El giro tenso

El spinning es, obviamente, un concepto de origen inglés, ya que es un arte de mantener la distancia. — Marcel Larche

(Madrid, début décembre 2021) Bastian sait très bien qu’il devrait changer sa manière de voyager, il en a la preuve même maintenant. Avec le Conclave, l’Ordre, Prométhée à ses trousses, ça devait lui changer sa manière de voyager non ? Il devrait être encore plus prudent non ? Donc, adieu les vols privées, même si Bastian n’en prenait pas particulièrement: il trouve que cela attire trop l’attention. Ce n’est pas nouveau que les immortels prennent des vols privés, donc ils sont facilement plus repérables alors que s’il prenait des vols généraux et qu’il se mêlait à la foule avec les faux papiers, ça pouvait complètement marcher.

Puis bon, il y a Chiranth qui a son propre avion et ils pouvaient aller en France par eux-même. Ça aurait pu marcher, mais il s’agissait de rendre visite à Camille qui ne va pas forcément bien et qu’il vaut mieux qu’ils soient tous les deux seuls. Il n’a même pas pris une décision à la place de son ami, non, il essaye tant de mal que de bien à ne pas faire ça. Enfin bref, Bastian a pour mission de rassurer son jeune en lui envoyant des messages pour lui dire que tout va bien. Et… Bon… Chiranth devrait très bien savoir que voilà: Bastian rime toujours avec poisse.

S’il voulait prendre un vol direct, malheureusement son avion a été supprimé. Il n’a pas eu la foi de retourner chez lui et Chiranth, bredouille alors qu’il a déjà pris un gros risque en venant à cet aéroport Marocain. Donc il a changé de billet et a pris celui pour l’Espagne, dans l’espoir de prendre une correspondance qui l’emmènera en France. S’il faisait bien attention, tout se passerait bien non ? Bon déjà, le fait qu’il aille en Espagne le fait lever les yeux au ciel assez fort. Il a toujours détesté ce pays et il le déteste tellement, mais contradiction tu nous tiens: il parle parfaitement la langue espagnole. Enfin bref, là n’est pas le sujet. Bastian galère tellement à arriver en France qu’il se retrouve maintenant en Espagne… Au moins si l’avion ne marchait pas, il pouvait prendre un train même si c’est un peu plus risqué, mais ce qui est sûr c’est qu’il y aurait moins d’Adorateurs qui pourraient le repérer. Ça pourrait être son plan B, sinon le plan C, c’est de prendre lui-même une voiture mais il a fait un point d’honneur: il ne conduit pas en dehors du Mexique. Mais il se doit accorder une chose: prendre un train ne serait pas une mauvaise idée. Parce qu’il ne peut pas rester plus d’une demie-heure à cet aéroport et le prochain avion pour la France est dans deux heures.

Seulement, cela ne se passe pas aussi facilement que ça. Le maya a bien remarqué qu’il y a quelque chose qui n’allait pas et il avait un mauvais pressentiment: chose dont il avait raison. Pendant qu’il se déplaçait dans l’aéroport, il avait cette désagréable sensation d’être suivi et comme il fréquentait assez souvent les Adorateurs à l’époque, il connait bien leur technique de filature. C’est comme ça qu’il a repéré un des leurs et c’est avec une discrétion qu’il a réussi à le mettre hors d’état, dans un petit couloir peu fréquenté. Et c’est en toute discrétion qu’il a pu mettre deux autres Adorateurs en état de nuire et il pense qu’il n’y en a pas plus que ça. Bastian remercie mentalement Chiranth de lui avoir appris de nouvelles techniques de combat, il se débrouille beaucoup mieux qu’auparavant même si son égo a été mis à mal par moment. Il continue à se faire discret, à éviter les caméras, même à feinter d’avoir pris un taxi (il est entré dans une voiture, en donnant une destination et en le payant d’avance pour en ressortir discrètement et prendre une deuxième).

Quand il monte dans la deuxième voiture, Bastian donne la direction pour la gare de Madrid quand une porte s’ouvre qu’il se met à parler en espagnol pressé. « Désolé, c’est pr… » Mais il s’interrompt en voyant la personne monter dans cette voiture. Bastian se met sur les gardes et garde discrètement la main sur l’aiguille qui contient le poison paralysant au cas où… « Lova. » Merde. Il a été probablement vu à l’aéroport du Maroc pour qu’elle soit déjà là, en Espagne parce qu’il ne croit pas du tout au hasard… « Si tu me demandes de venir avec toi, crois-moi que ça ne va pas se faire.»

