each horizon is a new beginning (alaric)

[Homme du Monde] Né à Trèves à une époque particulièrement instable et complexe, tant à comprendre aujourd’hui qu’à vivre jadis, il est bien difficile pour Alaric de se considérer avec précision de tel ou tel peuple. Ses ancêtres sont d’un côté des barbares de Germanie, les Francs, affiliés à la culture romaine mourante ; de l’autre ce sont d’anciens celte de la Gaule chevelue et des romains issus d’un âge or brillant mais évaporé. Quand on lui demande d’où il vient, il ne peut répondre avec certitude. Doit-il aujourd’hui se présenter comme Français, Allemand ou vaguement Italien ? Les frontières n’ont pas d’importance à ses yeux, et au fond de lui, il se voit en homme du monde, le résultat d’un grand brassage européen qui a pu voir et vivre dans tellement de nations différentes que ces questions n’ont franchement aucun réel sens. La neutralité de la Suisse lui convient d’autant mieux – et pourtant les helvètes de son temps étaient réputés casse-pieds.

[Enfant de la Guerre] Il a une carcasse qui impressionne, le barbare civilisé de Rhénanie. C’est ce que disaient les Latins en étant rassurés que des grands gaillards de son genre soient de leur côté et pas de celui des envahisseurs. Élevé pour combattre et commander, pour mener une existence rude et difficile, son père était un militaire proche du comte de Trèves qui à contrecœur le dirigea très tôt vers les chemins escarpés de la guerre. Défendre sa famille, sa ville, sa région ; défendre son honneur et sa vie malgré les défaites. Défendre les intérêts de leur peuple, leur mode de vie. Voilà ce qu’on lui avait si vaillamment inculqué et qui a pu le guider pendant de très longues décennies, même après sa première mort. Si bien qu’Alaric n’a connu que majoritairement la terre gorgée de sang des champs de bataille, les odeurs âcres des campements et les rations fades et souvent maigres des campagnes ; le cuir rêche et craquelé des équipements, l’acier piqué à aiguiser et les plates à polir ; la chaleur étouffante sous le soleil de plomb, les brumes à l’humidité transperçant les mailles dans les matinées d’attente, la respiration courte des destriers et les clameurs des chants des guerriers avant leur agonie. Sans oublier une compagne meurtrière dont il pouvait sentir le souffle glacial dans sa nuque à tout instant, capable de venir le faucher d’un claquement de doigts. Il a toujours combattu, Alaric, parce qu’il a toujours trouvé quelqu’un à combattre. D’abord au nom d’une cause, d’un idéal, ou pour de bonnes raisons. Et puis, peu à peu, il s’est rendu compte qu’aucune raison ne justifiait réellement qu’on abatte des populations ou qu’on brûle des villes entières, en dehors de la soif de pouvoir et de sang. Il a cessé de se bercer d’illusions pour simplement prendre conscience qu’il avait ça en lui, cet appel à consumer son âme dans la destruction, ce battement du myocarde impitoyable résonnant à ses oreilles au moment de voler des vies, cet appétit aussi vorace que chaotique pour répandre la violence. Un doux appel pour se sentir vivant.

[Chaotic neutral V Neutral evil] Il avance sur la corde raide de sa propre psyché, bercé au-dessus du gouffre de sa conscience hantée par des spectres. Il a été quelqu’un de bien, à n’en pas douter ; tout du moins les idéaux qui le guidaient le rendaient ainsi aux yeux des autres. L’honneur, la justice, la loyauté, la défense des faibles, la liberté, faire triompher le bien… Un beau ramassis d’âneries et des fausses excuses pour maintenir l’illusion. La vérité, elle est moche et cruelle ; la vérité c’est qu’Alaric n’a toujours agi que pour lui-même, pour le gain personnel, pour la vengeance, pour ses ambitions et surtout parce qu’il aimait ça. C’est un individualiste autant qu’un opportuniste, un vautour qui n’hésite pas à mettre à profit les malheurs d’autrui pour sa propre satisfaction, si cela peut lui permettre d’obtenir ce qu’il convoite. Désenchanté et désabusé, il y a quelque chose de chaotique en lui, instable et tempétueux. Il cherche la paix jusqu’à en paraître grognon, mais ne la trouve qu’en s’épanouissant dans la bagarre. Esprit libre et volage qui s’ennuie vite, Alaric est surtout un être fermement agrippé à son indépendance, aussi imprévisible qu’il peut être impitoyable. « Chacun pour sa gueule » ou « J’en ai rien à foutre », c’est sûrement un peu son crédo ; pourtant ça ne le dérange pas de donner un coup de main en échange de quelque chose, c’est l’exception qu’il accorde à sa famille d’éternité, si on accepte son cynisme débordant d’humour caustique. Le bien et le mal sont des notions dépassées et inexistantes à ses yeux : le monde est une vaste blague pétrie de mensonges, de demi-vérités et d’espoirs déçus. Autant accepter sa nature… et la sienne est bigarrée, forgée par l’absence notoire de morale et souvent même de scrupules, par un individualisme qui s’affranchit très aisément des lois ou de toute entrave qui pourrait un jour lui desservir. Rendu insensible à beaucoup de situations et pire, à la culpabilité, par la force des choses, il peut passer pour aigri voire nihiliste, cruel à sa façon, vibrant pour la violence. Ceux qui le hantent, ce ne sont pas ceux qu’il a occis, mais ceux qu’il a aimés sans pouvoir les sauver. Malfaisant ou malveillant, certainement pas : pourquoi faire ? Il se contente simplement de vivre de la façon dont il a envie et tant qu’on ne vient pas lui chier dans les bottes, tout se passe très bien. Mais visiblement, il doit avoir une tête qu’on doit aimer emmerder, surtout dans les bars, et sa réponse aux provocations est rapide et sans appel. Une loi du Talion qu’il a souvent du mal à doser, d’ailleurs, pourtant ce ne sont même pas des coups de colère, qu’il a plutôt glaciale en réalité : sous ses sourires torves et insolents se cachent la rancune facile et un appétit malsain pour les vengeances froides. Il a été un type bien, Alaric, mais c’était il y a longtemps et cela n’a jamais été une fin en soi. Il tangue au-dessus des abysses d’une obscurité qui le poursuit depuis l’éternité mais vers laquelle il n’a jamais sombré totalement parce qu’elle ne lui apporterait rien, et ne changerait rien au passé.

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