intrigue en cours Entre les Enfants de Prométhée et l'Ordre de l'Hydre, la guerre semble à présent inévitable. Les uns comme les autres se préparent à l'affrontement. De son côté, le Conclave Écarlate peine à se faire à l'absence des Fawkes et au nouveau leadership des Ackerman. À moins que les laboratoires d'Amaranth Pharmaceuticals ne fassent de grandes découvertes dans peu de temps, ou que le Conclave ne mette la main sur un immortel, il se pourrait bien que ces tensions coûtent cher à l'organisation... Et après être longtemps resté dans l'ombre, un vieil ennemi s'apprête à refaire surface.
nous soutenir



pub rpg design
Nous manquons de mortels et de membres de l'Ordre de l'Hydre !
✷ Avant de créer votre constellation, n'oubliez pas de jeter un coup d’œil aux scénarios et aux pré-liens du forum !
✷ Pour vous faire une idée des personnages et des statistiques du forum, c'est par ici.
-29%
Le deal à ne pas rater :
PC portable – MEDION 15,6″ FHD Intel i7 – 16 Go / 512Go (CDAV : ...
499.99 € 699.99 €
Voir le deal

 

 butterflies & hurricanes (salim)

Aller en bas 
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) butterflies & hurricanes (salim)    Dim 3 Jan - 22:03


Les visiteurs affluaient dans son champ de vision, à la manière de mille fourmis s’empressant de rejoindre leur destination, tandis que le brouhaha des conversations, pleines de banalités sans fin, bourdonnait dans ses oreilles. Assis sur l’un des bancs demeurant au cœur de la fameuse pyramide de verre, Lazarus Fawkes parcourait du regard les nombreuses options que lui proposait le dépliant que la dame à l’entrée qui lui avait remis. Ce n’était certes pas la première fois qu’il posait le pied dans le célèbre musée, et pourtant il avait l’impression de n’y être jamais venu tant les titres et descriptions des différentes expositions, tant permanentes que temporaires, titillaient sa curiosité tout intellectuelle. Il se faisait justement la réflexion que cent vies passées sur cette Terre ne suffiraient pas pour disséquer le Louvre jusque dans ses moindres recoins. Aussitôt, son visage s’assombrit. Quoi qu’il fasse, où qu’il aille, il lui semblait que la menace des immortels — des erreurs de la nature qu’il devait, en tant que serviteur de Dieu, annihiler jusqu’au dernier — le  suivait pour mieux le tarauder, ne fût-ce dans ses pensées. Un rappel de son cuisant échec quelques jours plus tôt, dans le dernier refuge des immortels à en croire les ouï-dire : Saint-Pétersbourg.
Il soupira. Quelle naïveté de sa part, c’en était presque attendrissant. Comment pouvait-il seulement espérer oublier l’existence de ses ennemis quand son propre corps, brisé et mutilé, lui rappelait l’énième désastre que le Conclave avait encaissé quelques jours plus tôt? Il avait souhaité retrouver la trace d’Astra Ackerman dans le candide espoir de la rapatrier à New York auprès de sa famille. Le plan semblait simple, presque un jeu d’enfants. Et pourtant, il n’avait pas prévu que les choses prennent une tournure si dramatique, pas prévu que ces saletés d’immortels aient déjà exercé leur néfaste emprise sur la jeune femme. Cette dernière était maintenant l’une des leurs et, de ce fait, une nouvelle cible pour le Conclave. On ne pouvait pas dire que Lazarus, en tant que vieil ami de la famille Ackerman, n’avait pas tout fait pour l’extirper des griffes du camp ennemi. Il s’était même déplacé en Russie à cette fin.
Hélas, son geste héroïque — il aimait à le considérer ainsi, une façon assez pitoyable de panser son ego — avait failli lui coûter la vie quand Eirik Aaronson, tel un prince charmant sur son cheval blanc, était accouru à la défense de la demoiselle en détresse. Le bras droit du Conclave avait bien cru voir sa dernière heure arriver en se retrouvant face à face avec l’homme qu’il avait examiné sous toutes ses coutures pour le bien de la science et de l’humanité. Enfin, il était vrai que son examen avait pris des airs de torture lorsque son sujet avait refusé de coopérer. Mais Lazarus n’en éprouvait aucun remords. Les immortels n’étaient pas des êtres humains normaux; ils étaient des anomalies créées par il ne savait quel être abject et immoral. Ils ne faisaient pas partie du plan divin et Lazarus, devait-on le répéter, abhorrait tout imprévu, quel qu’il soit. Il le pensait maintenant plus que jamais, même après qu’Eirik et Astra lui aient laissé la vie sauve, non sans quelques ecchymoses par-ci par-là, un coquard à la couleur inquiétante et un bras cassé, figé dans le plâtre pour les prochaines semaines. Un petit cadeau d’adieu, en quelque sorte. Lazarus entendait bien se venger de cet affront, mais pas tout de suite. Il avait quitté dare-dare la Russie pour la France, sa terre d’exil, loin de son Amérique bien-aimée. Au sein de la capitale française, au moins, il ne risquait pas grand-chose; le Conclave siégeait dans les plus hautes instances depuis la Révolution et aucun immortel, s’il tenait à sa peau, ne viendrait s’y risquer. Du moins, pas au grand jour.
Lazarus, toujours le nez dans le dépliant du musée, se décida pour la salle des Antiquités grecques, étrusques et romaines, peut-être parce que c’était celle dont l’entrée se situait à quelques mètres de lui. Il ne s’offrait guère de jours de congé, mais estimait qu’il avait grand besoin de repos après ses récentes péripéties, et quoi de mieux que l’art ancien pour se changer les idées? D’un air hautain malgré ses blessures, il se leva de son banc pour se diriger vers la salle choisie. C’est alors qu’une mère appela son gosse de sept ans peut-être, occupé à chahuter à l’autre bout de la salle. Le petit crétin courut vers elle à en perdre haleine et manqua de renverser le professeur de sciences politiques sur son chemin. Sonné, Lazarus vacilla en agitant les mains comme des moulinets, sans grâce aucune. Une scène sans doute cocasse d’un point de vue extérieur. Par chance, il parvint à retrouver son équilibre, le cœur cognant dans sa poitrine. Le sale mioche ne s’était même pas excusé; pire encore, il ne s’était même pas arrêté. Son orgueil froissé, le quadragénaire tenta de reprendre contenance en jetant un œil au dépliant du musée avant de réaliser qu’il l’avait échappé pendant son accrochage avec le gamin. Il le repéra à quelques pas de lui, sur le sol tellement bien astiqué qu’il en brillait presque, et un type semblait sur le point de le ramasser. « Excusez-moi, monsieur, mais ceci m’appartient, » intervint Lazarus d’un ton péremptoire. Ce n’est qu’en s’approchant de l’individu qu’il crut le reconnaître. « Vous… » Ce faciès de Mère Teresa, il ne l’avait jamais oublié. Comment l’aurait-il pu?
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Lun 4 Jan - 14:45