   

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(Madrid, début décembre 2021) Pari risqué, j'observe Bastian monter dans un taxi sans agir. Je le connais un peu, le vieux. Ca fait longtemps qu'on se côtoie, on a eu plus d'une fois l'occasion de bosser ensemble, à mon grand désespoir. C'est peut-être en parti pour ca, que Marius m'a missionné de lui mettre la main dessus. Sûrement aussi pour limiter la casse, éviter que ces événements ne s'ébruitent de trop. Un Conseiller en fuite, qui retourne sa veste, ca fait mauvaise pub.
Y a une chance sur deux pour que Bastian file dans une seconde voiture, pour tenter de brouiller les pistes. Après tout, il a foutu une raclée aux deux trois adorateurs que j'avais mis à sa suite - ce qui soit dit en passant n'arrange pas son cas -, histoire de lui mettre une petite pression. Ainsi je pouvais rester plus en retrait, à l'abris de son œil de lynx. J'ai même fait l'effort de m'habiller normalement pour éviter d'attirer les regards.
Quand je le vois passer dans un autre taxi, je me décide à accélérer le pas, plutôt que de poursuivre ma filature. Il est temps d'avoir une petite discussion. Ouvrant la porte, je me glisse à l'intérieur l'air de rien, sur le siège libre à l'arrière tandis que Bastian commence à indiquer sa destination. < C'est fou toutes ces annulations, on peut même plus aller en France tranquille… > Je lui souffle en espagnol, faussement exaspérée. C'est pas comme si j'avais quelque chose à y voir. Hum. Un adorateur l'a repéré sur les caméras de l'aéroport du Maroc, m'alertant immédiatement alors que je passais quelques jours en Espagne, à chercher sa trace. En deux trois appels, j'ai fait annuler le vol qu'il devait prendre pour la France, pariant encore sur ses alternatives. Le hasard a parfois du bon, car j'avais remarqué que le vol suivant prévu était en direction de Madrid. Je n'ai plus eu qu'à l'y attendre…

Bastian ne traîne pas à m'annoncer la couleur. Je l'observe un instant, consciente depuis le début que ce serait compliqué. Au final, je n'ai mis qu'un mois à le retrouver. C'est si peu, quand on vit aussi longtemps que nous. C'en est presque absurde. Je change de langue, passe à mon russe natal pour que le chauffeur ne suive pas notre conversation. A l'aise dans mon siège, j'entame les festivités en toute désinvolture. < Laisse-moi récapituler un peu, veux-tu. > Je commence à compter sur mes doigts, énumérant les légers problèmes que l'immortel a accumulé. < T'as manqué de tuer une de nos rares infiltrées au Conclave. T'as fait foirer une mission envers les Enfants de Prométhée et nos chances de mettre la main sur la Lance. T'as foutu un joli bordel à notre QG de Londres… J'oublie quelque chose, Monsieur le Conseiller ? > Je relève les yeux vers lui, lui posant la question de façon quasi sincère et sérieuse. Un poil piquante, peut-être. Après tout, on n'est plus à un dérapage près. Je commence à me sortir une cigarette, ouvrant légèrement la fenêtre malgré le froid. < C'est pas ta meilleure année, hein Wayak... >
   

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(Madrid, début décembre 2021)
Elle est celle qui a dû faire annuler le vol pour la France. Bastian aurait dû s’en douter, il y avait pensé dans le fond et il aurait dû écouter Chiranth. En vrai, il l’a écouté un peu… Il aurait pu rentrer chez eux après avoir vu que le vol était annulé, mais au final, il a persisté et il est allé en Espagne. Il espérait arriver en France sans problème et ne pas avoir à faire face à un casse-tête pour éviter les Adorateurs et les immortels de l’Ordre, mais au final… Il s’est fait repéré dans un aéroport au Maroc. Puis, elle devrait savoir qu’il prendrait le train aussi, le taxi allant en direction à la gare. Le maya serre la mâchoire et soupire longuement en détournant le regard vers le chauffeur du taxi qui ne semble pas comprendre ce qui se passe. Le chauffeur a dû se dire qu’ils sont ensemble vu qu’ils se connaissent.

