouze dans les moyens de s’entretuer plutôt que celui d’s’aider, y’a que ces pourritures humaines pour détruire les seules belles choses qu’elles savent produire. Et ça le dégoute jusque dans sa chair à Caïn. ça lui fout la gerbe, se remue dans l’gosier. ça le débecte suffisamment pour qu’il ne culpabilise même plus plonger ses mains dans leur chaos. Il bronche plus devant Nevada et Avery sur les enfants de prométhées mais ne comprend pas qu’on puisse autant se plier en 4 pour une race vivante aussi désespérément dégueulasse.

Mais peu importe. Il fait bonne figure Caïn. Il s’est même taillé la barbe et a passé un tee shirt propre. Pourtant, ça f’sait quelques jours déjà qu’il avait pas foutu le museau dehors, à traîner dans la poussière de sa garçonnière, à tirer des lates sur son joint et à s’enfiler bouteilles de whisky sur bouteilles de vodka histoire de se déglinguer l'oesophage en même temps que les idées - puisque même une putain d’balle n’est pas foutu d’faire son job le concernant. Jouer au cadavre putride, ça lui arrive de temps à autre, quand il est trop claqué pour assumer la rotation du monde.  En vérité, il sait pas trop ce qu’il fout là. Ni même pourquoi Odin l’a invité. C’pas son bff. D’ailleurs, il a toujours pensé qu’il pouvait pas saquer sa tronche de sale cabot - ce qui est probablement le cas d’ailleurs - alors… Il se demande sincèrement ce qui le pousse à lui montrer patte blanche - non pas qu’il s’en plaigne, Avery a beau essayer de pas prendre parti, il sait bien qu’ça la toucherait qu’il y ai une bonne entente. A moins que… Y’est anguille sous roche. Caïn fouille dans sa tête ; aux dernières nouvelles, il a pas causé la mort de Ada ( ça, même lui il se serait foutu une putain de tête au carré auquel cas), n’a pas touché à un autre membre de leur consté, ne s’est pas attrapé avec Avery. Ouais il s’fout dans un sale mood mais ça, ça le concerne lui, ni sa sista, ni Odin.  

Lorsqu’il frappe à la porte, et qu’il se retrouve devant son beau frère, c’est la gueule un peu enfariné qu’il tente un sourire - à peine narquois. Aussi loin qu’il se souvienne, il ne s’est jamais retrouvé seul avec ce dernier.  “ Salut l’beauf. J’me ramène pas les mains vides. ” qu’il éraille de sa voix en lui tendant une bouteille de whisky et de rentrer naturellement dans la demeure avant de se poser - de facto - sur le canapé du salon. “ Tu vas m’annoncer que t’as mit ma soeur en cloque?” qu’il taquine - non par malveillance - dans une oeillade à mi chemin entre curiosité et appréhension.