Sing along with me ☄ Andreas

(STOCKHOLM, 2008)
Voilà plus de trois années que je m'en suis allée à Stockholm, quittant pour quelques temps mes terres japonaises. L'occasion de reprendre des études de médecine, après une petite trentaine d'années à m'en être éloignée. Parcourant l'Amérique, plongeant dans le boom des jeux vidéo, soigner avait fini par me manquer. Alors grâce au concours de Hyun-Su, j'ai pu intégrer un internat en Suède, ce nouveau programme qui s'est ouvert en chirurgie plastique spécialisée en pédiatrie. L'occasion d'en apprendre encore plus, de véritablement changer des vies. C'est épuisant, mais passionnant. Ca ne m'empêche pas pour autant de profiter de Stockholm. A peine ma garde terminée, je me suis retrouvée embarquée à l'anniversaire d'un des internes. Il a beau être en formation avec moi, je ne le connais pas tant que ca. Mais c'est chouette, tout le monde m'invite partout. Cette fois, le lieu de rendez-vous est un bar que je ne connais pas. A peine mon sac posé, ils m'apparaissent bien trop enjoués par mon arrivée. < Ah Ayumi tu tombes bien ! On a cru que t'allais pas venir, ca aurait été dommage. C'est ton tour ! > L'interrogation qui se pose sur mon visage est immense, mi-amusée, mi-perdue. Suffisamment parlante pour que Magnus enchaîne. < C'est soirée karaoké, Marla ne t'a rien dit ? > Précise l'homme fêtant ses 27 ans. < Je… non, mais c'est pas grave, c'est marrant. > Je lui réponds d'un sourire naïf, m'asseyant sur un des fauteuils disponible. < Ah, tant mieux j'ai eu peur. Parce qu'on t'a inscrit sur la liste, ca devrait être ton tour ! C'était moins une ! > Précise-t-il en riant, tandis que j'ouvre la bouche et la referme sans dire un mot. L'envie de disparaître est forte, à cet instant et pourtant. < Oh chouette ! > Que j'entends ma voix dire, alors que non, pas chouette du tout. Mais je n'ai pas envie de le mettre dans une mauvaise posture, quitte à m'y retrouver moi-même. < Tiens. > Me glisse Marla, posant un shooter devant moi, son regard désolé bien que je la sens plutôt joyeuse de son petit piège. < Le prochain truc que j'ai pas envie de faire, je te le refile. T'es prévenue. > Je lui dis aussi menaçante qu'un chaton, surtout que je ne le ferai jamais, lui refiler une tâche ingrate. La musique s'estompe alors et l'animateur de la soirée reprend le micro. < On passe à notre duo surprise suivant ! Ayumi et… Andreas ! Allez, on les encourage ! > Quoi ? Un duo en plus ? Rapidement j'avale le petit shooter pas bon pour prendre des forces et me lève en direction de la scène, à moitié poussée par ceux que j'appelle d'ordinaire mes amis. Mais pas ce soir. Un peu paumée, je manque de monter sur scène alors qu'il nous faut d'abord passer voir le DJ, choisir la chanson. Un coucou timide adressé à l'inconnu, mon partenaire de chant, je sens le rouge me monter aux joues. L'animateur nous présente le répertoire et je me défile bien vite. < C'est toi qui choisis la chanson. Ou.. Ou on fait au hasard et advienne que pourra. > Je lui lance dans un débit de parole accéléré, en bon anglais.

La tenue de Yuyu (juré elle a pas 15 ans ->):

(STOCKHOLM, 2008) – Voilà bien depuis l’enfance qu’il lui est difficile de dire non à Oskar. Oh, pas qu’il en soit incapable, au contraire, mais il semblerait que le Suédois sache toujours quand il n’est pas autant à l’encontre d’une idée ou d’un plan farfelu qu’il le prétend. Ça vient sûrement du fait qu’ils ont grandit ensemble, puisqu’il est tout autant capable de faire la même chose, pointant du doigt que "fait pas genre, je vois bien que ça te tente, c’est marqué sur ta tronche." Donc c’est de bonne guerre, se dit-il, alors qu’il pousse quelques soupirs et râles faussement agacé tandis qu’ils s’apprêtent pour rejoindre des amis au bar Queer du coin qui, surprise (absolument pas) organise une soirée karaoké – comme chaque semaines – et à la surprise de personne, la proposition de s’y rendre vient d’Oskar, estimant qu’il est temps de se sortir la tête de l’appartement. D’autant plus qu’il sait faire preuve d’un bon argument en lui parlant de photo à prendre.