Enfin bref, il préfère rester sur ses gardes au cas où, surtout si Lova essaye de faire gagner du temps et le piéger. Bastian en a un plan E pour dire pour s’y échapper. Le Russe claque à son oreille, il n’aime pas trop cette langue. Cela lui rappelle de mauvais souvenirs de son seul et unique séjour dans ce pays pour un vol à l’Ermitage. Le maya soupire encore une fois de plus exaspéré, il pose le coude contre la portière de la voiture et la main sur sa tempe et regarde Lova qui se met à énumérer toutes les erreurs qu’il a pu faire. Bastian hausse l’épaule et se met à répondre en Hindi, sachant très bien qu’elle peut comprendre cette langue vu qu’elle adore en apprendre de nouvelles vu que c’est son passe-temps et aussi, il refuse d’aller sur le terrain Russe et lui donner la satisfaction de répondre dans sa langue natale. Il aurait aimé parler dans son dialecte Yucatan, mais personne en dehors de Santiago, Chiranth et Keira peuvent le comprendre. « Pour l’infiltrée du Conclave, pas grave. Elle peut mentir sur le fait qu’elle a rencontré un immortel -moi- et a tenté de l’attraper mais qui s’est soldé par un échec. Au moins ça renforcera la confiance sur sa fausse appartenance au Conclave. Tout le monde est gagnant dedans. » D’autant plus qu’elle pourra dire qu’elle a tenté d’attraper un maya, que l’Ordre peut faire de sorte que le Conclave soit à ses trousses. Il déteste ressentir cette once de culpabilité de l'avoir blessée, même si la jeune femme ne lui en veut pas pour ça. Bastian aura besoin d'au moins d'une année pour s'en remettre. « Pour la mission des Enfants de Prométhée, vous n’avez aucune preuve et je n’ai fait que transmettre le message des Blackthorn qui m’ont retrouvé au Canada. Rien ne dit que j’ai pu être complice mais n’allez pas dire que je ne vous avais pas prévenu du possible fiasco de cette mission… » Il démonte encore et encore, minimisant la gravité des actes évidemment. Il a toujours cette insolence qui l’anime et qui l’aide à tenir tête face à Lova. « Quant au bazar que j’ai laissé au QG de Londres, je plaide coupable mais vous saviez que ça devait arriver vu que vous cherchiez à me pousser à bout. » Fallait prévoir ce genre de réaction non ? Après tout, ils ont bien des immortels qui ont des dons de prescience et qui peuvent avoir des visions, ils auraient pu avoir vu cela venir non ? Non ? Apparemment non.

Il détourne le regard pour observer le paysage de la périphérique espagnol se défiler sous ses yeux. Il entend encore Lova ouvrir la fenêtre, probablement pour fumer la cigarette et puis elle lui fait la remarque. « Qu’est-ce que tu veux Lova ? » Oui, qu’est-ce qu’elle veut vraiment, qu’est-ce que Marius lui a dit de faire ? Le rappeler à la cause avec une condition ? Après tout, un conseiller qui retourne la veste après 500 ans de bons et loyaux services, ça fait très mal à l’Ordre. D’autant plus du côté du trafic d’art. Ou lui mettre la pression ? Pour montrer qu’en même pas un mois, il est facile de le retrouver… Ou pas. Qu’elle a son destin entre ses mains ? Peut-être oui, mais pour combien de temps ? Ils savent tous les deux que s’ils ont survécus aussi longtemps, c’est en partie grâce à leur intelligence, d’autant plus que Wayak’ est bien connu pour ne pas être un guerrier, mais pour avoir des stratégies fourbes.
   

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(Madrid, début décembre 2021) A entendre l'hindi, je lève les yeux au ciel. Le miens est un peu rouillé, à ne pas tant le travailler que ca. J'imagine qu'on va passer la conversation dans les deux langues, parce que j'ai pas tellement envie de me casser la tête à le pratiquer. Puis ca lui ferait bien trop plaisir que je cède là-dessus, je sais pertinemment que c'est une façon à lui de me tenir tête. < Tu passeras le bonjour à Chichi… > Je souffle très familière, parce que l'hindi me fait forcément penser à lui. Et qu'on se doute que les deux étoiles trainent beaucoup trop ensemble. Pasavan n'est pas dans une position très favorable lui non plus, mais il n'est pas Conseiller. Il n'est pas aussi profondément lié à l'Ordre comme Bastian depuis cinq siècles. Et il n'a pas autant à se reprocher, si ce n'est sa complicité. Allumant tranquillement ma cigarette, j'écoute ses arguments. Enfin, ce qu'il me sort pour sa défense. Je m'accorde le mérite de le laisser parler. Parce que franchement, me retenir de lui couper la parole, c'est un bel exploit.