Depuis leurs créations, Salim est un amoureux des musées. De leur calme, leur grâce, leur solennité. Il s'y retrouve, et se rappelle même avoir participé indirectement à l'élaboration de certains d'entre eux. Mais son véritable plaisir à les arpenter restera de voir l'émerveillement des plus jeunes âmes dans la contemplation d'œuvres majeures, connues ou moins connues. Elle est là, la vraie magie. La communion des générations, des lieux et des gens, de toutes horizons.

Cette journée ne déroge pas à la règle. Le Louvres est bondé, son parquet craque de mille pas, ses salles résonnent de voix murmurées, admiratives, époustouflées.  Au cœur d'une d'entre elles dévouée aux décorations grecques, romaines et étrusques, l’israélien se sent accueilli. Dans les vitrines protectrices, Salim aperçoit son reflet, calqué sur les poteries anciennes. Toutes plus vieilles que lui, toutes témoignant d'un âge que d'autres ont eu la chance de voir. Salim est encore un enfant, aux yeux des Immortels antiques, et ce malgré son âge avancé. Il se sait admiratif des plus vieux d'entre eux, de celles et ceux remontant d'aussi loin que les légendes les ont vus naître. En venant se ressourcer devant ces témoignages d'un autre temps, il se sent plus proche de ce que ces êtres antédiluviens ont pu connaître, ne serait-ce que par fragment d'esprit, encore enchevêtré dans un vase ou une peinture retrouvé.

Presque religieusement, il se recueille en silence devant ces marques du passé, quand soudain près de lui, du grabuge bien présent. Un petit garçon court et crie pour rejoindre sa mère, manquant de renverser un homme sur son passage. Dans son manque d'équilibre, son prospectus s'envole, flotte jusqu'aux pieds de l'octo-centenaire. Ce n'est pas le dépliant qui retient son regard surpris, mais bel et bien la silhouette l'ayant lâché. Car drapé dans ses traits marqués, sa blessure et son manteau épais, Salim a bien failli ne pas le reconnaître. Mais la providence est une facette du destin. Et il faut croire que pour eux, pour cette instant précis, elle avait choisi de faire de Salim son agent privilégié.