Vêtue de façon classe, mais sans faire guindé, ils saluent le barman après avoir pénétré dans les lieux. Retrouver leurs amis ne s’avère pas difficile, puisque ce sont les idiots qui agitent les bras dans tous les sens et ils prennent juste le temps de passer commandes avant de les rejoindre. Le temps de discuter et de faire le point sur les derniers potins, leurs boissons sont arrivées ainsi que les deuxièmes round pour ceux étant là depuis un moment, le tout accompagné par les diverses performances des personnes passant sur la petite scène. Un rire lui échappe quand une stupide blague est racontée, « On passe à notre duo surprise suivant ! Ayumi et… Andreas ! Allez, on les encourage ! » Il ne s’étouffe pas avec sa gorgée, mais ça n’en est pas loin, il regarde la scène, puis ses amis. Andreas lève les yeux au ciel, « Autant j’adore chanter, je préfère quand on me demande mon avis, avant tout. » déclare-t-il en lançant un regard à chacune des personnes se trouvant autour des tables. Et donnant un coup de pied dans le tibia d’Oskar, pour faire bonne mesure. Qu’importe s’il se défend piteusement en déclarant que ça n’est pas de son fait, puisqu’ils sont arrivés ensemble. « Je sais que t’y es mêlé d’une façon ou d’une autre. » Lâche-t-il en ébouriffant les cheveux de l’autre homme en se levant.

Il rejoint rapidement le DJ, où se trouve également la dénommée Ayumi, si sont style vestimentaire l’étonne, c’est par un sourire qu’il la salue pour commencer, « C’est un complot, pour toi aussi, c’est ça ? » Autant le prendre avec légèreté. Il se déplace pour se mettre à ses côtés, « C'est toi qui choisis la chanson. Ou.. Ou on fait au hasard et advienne que pourra. » Il arque un sourcil, « J’ai pas d’idée en tête, » Il passe un mains à l’arrière de son crâne, « Bon c’est pas entièrement vraie, mais ce sont des chansons de comédie musicale. » Donc ça ne colle pas nécessairement aux goûts de tout le monde, « Tu penses quoi de Popular, de Wicked ? » lui demande-t-il ensuite et une fois que leur choix définir est fait, eh bien il ne reste plus qu’à monter sur la scène et de se mettre à chanter. L’un dans l’autre, c’est un moment amusant à passer et il espère qu’il en sera de même pour la jeune femme, à qui il sourit à quelques reprises durant leur performance et à qui il tend la main une fois qu’ils sont rendus leurs micros et sont descendu de la scène, « J’espère que ça a été pour toi ! Et sinon, du coup, Andreas, enchanté. » Il paraît que c’est polie de se présenter, après tout.

(STOCKHOLM, 2008)
Être ainsi mise en lumière, je n'y suis pas tout à fait habituée. La plupart des immortels préfèrent éviter, généralement, restent dans l'ombre. Cela dit je pense que même si j'étais restée simple mortelle, je n'aurais pas été plus à l'aise, là debout sur cette scène. A ce qu'on dit, on a les amis qu'on mérite… Un regard jeté à leur attention, à voir leur enthousiasme et encouragements, ils réussissent à me tirer un grand sourire, un peu crispé du fait de ma position. J'ai de la chance de les avoir rencontré, c'est indéniable. Un peu gênée, je me vois rassuré par la question de l'inconnu, nouveau partenaire de chant. Au moins je ne suis pas seule à être tombée dans le piège. Un petit signe vers la bande, j'acquiesce et ajoute : < J'étais pas encore arrivée qu'ils m'avaient déjà inscrit sur la liste… > J'ai beau être timide, je n'aime pas décevoir. Qu'est-ce que c'est une chanson après tout ? Reportant le poids de la décision sur l'homme, je ne vais pas faire la fine bouche face à ses goûts. Puis les comédies musicales, c'est chouette ! < Ce que tu veux, je te suis ! > Qu'on en finisse au plus vite et tout ira pour le mieux ! J'acquiesce un peu trop vivement à sa proposition ; le nom me dit quelque chose, je devrais m'en sortir.

Montant sur scène, micro en main, j'ai une petite appréhension. Toutefois la présence de l'autre homme s'avère rassurante, tout comme ses sourires encourageants. Mon trac un peu enfouit, c'est une voix douce et belle qui s'élève. Habitude perdue de chanter réellement, autre que pour moi-même ou mes yosei. Pourtant, il n'y a pas de fausses notes, pas de son désagréable à faire grincer les oreilles. Si mes capacités à chanter sont bien là, celles à occuper la scène sont bien nulles. Quand la musique se termine, j'ai la sensation d'enfin reprendre mon souffle, ma poitrine soudain libérée d'un poids. Sous des applaudissements un peu trop enthousiastes, doux effet de l'alcool, nous descendons finalement, enfin de scène. L'homme me tend une main, se présente ; Andreas. Je la lui serre en retour, m'incline légèrement par habitude, < Ayumi. Oui, ca va mieux maintenant surtout. > Je lui réponds avec un petit rire embarrassée. La pression relâchée, je poursuis amusée : < Je ne te retourne pas la question, parce que tu semblais bien à ton aise pour une personne sous le joug d'un complot. Cela dit, c'est moins stressant de monter à deux. C'est sympa ce concept, de faire des duos au hasard ! T'es un adepte des karaokés ? Tu viens souvent ici ? > Je m'arrête un peu brusquement de parler, réalisant être partie dans une énième tirade. Non ce n'est pas le stress qui me fait causer, il s'est dissipé. J'ai juste tendance à trop parler...