Le vieux me demande alors ce que je veux et je lâche un ricanement. < Oh, plus rien, ta défense est si parfaite. Il semblerait que tu aies réponse à tout ! > Je roule des yeux, un brin agacée. Il se comporte comme s'il n'avait rien à se reprocher alors qu'on sait tous les deux qu'il a bien chier dans la colle. A raison ou pas, c'est pas le sujet. < T'as vraiment envie qu'on mette le Conclave sur ta piste aussi ? Parce qu'on peut le faire sans soucis, mais après tous ces siècles, ce serait vraiment pas malin de ta part de nous y encourager. > Pour l'instant, ca ne reste qu'une affaire de famille, hors de question d'y mêler une quelconque petite marionnette mortelle. Y a déjà suffisamment de bruits de couloir concernant son identité d'immortel. Le danger approche quand ces bruits résonnent trop fort. Le sous-entendu est bien senti, fais pas trop le con. Je tire sur ma cigarette, passant au second événement. < Mmh pour les Blackthorn, Marius n'est pas tellement de cet avis. Tu me connais, je suis pas du genre à douter de lui. Puis t'as toujours été trop sociable, ca ne m'étonnerait pas que t'aies copiné avec eux. Tu te ramollies un peu, au vingt et unième siècle… > En vrai, j'en ai pas la moindre idée. On s'est pas tant côtoyé que ca ces vingt dernières années, si ce n'est dans les bureaux de l'Ordre. < Heureuse d'avoir tes aveux pour Londres, c'est au moins ca de gagné ! Mais s'il te plaît, ne commence pas à voir l'Ordre comme ton ennemi. > Je lui réponds d'une voix doucereuse, un mince sourire aux lèvres. Une légère menace flottant dans les airs. < Tu sais, > je commence, prenant une nouvelle bouffée de tabac, < C'est pas pour rien si Marius ait demandé à ce que je te retrouve. Il aurait très bien pu envoyer un mec te tuer pour t'embarquer au QG. T'admettras qu'il y met pour une rare fois les formes. > Les yeux rivés sur Bastian, je poursuis dans un rare élan d'honnêteté. < Toi et moi, on n'est pas du genre à se battre et je vais pas commencer maintenant. On se connait depuis une pléthore d'années. Autant j'ai un cœur de pierre, tu viens d'utiliser ta seule carte joker. Pas de capture, pas de rapport. Il n'y a que moi, alors inutile de tenter quoi que ce soit. > Je conclus avec un coup de tête vers sa main dissimulée depuis mon entrée dans le taxi. Je connais sa grande passion transmise par une immortelle disparue : les aiguilles empoisonnées. J'y ai jamais goûté et je m'en abstiendrais bien. < Tu sais que tu vas pas pouvoir échapper éternellement à l'Ordre. > Premièrement, parce que je compte pas passer le restant de mon immortalité derrière lui. Secondement, ca risque de sérieusement mal finir s'il continue ses conneries. Il a sûrement raison de se cacher le temps que les choses se tassent, que la colère de Marius se calme. Cela, je lui concède. Mais il va rapidement falloir qu'il assume ses actes. < Tu ne voudrais pas qu'il arrive quelque chose à d'autres. > Je lâche de manière insignifiante, fumant ma clope.
   

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(Madrid, début décembre 2021)
Elle reste sur le Russe, il reste sur l’Hindi. Ni l’un ni l’autre ne veut céder, ils seraient ridicules devant Marius, mais ils sont déjà impressionnant pour le chauffeur du taxi qui se retrouve témoin d’une sorte de joute, dispute, de il ne sait pas quoi entre les deux personnes qui parlent dans des langues qu’il n’arrive pas à identifier. Il en a vu des choses à son travail, mais ça, il n’aurait jamais cru… Wayak’ lève les yeux au ciel face à la réplique de Lova. Il se sent malgré tout tendu et il ne devrait pas trop jouer avec elle, c’est vrai. Mais il ne veut pas paraître bien plus faible qu’il ne l’est déjà même s’il a prévu des plans pour s’échapper de tout cela, mais il y a une chose dont il ne peut pas forcément échapper pour toujours: l’Ordre. Il se doit être réaliste, elle finira par l’attraper un jour ou l’autre. Il ne dit rien, l’écoutant répondre à sa défense mais il ne retient pas de lever les yeux au ciel par moment, elle l’agace, tout comme il l’agace évidemment. Ils se connaissent depuis des années et ça a toujours été comme ça entre eux à s’agacer. Ils ont à peine quelques années de différences en plus…

Wayak’ sait qu’il ne peut pas faire trop son malin face à Marius, surtout concernant les Blackthorn. Il lui a demandé de piéger son ami Lucian, enfin ancien ami, pour le tableau afin de l’éloigner de Rosalyn… Et le maya connaît assez bien le chef pour savoir comment il opère face aux traitres qui n’ont pas forcément tous eu un traitement de faveur, mais c’est parce qu’ils n’étaient tous pas un conseiller comme lui. Ses cinq cents ans de service le sauvent un peu, bon moins les trois dernières années c’est sûr. Voire même le nouvel siècle avec l’avancée fulgurante des technologies qu’il a du mal à maitriser. Mais il ne prend pas tout cela pour acquis Wayak’… Le maya a serré la mâchoire, tout en observant la conseillère qui dit ne pas venir pour se battre avec lui. Donc parler et rien de plus ? Mh… Il reste quand même méfiant même s’il finit par ranger l’aiguille, qu’il a à peine sorti, dans la boite. Il finit par ouvrir la fenêtre de cette main qu’il avait caché depuis qu’elle est entrée dans la voiture juste pour évacuer la fumée de cigarette qui reste encore et qui mettent un peu son nez en PLS.