Sa sérénité vacille un peu. Son cœur se soulève légèrement. Sa mâchoire se tend. Et faisant mine de rien, il s'apprête à ramasser le papier glacé, quand son propriétaire l’interpelle. Et qui comprend, lui aussi, que ce n'est pas la première fois que leurs regards se croisent.

En un fragment de seconde, de silence saupoudré d'incertitude cinglante, Salim retrouve toutes les sensations de ce 11 Septembre 2001. La peur, de sang et d'acier. Les vices et les immondices. Les quelques fragilité de sa propre foi, mise à mal par un désespoir en forme d'avions, fracassant deux tours. Cet homme, et lui, étaient là.
Salim y est mort, pour la énième fois.
Son Souffle est revenu le cueillir, ce qui ne fût pas le cas de tous. De toutes ses forces, il a préservé quelques vies, ses compétences de médecin face à la détresse ambiante.

La sienne, entre ses mains ce jour-là. Celle de Lazarus Fawkes.

Quelle tristesse, quelle infortune. Quelle ironie, quand il y pense.

Cet ennemi d'aujourd'hui qui priait pour un allié, autrefois...

« … En effet, tenez. » L'instant rompu, mais le regard toujours soutenu, Salim rend son bien au mortel, jouant la carte de l'indifférence pendant une poignée de minutes. Il tourne la tête vers le garçonnet babillant joyeusement, en train de mordre à pleine dent dans son goûter. Un sourire simple vient flotter sur ses lèvres. « Les enfants débordent d'énergie, n'est-ce pas ? De vraies tornades, surtout dans les endroits où il vaut mieux rester calmes. » Puis, l'instant se détourne à nouveau vers Lazarus. Le visage de Salim demeure avenant, bien que ses yeux soient lourds d'un tout autre sens : celui d'une mélancolie pleine de chagrin. Le Conclave a blessé bien trop des siens. Il s'en est pris à son allié de toujours, son frère d'arme. Et plus que jamais, ses proches sont en danger. Alors pourquoi ressentir un tel dépit ? Pourquoi ne pas se montrer sans pitié ?
Sans doute est-il déjà trop tard pour abandonner sa noblesse de cœur. Il l'a enterrée sous le sable, avec sa vie d'antan.
« … Je constate que vous avez l'air un peu plus en forme que lors de notre première rencontre. En dépit de votre plâtre, j'entends. »

Peut-être qu'une seule décision de sa part, ce jour de 2001, peut-être aurait-elle suffit pour épargner un nombre incalculables de souffrances inutiles. Il ne le saura jamais. Mais son regret demeurera. Ambigu et stérile.
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Mer 6 Jan - 2:59


