Lucian - How to cure a ghost

[circa 1780] Naissance d’un nouveau-né sur l’île de Maui, au milieu de l’Océan Pacifique.  Il pourrait être comme tous les autres, mais le sort en décide autrement. Il devient vite évidant que son père biologique doit être un de ces drôles d’énergumènes qui accostent l’île sur leur gros bateau à voiles depuis quelques temps. Que nenni, il sera adopté et reconnu par l’époux de sa mère, devenant l’un de ces gamins poʻolua [1780-1810] une vie somme toute banale, régie par le code kapu en vigueur, il entre en apprentissage très tôt au côté de son grand-père. Comme le veut la tradition de l’île Maui, ils construisent les pirogues qui servent à se déplacer dans l’archipel [1800-1819] Marin émérite comme beaucoup d'hawaïens, il est une recrue de choix dans toutes sortes d'expédition, qu'elles soient commerciales ou missionnaires. Il sillonne les mers, revient à ses îles, repart, découvre de nouvelles cultures. Il apprend l'anglais de manière courante ainsi que les rudiements de diverses langues parlées par les équipages multiculturels [1810-1819] En parallèle, il s'engage auprès de missionnaires du Connecticut, entrainant de toujours plus nombreux voyages vers l'Amérique du Nord. Il fait partie des 43 amérindiens et des 20 hawaïens a qui l’ont a enseigné l’évangile et il a participé à sa traduction en hawaïen, faisant parti des initiateurs de la langue écrite hawaïenne. [fin 1819] Un soir à New Heaven, il prend place sur l’un des navires de l’American Board of Commissioners for Foreign Missions, qui doit le ramener à Hawaï [1820] Les conditions de navigation de l’époque ne sont guère enviables, et peu avant d’arriver sur son île natale il contracte le typhus. La maladie se déclarera quelques jours plus tard, alors qu’il a enfin retrouvé le doux sable de son île natale [15 mai 1820] Il s’éteint très rapidement, terrassé par la fièvre, géant de papier maché ; quelle n’est pas leur surprise lorsqu’il finit par se relever quelques heures plus tard après avoir expirer son dernier souffle [1820] les kahuna nui savent. Ils n’ont jamais vu le phénomène de leur vivant, mais la transmission orale s’est perpétuée. Alors ils lui expliquent ce qu’ils croient connaitre mais faute d’explication bien poussée, ils le poussent dans le prochain bateau qui passe par l’île avec la mission de trouver sa constellation [1820] après une éprouvante traversée maritime, ses sens exacerbés par sa toute nouvelle immortalité ne sont pas vraiment en adéquation avec la vie d’un matelot au début du dix-neuvième siècle, le voilà qui découvre l’Europe, il ne passe pas vraiment inaperçu mais surprend par son anglais impeccable et ses manières apprises dans le Connecticut. Il arrive à retrouver la fameuse constellation et obtient les informations manquantes. [1820-1830] si les anciens lui avaient parlé d’une connexion avec d’autres personnes, ils n’avaient pas mentionné d’âme sœur. Alors ça lui tombe dessus et du haut de ses quarante ans, il n’attendait certainement plus un coup de foudre. Il se laisse faire et faire preuve d’une sacrée patience pour courtiser Rosalyn. Dix ans après sa demande en mariage il finit par obtenir une réponse, un petit sourire goguenard qui s’étale sur son visage, à quoi bon luttait contre le destin ? [1830-1845] Lune de miel longue et idyllique sous les tropiques, il veut lui faire découvrir ses îles et sa culture, alors ils s’installent sur l’île d’Hawaï pendant quinze ans, c’est doux mais il apprendra vite qu’elle ne tient pas en place bien longtemps et ils finissent par repartir [1845 - 1888] il vagabonde à la suite de Rosalyn, jamais bien loin tel une procession maritale se repaissant des réactions interloquées qu’ils suscitent dans leur sillage [1888 - 1901] il n’y a qu’un heureux évènement pour le convaincre de s’installer sous la bruine londonienne, et la petite Vivianne le convertit au sédentarisme pour une dizaine d’année, il savoure et la bouille enfantine arrive même à lui faire oublier que l’humidité froide s’infiltre jusque dans ses os [22 janvier 1901] on l’a mis en garde, l’immortalité ne sied guerre à ceux qui s’attachent aux vivants, mais il ne les a pas écouté. Alors quand Vivianne leur ai arraché il s’imagine ne pas pouvoir tomber plus bas, mais la vie réserve bien des surprises [1901-1941] un lit vide tous les matins, les draps froids qui le hante, sa femme n’a pas supporté le deuil elle s’est évaporée et il a beau la chercher, il ne la trouve pas. L’abandon pèse autant que le deuil sur lui, et à bout de patience il finit par se réfugier sur ses îles natales avec le vain espoir qu’elle saura où venir le trouver le jour où elle sortira de son silence [7 décembre 1941] au petit matin, le monde tremble et l’air se remplit de feu. L’attaque de Pearl Harbor précipite l’île dans l’horreur et Lucian vit sa seconde mort. Enrôlé dans la marine de guerre depuis quelques années, l’ingénieur en construction navale croit son heure venir définitivement, mais il finit par ressusciter pleinement, avec la bonne surprise de voir un fantôme surgir de nulle part, Rosalyn revient vers lui [1942-1945] Il est mobilisé pendant la deuxième guerre mondiale, au bord de la Navy et plus particulièrement au bord des sous-marins. Le 28 janvier 1944, l’USS Greyback quitte Pearl Harbor pour s’enfoncer en mer de Chine avec Lucian à son bord. Après plusieurs missions couronnées de succès, le sous-marin est torpillé au large d’Okinawa le 27 février. Lucian vit sa troisième et dernière mort à ce jour. Il serait bien incapable de vous dire laquelle fut la plus éprouvante, mais assurément le voyage retour de celle-ci fut difficile. [1945] Paix retrouvée, foyer réuni, berceau définitivement vide, ils recollent tant bien que mal les morceaux, mais assurément la confiance est ébranlée par la disparition, Lucian essaie de faire taire sa rancœur [1945 - 2021] il suit sporadiquement les déplacements de sa belle, fidèle berger allemand qui pourtant n’arrive plus à la tirer bien haut, il sent qu’elle s’échappe ; lorsque cela devient trop difficile ils s’éloignent en espérant mieux se retrouver, mais il appréhende qu’un jour la corde ne casse