Quand elle parle des autres, le maya tourne son regard vers elle. Qu’est-ce qu’elle sait encore sur sa constellation ? Qu’est-ce qu’elle veut faire elle ? Elle qui a complètement lâché Rahim pendant une bonne trentaine d’années hein ? Tiens donc, ça mentionne les autres sans utiliser ce mot que tu maudis… Elle a vraiment ce toupet-là…« Laisse les autres en dehors de ça si tu ne veux pas d’un Londres2. » Il finit par faire un geste vague de la main pour s’excuser de cette menace sortie malgré lui, tout autant c’est pour balayer la fumée qui vient vers lui. « Donc supposons que je veuille revenir à l’Ordre après tout le souk que je viens de faire et que je veuille réparer mes erreurs. Qu’est-ce que Marius attend que je fasse pour faire table rase ? Vu qu’il t’a personnellement demandé à ce que tu me retrouves pour parler - maintenant, nous y voilà -... C’est qu’il a forcément quelque chose en tête. » Oui, il serait bien curieux de connaître les conditions, d’autant plus qu’il sait bien qu’il a de ces plans assez machiavéliques, voire plus que ceux de ses propres conseillers…
   

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(Madrid, début décembre 2021) Sa main se retire de sous sa veste, allant ouvrir l'autre fenêtre. Je lui lance un bref merci bien, étant moi-même rarement armée et excellent piètrement au combat. Je n'ai que mes réflexes et ma persuasion pour sauver ma peau mais face à Bastian, ca perd toute sa valeur… On partage le premier don et le second est d'une efficacité très discutable sur lui. Je ne m'y suis pas essayée souvent, mais je n'assumerai pas dire que ca a plutôt été d'un échec cuisant. A réfléchir deux fois à notre situation, je me dis que peut-être, prendre une arme en sécurité n'aurait pas fait de mal. Enfin, façon de parler. Je n'ai que cette bague que Matheus m'a donné et dont je ne me suis encore jamais servie. Qu'en dernier recourt, m'a-t-il toujours dit. Je me doute que le poison qu'elle contient ne tue pas, mais il ne doit pas être bien plus agréable.

Bastian s'emporte un instant. Même si je l'y ai poussé, que ma réflexion était loin d'être innocente, je lui lance un de ces regards qui veut tout dire. Tu crois vraiment que c'est le moment de lancer des menaces ? T'es dans le mauvais camps pour ca, mon vieux. D'un geste vague de la main il balaye ses paroles, surtout histoire de dégager la fumée que j'accumule dans la voiture. Un petit sourire satisfait, je tire une taffe de plus. J'en avais oublié son autre don. En voilà une chose qui l'inconforte autant qu'elle me fait plaisir : idéal ! Sagement je l'écoute poursuivre, les yeux rivés sur le paysage. On aura connu plus joli comme vue, de ca je suis convaincue que nous tomberions d'accord.

On finit par rentrer dans le vif du sujet. A la demande de Bastian, je sens une pointe de regret. Pas forcément de ses actes, mais au moins de se retrouver dans cette position qui est la sienne. Après un instant de réflexion, je réponds d'un geste las de la main. < J'imagine… que mettre la main sur la Lance et la lui donner serait un bon premier pas. Ou tout autre artefact en soit, bien que l'idéal serait de les désarmer… > Oui, ce serait sûrement un bon début pour s'excuser. De là à être pardonné, ne poussons pas le bouchon trop loin. Celui au sommet de l'Hydre n'est pas réputé pour son bon caractère. Même face à moi, il gagne haut la main ! < Tu connais Marius, je ne suis pas dans sa tête. > Il n'est pas le genre à partager ses pensées à tout va, loin de là. < Estime-toi heureux qu'il reste sage à ton égard mais n'espère pas sa clémence durer plus de quelques mois… > Ma phrase laissée en suspens, je me passe de prononcer les derniers mots. Le regard que je pose sur lui parle suffisamment. Ni la mienne, Bastiti. Sûre que je n'y enverrai pas Matheus, ni quelconque ancien d'ailleurs. Un petit nouveau. Ou plusieurs, histoire d'éviter les cafouillages. Mais notre prochaine rencontre ne sera pas une aimable conversation. < Si tu veux mon avis, je ne pense pas que quitter l'Ordre te soit une option. T'es vieux tu sais, ca fait longtemps que t'arpentes nos couloirs. Ce serait plus simple de… t'éliminer, t'enfermer quelque part. On ne va pas faire un reboot de l'Ordre juste pour tes beaux yeux. > Je conclus en riant doucement de cette évidence.
   