L’ahurissement peint sur le visage, le quadragénaire demeura immobile un instant, face à ce fantôme de son passé revenu le hanter au moment où il s’y attendait le moins, juste après sa défaite sur le sol pétersbourgeois. Par quelle facétie du destin se recroisaient-ils aujourd’hui? À moins que les mains capricieuses du hasard n’aient point manipulé cette rencontre? Lazarus se força à conserver une façade impassible, mais la pointe d’inquiétude, voire de paranoïa, qui germait dans son cerveau le déstabilisait. Il n’oublierait pas de sitôt la haine dans les yeux d’Astra et d’Eirik. Auraient-ils envoyé l’un des leurs à sa poursuite pour achever leur sale besogne? Ça lui semblait tiré par les cheveux, mais comment expliquer autrement la soudaine présence de son sauveur à ses côtés? Et d’ailleurs, que fabriquait-il à Paris, ville entièrement gangrenée par les tentacules écarlates du Conclave? Aspirait-il à souffrir pour tromper son ennui?
Lazarus le dévisagea sans piper mot avant de tendre la main et de récupérer le document. « Merci, » murmura-t-il d’une voix blanche. Il ne quittait pas l’autre homme du regard. Non. Pas un homme. Un immortel. Aucun doute à y avoir à ce chapitre. La jeune femme l’ayant abordée quelques années plus tôt lui avait fourni une description si détaillée de l’homme l’ayant protégée de la pluie de balles que l’évidence s’imposait d’elle-même : il s’agissait du même homme qui avait arraché la carcasse à moitié inerte de Lazarus des décombres. Les dates concordaient; les pièces du puzzle s’emboîtaient. Salim. C’était le prénom qu’il lui avait donné à l’époque. Il n’avait pu se résoudre à l’oublier, peut-être par sentimentalisme. Une vague de dégoût monta en lui à cette sotte hypothèse. Lazarus Fawkes détestait toute effusion sentimentale. Alors pourquoi, Seigneur Dieu, ne s’empressait-il pas d’appeler les agents présents dans la Ville lumière pour capturer cet immortel? Pourquoi s’entêtaient-ils tous deux, d’un implicite et mutuel accord, à jouer cette comédie de boulevard? Pourquoi?
Il arqua un sourcil aux paroles de Salim, lesquelles semblaient dissimuler une menace. De vraies tornades, surtout dans les endroits où il vaut mieux rester calmes. Sous-entendait-il que Lazarus aurait dû trouver refuge et s’y tapir plutôt que de sortir en plein jour? Quid de Salim lui-même, un immortel se baladant dans les rues de Paris? Il se massa le front de sa main valide. Il se faisait des idées et la faute en revenait à sa fatigue des derniers jours. Il devait se reprendre. Au plus vite. « Je suppose que vous avez raison. » Une réponse neutre, qui mettait fin à cette conversation des plus embarrassantes. Hélas, il se fourrait le doigt dans l’œil jusqu’à l’omoplate : l’autre s’enquit soudain de sa santé, comme s’ils étaient de vieux amis s’étant perdus de vue au fil des années. Grotesque comparaison. Lazarus n’avait pas d’amis, seulement une poignée de personnes avec lesquelles il s’entendait bien. Rien de plus. D’ailleurs, il ne parvenait pas à imaginer qu’on puisse prendre de ses nouvelles par pur altruisme. Ça n’existait que dans les contes de fée, l’altruisme. « Oui, j’ai récemment eu un… accident. » Gracieuseté d’un de vos camarades, si je ne m’abuse. « Mais pour autant que je sache, cela ne vous regarde pas. » Aussitôt les mots sortis de sa bouche, il les regretta. Était-il réellement sage de rabrouer la seule personne au monde, peut-être, à se soucier de lui? Même sa propre femme, à son retour d’Europe, ne prendrait pas la peine de le questionner sur ses blessures. Car outre son bras fracturé, il arborait un œil au beurre noir qui refusait de s’estomper. Il supposait qu’un peu de maquillage suffirait à atténuer la tache noire qui selon la lumière de la pièce tirait lentement vers le violet ou le vert, mais il demeurait ignare dans ce domaine et se contentait d’encaisser les regards de pitié sans broncher.
Il soupira, détourna le regard. Il regrettait sa grossièreté, mais plutôt que de s’excuser, changea de sujet. Contrairement à Salim, il n’entendait pas faire tabula rasa sur leurs allégeances respectives. « Vous êtes cinglé de vous montrer ici, à la vue de tous, encore plus de m’adresser la parole. Vous êtes conscient qu’il me suffirait de passer un appel pour que vous vous retrouviez en moins d’une heure dans une cellule froide sans grand espoir d’en ressortir un jour, surtout après qu’Eirik Aaronson soit parvenu à nous glisser entre les doigts? » Il ne plaisantait pas. En quelques minutes, le Conclave Écarlate pouvait mettre la main sur un nouvel immortel et poursuivre par le biais d’Amaranth Pharmaceuticals les recherches hélas esquintées par le vol de l’échantillon d’ADN; il pouvait rattraper le temps perdu et élucider le mystère de l’immortalité pour mieux l’éradiquer ensuite. Tout ce dont il avait besoin, c’était d’un immortel. Un seul. Lazarus enfouit sa main dans la poche de son manteau, effleura des doigts son téléphone. Roula les yeux. « Cessez de me regarder avec cet air de chien battu et partez d’ici. Avant que je ne change d’avis. »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Sam 9 Jan - 18:25

L'acidité des paroles du mortel ne faisait que corroborer sa réputation au sein du peuple de Salim. Les limiers de la mort, les abominations, les erreurs de Dieu, comme ceux du Conclave pouvaient les qualifier dans leurs rares injonctions de politesse. La plupart du temps, les noms d'oiseaux à leur égards défiaient les limites du tolérable, au même titre que leurs actions désespérées pour les anéantir. Salim avait toujours eu conscience de ce problème, de cette épine, de ce malheur aux mille souffrance que représentait cette haine pour les immortels. Mais il nourrissait toujours cet espoir naïf qu'elle finirait par s'estomper, comme il avait pu voir s'étioler des conflits autrefois d'une violence sans nom vers quelque chose de plus doux. Désormais, il n'avait plus la patience de les voir s'épuiser de loin. La tournure devenait bien trop personnelle pour se contenter de prier pour le salut d'âmes perdues.