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(Madrid, début décembre 2021) La Lance.
Bien sûr qu’il se retrouve avec une sale tâche à faire: retrouver la Lance et évidemment, ils savent tous les deux que c’est clairement impossible de la retrouver quand les Enfants l’ont. Marius est vraiment obsédé par les artefacts, notamment la Lance qui lui a filé sous le nez. Et il pense mettre depuis des mois, le maya à la recherche de l’artefact, lui qui sait retrouver les oeuvres d’art perdues…  Sauf que cela n’est pas possible. Autant chercher d’autres artefacts… Encore, il n’a rien dit sur sa découverte du sabre d’Alexandre, il a gardé le secret pendant soixante-dix ans préférant garder cet artefact pour sa constellation… Il devrait en discuter avec tout ce monde, un par un. Il ne sait pas comment et ce n’est pas vraiment le moment de réfléchir. Il ne doit rien montrer à Lova, si ce n’est que l’exaspération face à la fumée de cigarette qu’elle se plait à lui envoyer en sa direction. Il détourne le regard du paysage pour regarder Lova qui doit se délecter de cette position de force qu’elle a en ce moment.

S’il accepte cette mission, il gagnerait quelques mois pour lui, pour sa constellation mais aussi pour ses recherches sans avoir l’Ordre à ses trousses. Il doute qu’il puisse arranger sa situation avec les Blackthorn, donc il ne cherchera pas à perdre son temps-là dessus. Si tu veux mon avis Wayak’ réussit à retenir son soupir quand même, mais il ne cache pas son regard qui en dit long:  Évidemment que je veux ton avis Lova, que serait-ce un message de Marius sans ton avis ?  Et elle parle bien sûr de le tuer, évidemment, ou de l'enfermer quelque part pendant assez longtemps jusqu’à qu'il devienne fou… Le maya finit par lâcher un petit sourire et il regarde le conducteur du taxi qu’il se met à parler en espagnol. « Est-ce qu'il est possible de passer par la Ciudad de la Princessa pour favor ? » Il finit par remercier le chauffeur qui acquiesce et met à jour le GPS. Wayak’ vient d’allonger le trajet parce que la discussion ne va pas être si courte que ça. Du moins, c'est ce qu'il fait comprendre, parce que mine de rien, Madrid qu’il déteste cette ville, c’est un peu un coin qu'il connaît très bien. Bon, il ouvre totalement la fenêtre de son côté, parce que là, ça suffit deux minutes les petits coups bas depuis tout à l’heure, puis il concentre son attention sur Lova, en reprenant son hindi. « Je ne suis pas en position de quoi ce que ce soit, c’est vrai au vu de mes bêtises ces derniers temps. Donc tu peux bien te permettre de le dire à Marius comme si ça venait de toi, je m’en fiche. L’idéal serait de désarmer les Enfants, c’est vrai… Tu sais très bien, tout autant que je le sais, qu’en poursuivant les Enfants dans l’espoir de récupérer la Lance, vous leur donnez un temps supplémentaire pour qu’ils trouvent un autre artefact. » Il hausse les épaules tout en bougeant la main pour appuyer ses paroles, comme toujours. « Si vous vous retrouvez à avoir plus d’artefacts, les Enfants ne feront pas forcément le poids d’autant plus que vous allez les obliger à sortir la Lance lors de l’attaque… Je privilégierai ce plan. Mais en soit, j’ai reçu le message et j'ai bien compris sa demande.» Il hoche la tête bien tout sérieux et détourne le regard pour respirer l’air frais de Madrid. Il déteste vraiment l’odeur de cigarette, il en a fumé quelques unes avec Anthony, Tal et d’autres personnes quand ça ne va pas vraiment à un point qu’il arrive à faire abstraction de ses sens surdéveloppés. « Ce serait dire adieu à une bonne partie de la trésorerie avec le trafic d’art si vous me tuez… J’ai assuré mes arrières sur ça, que même la persuasion n’y fera rien pour arranger les choses… » Et puis, il connaît Marius, ce serait bien trop facile de tuer… Il aime faire souffrir les gens, les torturer jusqu’à qu’ils en perdent même ne serait-ce la notion d’une raison. « Sinon, c’est tout ? Pas de message pour Chiranth ? » Parce qu'il se doute bien que son ami soit assez emmerdé par toute cette situation, il sait que Chiranth aurait recommencé autant de fois qu’il le voudra pour sauver Anthony des griffes de l’Ordre.
   

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(Madrid, début décembre 2021) Sans connaître par cœur les routes espagnoles, je comprends que Bastian fait rallonger le trajet auprès du chauffeur. Comme quoi, ma compagnie doit lui être plus agréable qu'il n'en laisse paraître… Bon je ne miserais pas gros là-dessus non plus hein. Je tire la dernière latte de ma cigarette puis l'écrase tel un geste banal dans le creux de ma main. Une habitude que je me permets à l'abris des regards des pauvres mortels. Après tout je ne ressens rien si ce n'est cette douce chaleur et la brûlure cicatrise en quelques secondes à peine. D'une pichenette, je jette le mégot par la fenêtre puis la referme, ma conscience environnementale proche du néant. Sagement, j'écoute Trujillo développer sa position, son opinion notamment sur les artefacts tant convoités. < Qui te dit que nous ne sommes pas à le recherche de d'autres ? > Je glisse doucement en l'air dans mon russe natal, n'attendant pas particulièrement de réponse. Avec les tensions toujours plus grandes entre nos factions, je doute que Marius mette tous ses œufs dans le même panier. Je ne prends pas la peine de me répéter, je sais le message bien passé. Les Enfants de Prométhée démontre de plus en plus d'atouts et c'est ce qui nous inquiète particulièrement. Nonchalante je poursuis, < Cela dit, si tu as vent de la prévision d'une attaque par les mioches, tu ferais mieux de m'en avertir très rapidement. > Je joue la mauvaise foi, car plus le temps passe et plus la possibilité d'un affrontement devient évidente. C'est aussi une façon faiblement dissimulée de lui donner des idées, de faire un peu le tour de ses contacts, d'aller laisser trainer ses oreilles. Après tout, il n'aura pas meilleure opportunité, à se retrouver aujourd'hui le cul entre deux chaises. Doucement, les choses s'organisent au sein de l'Ordre. Hors de question de se faire prendre par surprise, d'attendre que les Enfants de Prométhée se retrouvent en position de force. Je ris doucement, alors que le petit traître vante ses mérites, prône sa valeur et son indispensabilité pour l'Ordre. Une légère tape sur son épaule, un brin infantilisante, je le coupe dans son discours. < Du calme Wayak', il n'y a pas encore de petits papiers avec ton nom distribués aux mercenaires. On a d'autres cartes à jouer, avant d'en arriver à cette situation radicale. > Je lui jette un regard qui en dit long, pas des plus rassurants, me gardant d'en dire plus. Il y a divers moyens de le faire agir sous la contrainte, sans user de persuasion. L'idéal restant qu'il ne joue pas au con et gagne son billet retour au sein de l'Ordre. Comme l'autre Pasavan qui l'accompagne d'ailleurs, il fait bien d'en parler tiens ! < Oh mmh, qu'il cesse de trainer avec toi ? > Je lui lance avec une pointe d'humour. < Sans déconner, plus vite il retournera auprès de l'Ordre, plus facilement on pourra tout balancer sur ton dos. Lui n'est pas Conseiller avec un millénaire d'existence, puis il n'a fait qu'un faux pas qu'on pourrait lui concéder. > Je me trouve l'âme charitable et pourtant, mon petit doigt me dit que l'autre étoile ne quittera pas les côtés de Bastian si facilement. J'imagine qu'il ne prendra pas le risque de le laisser seul, même si cela aggrave sa propre situation. Un peu d'égoïsme leur ferait du bien m'enfin, c'est pas mes problèmes. Je finis par lui adresser un de mes magnifiques sourires. < Sinon, c'est tout oui ! Je te laisse un mois pour revenir vers moi avec de bonnes nouvelles. Ou à défaut, mmh… Je sais que tu reviendras vers moi malgré tout. > J'ai déjà en prévision des retrouvailles avec le p'tit Charlie. Et mon petit doigt m'a indiqué qu'il serait le petit nouveau de la Consté de Bastian. Ca aura le mérite de le faire sortir de son trou, où qu'il puisse être. < Et toi, tu vas où comme ca pour risquer de te mettre en danger ? > Je lui demande comme si nous n'étions que deux bons amis qu'aucune tension ne lie.
   