La colère le guettait. Il souhaitait s'en détourner. Agir, oui. Impulsivement, non.
La douleur n'engendrait rien. Pas plus que les menaces ou la terreur.
Celle que souhaitait instiguer Lazarus Fawkes, si diminué pourtant par ses blessures peinant à cicatriser, peinait à trouver son chemin. Sans doute Salim se sentait-il trop sûr de lui, face à une répétition si vainement hasardeuse de la faiblesse de l'Homme. Une erreur de sa part. Un sentiment d'arrogance qu'il devait aliéner, lui aussi.
Mais l'immortel ne pouvait s'en empêcher.
Elle demeurait plus forte que son instinct de survie. Elle était là, à lui dévorer ce qu'il lui restait de raison.
La pitié.
L'indolente, la terrible pitié.

Il l'écoute. Il l'écoute et se tait, il l'écoute et sourit sans joie. Une peine à fleur de lèvres qu'il finit par entrouvrir, à la fin de son discours. Un soupir bref, couplé à son regard égal, d'une bienveillance malvenue. Il s'en veut. Il s'en veut terriblement. Pour le bien de sa constellation, il devrait ne montrer aucun état d'âme et livrer cet être à qui de droit, profiter de sa constitution en morceaux pour la détruire une bonne fois pour toute.
Mais ce serait contraire à ses principes.
Et le faire participer à leur propre danse macabre.
Il s'y refusait. Dusse-t-il le regretter un jour. Et payer pour ses fautes.

« Merci. » Murmure sincère, posé dans les volutes d'un silence pesant. Un regard glisse vers la poche du manteau. Puis dans les yeux clairs, hagard. « Merci de m'avoir prouvé que je ne m'étais pas trompé. » Un sourire. Flottant dans l'espace entre eux, que Salim élargit de quelques pas en arrière. « En dépit de vos actions, de vos croyances... nous ne sommes pas si différents. J'ose le croire. Vous ne m'auriez pas laisser cette chance, sinon. Tout comme je vais vous accorder la vôtre et oublier que nous nous sommes revus. » Un instant. Plus grave. Pas moins sincère. « Je ne vous pardonnerai jamais ce que vous avez fait à Eirik. Rien ne justifie de tels comportements. Pas même cette peur que vous ressentez face à l'inconnu, qui vous fait prendre les armes pour une cause qui vous aveugle. Cette peur qui vous glace et vous pétrifie à l'idée de perdre contre des ennemis que vous ne comprenez pas. Je la connais. Je l'ai ressenti... et je sais ce qu'elle provoque en vous. »

La nostalgie lui noue la gorge, pour une poignée de souvenirs de lame dans sa peau. Machinalement, une main effleure sa propre épaule, avant de retomber lentement.

« Elle m'a poussé à me battre et y perdre la vie, autrefois... »

Il finit par se tourner, pour s'en aller. Le dos plus droit, bien que lourd de peine. Son ton se fait malgré tout plus léger. Affreusement plus léger.

« Profitez-bien de votre visite, Lazarus. Certaines expositions temporaires valent clairement le coup d'oeil... »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Dim 10 Jan - 0:08


Le temps semblait suspendu entre les deux hommes. Lazarus, avec son bras dans le plâtre et son visage boursouflé par les ecchymoses, venait de prononcer sa sentence sans équivoque aucune : laisser partir l’immortel et du même coup l’occasion en or de damner le pion au camp adverse de la plus ironique des façons. Car si le médecin ne s’était pas avancé vers lui, sans doute Lazarus ne l’aurait-il pas reconnu. Sans doute ne lui aurait-il même pas prêté attention. Il aurait poursuivi sa visite dans l’espoir, naïf peut-être, de délaisser ses tracas, ne serait-ce que pendant quelques heures. Pourtant, la Providence semblait en avoir décidé autrement en le confrontant avec l’un de ses ennemis, comme si cette satanée entité souhaitait éprouver sa loyauté envers l’organisation pour laquelle il se dévouait depuis près de vingt ans. Après tout, de tous les immortels foulant cette terre, seul Salim pouvait espérer ressortir libre, vivant et en un seul morceau d’une rencontre avec le bras droit du Conclave Écarlate. Tout simplement parce qu’il lui avait sauvé la mise par le passé, par devoir et par altruisme. Et parce que Lazarus payait toujours ses dettes, quelles qu’elles fussent.
« Ne me remerciez pas, je n’agis pas par bonté de cœur. Croyez-moi. La prochaine fois, si prochaine fois il y a, ne vous attendez pas à la même clémence de ma part. » À ces paroles, un rictus flotta sur ses lèvres. Il était conscient de sa réputation, tant auprès des mortels que des immortels. Acquise à la  sueur de son front, mission après mission. De quoi faire frémir celles et ceux qu’il traquait avec acharnement à chaque jour que Dieu faisait, de même que les plus jeunes recrues, craintives de commettre un impair lors de leurs premières missions sur le terrain. Il savait donc qu’en payant cette dette presque vieille de vingt ans, il entachait sa réputation, celle d’un homme cruel et sans pitié aucune, qui néanmoins ne reflétait pas la vérité exacte. Pour reprendre le terme utilisé par Astra Ackerman quelques jours plus tôt à son endroit, il ne s’était jamais considéré comme un monstre, bien au contraire. Il s’appliquait à éradiquer de la Terre des êtres qui n’avaient d’humain que le nom désormais et qui, surtout, pouvaient se révéler dangereux. Il pensait ici aux nombreuses têtes de l’Hydre, toutes repoussantes les unes que les autres — sans vouloir faire un mauvais jeu de mots. À leurs origines, ils ne représentaient nullement une menace, mais au fil des siècles, ils s’étaient crus dieux et déesses, s’aliénant ainsi tous les mortels de ce monde. Du moins, ceux suffisamment lucides pour voir clair dans leur jeu. Le risque qu’ils représentaient n’était donc pas à prendre à la légère.
Même le médecin, là, en face de lui, était susceptible de se transformer en un être divin autoproclamé à tout moment. Si certains s’étaient noyés dans les eaux narcissiques, pourquoi pas lui? Certes, peut-être n’appartenait-il en réalité à aucune faction, mais peu importait. Électron libre ou non, il s’agissait d’un immortel. Et cela suffisait à Lazarus pour le considérer, malgré son regard doux et pacifique, comme différent de lui. Point final. « Oh, je vous en prie, épargnez-moi votre discours simpliste et larmoyant. Je n’ai peut-être pas vécu 500 ans, mais je ne suis pas non plus un enfant. » Il grimaça, secoua la tête. « Vous ne savez rien sur moi. Rien du tout. Je n’ai que faire de votre pardon ou de votre opinion sur les agissements du Conclave. Tenez-vous-le pour dit. » Il s’exprimait avec tout le mépris qui accompagnait le nom de Lazarus Fawkes, même si l’autre homme le dominait de toute sa taille. Après avoir pris le parti de lui laisser sa liberté, il n’entendait pas lui témoigner le moindre respect, encore moins renier plus encore son allégeance envers le Conclave. Leur discussion semblait vouloir s’achever sur cette note douce-amère quand Lazarus s’avança d’un pas sans crier gare. « Salim, je peux vous poser une question? » Il avait utilisé le prénom de son interlocuteur sans même y réfléchir. Simplement parce que c’était ce prénom qui n’avait cessé de tourner en boucle dans sa tête, depuis le moment fatidique où le médecin au visage bienveillant l’avait entraîné hors des décombres. Il hésita un moment, esquissa un sourire ironique, duquel ne transpirait pourtant aucune raillerie. Juste de la curiosité à l’état pur. « Sachant maintenant qui je suis, vous regrettez de m'avoir sauvé la vie? »
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Lun 11 Jan - 18:32

L'air de la pièce change. Dans les poumons cent fois perforés de Salim, respire une sensation tangible de malaise latent. Il demeure suspendu au fil de la colère sourde du mortel, bafoué dans son honneur et son intégrité, aussi bien physique que morale. Lazarus se débat, avec ses convictions et ses plans à haute échelle, impliquant tant de vies, plus ou moins longues, mais toutes victimes de la folie aveugle. Le Conclave, l'Ordre de l'Hydre, les autres factions opposées... Tout ça ne résulte qu'une vaste et grande incompréhension, cultivée par la peur de la différence. Une peur qui a fait tourner les siècles que Salim a traversé.
Et qui se retrouve ici-même, entre ces murs de musée.