El spinning es, obviamente, un concepto de origen inglés, ya que es un arte de mantener la distancia. — Marcel Larche

(Madrid, début décembre 2021) Elle a arrêté de fumer.
Enfin. C’est pas trop tôt, mais le maya n’en montre rien parce qu’il n’est pas à l’abri d’une seconde cigarette de la russe. Elle essaye de lui faire comprendre que l’Ordre est clairement à la recherche d’autres artéfact, ce à quoi Wayak’ réagit avec un petit sourire amusé. Il a ses sources et il sait bien qu’ils ne cherchent pas en ce moment d’autres artéfacts de façon efficace, du moins, ils cherchent à l’aveugle c’est sûr. En revanche la suite le fait lever les yeux au ciel, il va devoir le répéter plusieurs fois que possible qu’il n’a vraiment rien à voir avec les Enfants, qu’il n’en savait clairement rien depuis le début et qu’il s’est retrouvé à tout hasard sur le chemin de Rosalyn. « Je vais te le répéter autant de fois qu’il faudra: je ne sais rien. Je ne suis pas celui à qui il faut blâmer pour le fiasco de la mission de la Lance. » Ils s’en prennent à la mauvaise personne pour ce sujet-là, ce n’est pas parce qu’il a pu dévoiler tout le plan, tout ce qui s’est passé dans les moindres détails à Rosalyn sous l’effet de persuasion que ça en fait de lui un traitre. Le maya n’avait pas aimé cela, encore moins le fait que l’Ordre aie pensé qu’il y a à voir pour l’échec de la lance. Il est vrai que Wayak’ avait montré ses réticences à l’attaque des Blackthorn, mais il avait ses propres raisons. « On ne sait jamais, Marius est justement ce genre de personne qui peut se montrer très radicale. »  dit-il sérieusement, avant de passer la main sur son épaule comme pour épousseter ce qui a été posé dessus, autrement dit la main de Lova il y a quelques secondes. Dans tous les cas, le maya étudie toutes les options et sait très bien que quoiqu’il advienne, il n’aura pas le choix de revenir à cette organisation. Il sait qu’il a une botte secrète qui lui permet de pouvoir faire table rase, mais il préfère continuer à l’étudier avec Chiranth, à savoir la maîtriser aussi quand le jour viendra… Cela l’embête assez, mais bon, au moins, si ça lui permet de pouvoir rassembler les artefacts dans un même endroit, ce sera plus facile pour les détruire.

Mais bon, le sujet passe sur Chiranth. Wayak’ ne peut pas s’empêcher de grimacer. Oh là, non, ça n’arrivera jamais le fait que Sujah arrête de trainer avec lui. Il en a eu plusieurs occasions, avec tout ce qu’il lui a fait subir, Chiranth est resté à ses côtés. Quoiqu’il advienne, il était toujours là, à l’aider même s’il lui en voulait. Il ne l’a jamais lâché, alors même si le maya lui disait d’arrêter de trainer avec lui et de retourner dans l’Ordre, il sait que Chiranth ne l’obéira pas. « Je transmettrais ça. » dit-il à Lova, il va le faire même s’ils connaissent tous déjà la réponse d’avance. Cela n’arrivera pas. Wayak’ observe par la fenêtre de la voiture et voit qu’ils arrivent presque à cette rue dont il connait mieux que quiconque. « Oui, d’une manière ou d’une autre, je trouverai un moyen de te contacter.» Après tout, ce n’est pas elle qui change constamment de numéro, lui qui passe par les numéros de téléphone jetables sans avoir besoin de passer par divers opérateurs. Puis elle lui pose la question comme s’il allait réellement lui répondre. Le maya lâche un long soupir en observant Lova. Là, il arrête de parler l’hindi pour reprendre sur l’espagnol du coup. « Si je te disais exactement où j’allais, tu ne me croirais pas. Mais en tout cas, ce n’est pas pour aller me rendre évidemment. » il fait un petit sourire. « Si tu me poses cette question, c’est qu’on en a fini maintenant…» Le maya retourne le regard vers Lova après avoir reconnu le coin et sourit un peu. « Mine de rien, ça fait du bien de te voir en forme Lova. Si j’étais toi, j’enquêterai davantage ailleurs parce que tu te trompes clairement de cible pour la Lance. » Il insiste là-dessus avant d’ouvrir la porte de la voiture pour sortir dans la rue de Princessa, dont il connait les moindres recoins pour semer n’importe qui. « Bonnes fêtes de fin d’années. » dit-il avant de fermer la porte derrière lui, laissant le chauffeur démarrer au feu vert. Le maya disparaît tranquillement dans les petites rues, sachant très bien qu’il recroisera la route de Lova dans le fond.