Il ferme les yeux, dos à Lazarus. Ses pas se sont arrêtés, à son appel. Au fond de lui, Salim sait que ça n'en restera pas là. Que de cette rencontre découlera une cascade de conséquences au flot incontrôlable, et qu'il s'en sentira à jamais responsable. Peut-être est-ce là sa mission dans ce conflit sans nom. Peut-être qu'il pourra changer quelque chose... en acceptant de répondre à sa question.

Salim laisse planer un silence nécessaire. Il sait déjà tout de l'idée qu'il souhaite lui transmettre. Encore faudrait-il que Lazarus accepte de l'écouter. Et de la comprendre.
Ses orbes sombres s'ouvrent à nouveau. Sa voix est lente, précise. Sincère. Comme rompue à ce discours depuis des siècles et des siècles. « Toute vie en vaut la peine. Rien ne peut se mesurer au prix d'une existence. » Qu'elle dure une seconde ou un millénaire, une vie reste une vie. Salim finit par se tourner de nouveau vers lui. La distance les séparant redevient plus fine, tandis qu'il marche à nouveau en direction de Lazarus. « Je n'ai pas hésité une seconde à sauver la vôtre, autrefois... Et si l'occasion venait à se représenter, et que j'étais capable d'agir, alors je le referai. Autant de fois que nécessaire. » Une étrange certitude découle de ses mots, tandis qu'il n'est plus qu'à un mètre du plus jeune. Ses yeux chargés du poids de mille passés s'encrent dans les siens, clairs et francs. Des torrents de foudre s'y abattent sans vergogne. Chaque seconde se faisant. « Car si je vous abandonnais à votre triste sort... vous n'auriez alors aucune chance de comprendre l'ampleur de vos erreurs et d'y trouver votre rédemption. Une punition bien pire que la mort, si vous voulez mon avis. »

Une vague ombre de sourire, bien loin de ses élans naturellement chaleureux, vient colorer son visage d'une teinte plus morne. Il est triste. Triste de constater qu'une idée pourtant si évidente, si rayonnante à ses yeux, se fane en pétales flétris dans ceux de son vis-à-vis. La pomme de la discorde est manifestement tombée depuis longtemps entre eux, et Salim peine à décider s'il doit ou non la ramasser.

« Je m'interroge également, Lazarus. Et je n'ai pas qu'une seule question. »

L’israélien est véritablement curieux. Sa voix a pris la tournure d'un ton plus doux, plus amené à converser. Et à révéler ses propres doutes, dans le tissus des paroles liées.

« Regrettez-vous mon geste, maintenant que vous avez compris qui je suis ? Si je n'avais pas été immortel... m'auriez-vous considéré comme votre égal ? »

Au fur et à mesure qu'il verbalises ses pensées, son cœur se serre d'un sentiment d'injustice grandissant. Qu'à-t-il fait, qu'ont-ils fait, pour attiser à ce point ce feu de l'âme ? Il sait bien de ses congénères compliqués à gérer, aux principes bien trop ancrés dans leur routine de pensée. Mais alors... pourquoi en faire une telle généralité ? Pourquoi ne pas donner sa chance, lorsqu'elle se présente ?
Pourquoi l'Homme a-t-il tant besoin de coupables pour détourner les yeux de ses propres maux ?

« … Ai-je vraiment l'air d'une nuisance à vos yeux, ici et maintenant ? »

Bien trop de questions. Et si peu de temps pour y répondre...
Revenir en haut Aller en bas
Invité
avatar
Invité

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)    Mar 12 Jan - 0:34


Il regrettait déjà de l’avoir retenu, ce bougre. Il ne savait pas trop ce qui lui avait pris de lui poser cette question. Par curiosité, bien entendu, mais peut-être aussi par désir de tourmenter son sauveur. De remettre en question son sens de la moralité, exactement comme il l’avait fait auprès d’Astra. Ça ne servait à rien, entendons-nous. Et le temps était une denrée rare pour les hommes occupés et importants comme Lazarus Fawkes, mortel qui plus est. Mais il n’avait pu se retenir. Et voilà qu’il endurait un énième discours de Mère Teresa, comme il se plaisait à surnommer le jeune homme en face de lui — qui n’était en réalité plus très jeune.
Il plissa les yeux, l’incrédulité peinte sur ses traits. Il avait toujours cru, peut-être à force de côtoyer des personnes dont la mentalité avoisinait la sienne toute sa vie (Cordelia en tête), que la véritable bonté n’existait pas en ce monde, qu’il ne s’agissait que d’un conte de fées pour manipuler les plus crédules et maintenir les plus puissants au sommet de la chaîne alimentaire. Pourtant, comment interpréter les paroles du médecin autrement que comme l’expression de l’altruisme le plus pur? Il lui avait donc sauvé la vie non pas par obligation professionnelle, mais par envie de l’aider? Sans rien lui demander en retour? Sans même rien attendre de sa part? Lazarus peinait à le croire. Il se remémora la jeune femme l’ayant abordé quelques années plus tôt au sujet du médecin humanitaire l’ayant protégé des balles. Salim l’aurait-il donc sauvée par altruisme, elle aussi? Comment pouvait-on être à ce point gentil et traverser les âges sans la moindre égratignure? En un seul morceau?
Le regard que Salim posait sur lui se noircit soudain; ses paroles grondèrent dans le brouhaha diffus autour d’eux. Et Lazarus comprit aussitôt de quoi il était ici question. C’était bien pire que de la gentillesse. Il aurait dû s’en douter, à force de jauger ces grands yeux de merlan frit. « Je crois que vous ne comprenez décidément pas. Je n’ai besoin ni de votre avis, ni de votre pitié. » Il cracha presque le dernier mot, comme s’il s’eut agi d’un blasphème particulièrement violent. « Par ailleurs, qu’est-ce qui vous fait croire que je veuille comprendre l’ampleur de mes soi-disant erreurs? À mon sens, la seule erreur que j’aie commise jusqu’ici fut de laisser votre ami Eirik me filer entre les doigts. » Un sourire sinistre souleva la commissure de ses lèvres. « Une erreur que je compte bien réparer un jour, soyez-en sûr. »
C’est alors que l’immortel le prit à son propre jeu, lui retourna sa propre question. Regrettait-il, lui aussi? Il ne le savait pas. L’aurait-il considéré comme son égal? Il ne le savait pas non plus. Peut-être pas. Sans doute pas. Il n’accordait son respect qu’à Cordelia, les autres n’étaient que des pions dont l’utilité variait selon ses besoins, selon ses plans. Et encore, il n’était plus certain que ce soit encore le cas, concernant sa chère et tendre épouse (le sobriquet affectif lui arracha une brève grimace). Il acceptait de rester à ses côtés pour le bien commun — le Conclave Écarlate, quoi d’autre? — mais il ne pouvait nier qu’elle avait considérablement baissé dans son estime. Enfin, cela, l’immortel n’avait pas besoin de le savoir.
Le silence se prolongeait entre les deux hommes. Lazarus n’appréciait guère cette myriade de questions philosophiques, en particulier parce que ce n’était pas lui qui les posait. Salim se tenait près de lui de nouveau, décidé à obtenir réponses à ses questions. Lazarus aurait préféré qu’il garde ses distances; il se sentait vulnérable face à cet être vieux d’il ne savait combien d’années ou de siècles. Comme à sa merci. « Eh bien, j’imagine qu’on ne le saura jamais, n’est-ce pas? Vous êtes un immortel. De ce fait, vous n’êtes pas mon égal. Vous ne le serez jamais. À vrai dire, à mes yeux, vous n’êtes même plus un être humain. » Il s’exprima d’un ton posé, le regard plongé dans celui de l’autre homme. Ce principe gouvernait son existence entière et il n’entendait pas laisser un sale immortel l’ébranler avec de doucereuses paroles. « Si je nage en pleine mer et qu’un requin me frôle sans toutefois m’attaquer, il ne devient pas inoffensif pour autant, comme par magie. Si ce n’était de l’accord que nous venons de passer, je suis sûr que vous m'achèveriez ici et maintenant. Mes hommes se lanceraient aussitôt à votre poursuite, mais j'imagine que vous vous défendriez habilement... J’ai cru comprendre que vous avez participé à certaines guerres? » Il arqua un sourcil, l’intellectuel en lui brièvement intrigué par la perspective de discuter avec une figure du passé. « Mais peut-être qu’en bon samaritain, vous avez décidé de consacrer votre très longue existence à la guérison d’autrui et que vous vous interdisez à présent de tuer qui que ce soit? » La situation devenait irréelle. Il était en train de converser avec son ennemi d’un ton presque amical. Le drapeau blanc claquant au vent pendant un bref moment.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé

butterflies & hurricanes (salim) Empty
(#) Re: butterflies & hurricanes (salim)   

Revenir en haut Aller en bas
 
butterflies & hurricanes (salim)
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Don't cover your heart • salim
» soft to be strong (SALIM)
» love letters • (salim)
» do you remember how it started (salim)
» bury a friend (salim)

AD VITAM AETERNAM :: rps
Sauter vers: