Tristan loonsarc

Il y a trois grands thèmes qui s'entre mêlent au bout des plumes, pinceaux, chants,   récits oraux ou autres formes d'arts. Trois thèmes qui au rythme de cette vitae s'écoulant dans nos veines, vibrent, dansent sur les fils de nos existences : la vie.. l'amour... la mort... Comme tout un chacun, j'ai gouté à ces fruits tantôt amères, tantôt juteux, mais là ou tous s'endorment du sommeil du juste - du moins l’espère t'on -  j'arpente toujours ce monde me gavant inlassablement de ces mets, qui au fil des siècles tendent à perdre tout attrait et saveur. Ami laissez moi vous conter l'histoire d'une enfant qui avant même de s'éveiller à la vie, s'était vu tatouée du symbole de l'infini...  

[Naissance : 567 ap.jc] Notre histoire prend place sur les terres Armoricaines (Bretagne), et plus exactement en celles du Domnonée et de Cornubia. Terres légataires de l'héritage celtes, gallo-romain et des peuples de britannia (Angleterre), son interculturalité en a fait au fil des siècles une culture riche et forte... Fille du roi Eon de Loons et de Katel de Bragen, je suis née d'une mère morte en couche et d'un père tombé sur le champs de bataille en défendant ses terres, sans avoir pu connaitre celle qu'il avait attendu avec tant d'impatience. Je  ne dois mon salut qu'à leur plus fidèle ami Rohan, Leude et homme de confiance de mon père. Voyant les remparts sur le point de tomber, il plaça son enfant mort né durant le siège dans les bras de ma mère, le couvrant de son sang, avant de me confier à sa femme lui intimant l'ordre de taire l'affaire et mon sexe. En effet, tous savaient qu'une princesse était née de la défunte Katel, par la grâce divine la femme de Rohan avait également mis au monde une fille ce qui lui permis de duper le roi Kragan et ses alliés quand ceux ci pénétrèrent au sein du château. Tous savaient également que la femme de Rohan avait accouché durant le siège, et grâce à la ruse du futur "duc" la rumeur affirmait qu'il s'agissait encore d'un fils. Kragan demanda donc au père de présenter ses fils et le nouveau né, puis félicitant l'heureux père il lui fit jurer allégeance au roi Judwal de Domnonée en échange de la vie de sa famille et des terres d'Eon en "duché". Dès lors je n'étais plus Tristan princesse de Loons, mais Tristan Urvoy fils cadet de Rohan, duchesse de ce qui fut jadis le royaume de Loons. Il faut savoir qu'avant le VI e siècle l'actuelle Bretagne comptait plusieurs petits royaumes qui parfois entraient en conflit pour étendre leurs possessions ou pour raisons personnelles. Durant la fin du Ve siècle début VIe siècles, certains rois seuls (cornubia) ou avec l'appui de forces externes comme par exemple les mérovingiens (domnonée) parvinrent à se rendre seigneurs liges de petits royaumes et ce soit par la force, soit par jeu politique afin de se prémunir des incursions des rois Francs (domnonée). Bien évidemment, le titre de roi n'était pas ôté à ces nouveaux vassaux ni même la gestion ou autre de leurs terres. Mais dans le fond bien qu'un semblant de consensus se matérialisait par des conseils de rois, ils n'en restaient pas moins qu'ils étaient "assujettis" à un tiers.  Cela mena la Bretagne armoricaine à se diviser en quatre grandes régions "politique" et culturelle:  Cornubia, Domnonée, Léon, Broërec. Je vulgarise beaucoup car l'histoire est longue et complexe. Dans tous les cas, c'est dans ce contexte que mon père perdit sa vie et que ses terres furent remises à Rohan en échange de son allégeance à Judaël , roi de Domnonée.

[0 à 18 ans : 567 ap.jc - 585 ap.jc ]

Bien que Rohan dans sa hâte avait parfaitement mené l'affaire et dupé son monde, il n'en restait pas moins que travestir et cacher l'identité sexuelle d'un enfant et ce toute sa vie, ne serait guère chose aisée. De plus, si pour l'instant seuls le nouveau "duc" et sa femme étaient dans la confidence, ils leur seraient impossible d'assurer mon existence sans élargir le cercle d'intimes. Mais à qui faire confiance?! Très tôt le curé du domaine fut mis dans la confidence, ami d'enfance de Rohan et tenu par le secret de la confession il devint un allié précieux. Il souffla l'idée d'une maladie enfantine restreignant vies sociales et déplacements au sein du domaine et plus largement du duché. La nourrisse de ma "mère" fut également mise dans la confidence et chargée avec Dame Urvoy de veiller à ma croissance. Dès mes quatre ans, on veilla à ce que j'ai une alimentation stricte de manière à maintenir un corps fin, afin de limiter ou retarder l'épanouissement de mes hanches et autres attributs féminin. Bien que les cheveux longs n'étaient guère chose rare chez la gente masculine, on coupait systématiquement les miens afin de palier à ce visage aux traits fins. Par la grâce divine ma mère adoptive était une très belle femme présentant des traits fins et exquis, cela ne choqua donc guère que son dernier qu'elle couvait telle une louve, lui "ressemble" de plus en plus.

A l'age de sept ans, lorsque de coutume tout jeune noble se devait de quitter les jupons de sa mère et tendre vers une éducation d'homme accomplit; je fus confiée à Briac ancien antrustion (compagnons d'armes) de mon père, et s'étant reconverti à l'aide de Rohan en maître d'armes. Mis à son tour dans la confidence il m'y cœur à m'apprendre à manier armes de jet, frondes, boucliers, haches, dagues, épées et arcs; ainsi qu'à franchir larges fossés, escalader falaises et flans. Je reçu également une éducation équestre complète aussi bien par les passes d'armes à cheval, que l'art du tirage de char.  Mon corps durant mon adolescence se forgea, je n'étais pas femme à forte poitrine un simple bandage plus ou moins serré masquait celle ci. Et pour le reste je crois bien qu'un jeune seigneur aux traits fins, taquin, de bonne compagnie, bon chasseur, ayant survécu à une maladie enfantine et inaccessible aux grands nombres conférait une certaine aura.

Les années passaient et avec elles grandissait mon besoin d'évasion. Je voulais savoir ce qu'il y avait au delà des terres de Loons, je voulais traverser la grande mer et retrouver ces terres que nos ancêtres avaient quittés pour venir s'établir en Armorique. Je ne supportais plus cette constante surveillance dont je faisais l'objet et encore moins de devoir taire mes droits sur les possessions de mon père. Appelez cela crise d'adolescence, il n'en reste pas moins qu'afin d'éviter une fugue de ma part ou tout autre folie, Rohan m'intégra à l'escorte qui devait conduire ma cousine au sein du royaume d'Aelsarc en Cornubia, futur époux de  son amie d'enfance Arween. Au vu du caractère de Réaliss et de la réputation des femmes du Broërec, je plaignais d'avance le pauvre homme, mais me réjouissais de cette aventure d'une semaine. Nous partîmes donc des cotes de l'actuelle Perros-Guirec et naviguâmes deux jours longeant les cotes du Domnonée pour arriver sur celles du Léon. Faisant escale une journée entière en l'actuelle Saint Pol-de-Léon, nous débarquâmes afin de permettre à Réaliss de dénicher quelques présents pour les futurs époux. Dès les premières lueurs de l'aube, nous réprimes la mer pour quatre jours de traversée jusqu'à l'actuelle Audierne en terre de Cornubia. Mettant pieds à terre, nous poursuivîmes notre route à cheval jusqu’au royaume de Cardenn, non loin de l'actuel Quimper. Que dire? Était ce parce que je n'avais jamais réellement quitté le domaine, ou n'avais jamais participé à un banquet en dehors de ceux donnés par Rohan, ou tout simplement parce que tout était nouveau et si différent, mais je fus éblouis par tout ce que je découvrais .

Une fois reçus au château, Réaliss me délaissa bien vite pour rejoindre Arween "l’heureuse" future mariée, quant à moi je présentais mes respects à l’hôte qui je dois l'avouer faisait forte impression. Cheveux bruns aussi longs que brillants, gabarit imposant, voix grave et puissante, rire franc et gras, l'homme faisait son effet aussi bien sur sa cour que ses invités. La fête pré-nuptiale battait son plein, mais je n'avais pas le cœur à festoyer. Quittant la grande salle, je me dirigeais vers la cour principale avant de me décider à gagner les remparts. Trouvant un endroit à la vue dégagée, je posais mon regard au loin sur ses terres inconnues que je brulais d'arpenter de long en large, et d'en découvrir chaque trésor, quand soudain la voix à peine audible de Réaliss me parvint. Intriguée par l'urgence perçue en celle ci, je m'approchais discrètement et surpris une conversation entre Arween et ma cousine. Apparemment celle ci n'avait aucune intention de devenir reine de Cardenn, désirant ardemment regagner les terres du Broërec. Il était question de fugue, qu'elle se cache sur notre navire et qu'une fois en domnonée, elle gagne pas ses propres moyens le Broërec sans pour autant remettre les pieds dans sa famille qu'elle accusait de l'avoir vendu selon ses propos, à "ce chien de cornubia". Tout n'était que pure folie, mais je pouvais comprendre le désarroi et sentiment d'impuissance de la brune. Pris par leur conversation, je n'entendis pas venir Aelsarc qui me faisant sursauter s'amusa de ma frayeur. Réalisant que si j'avais pu entendre les deux conspiratrices, le roi le pourrait également, je m'offusquais bruyamment de la blague de notre hôte alertant ainsi les deux jeunes femmes... 

Confrontant Réaliss et Arween le soir même, j'avortais ce plan aussi audacieux que dangereux pour nous tous. Les supplications de ma cousine, et pleures d'arween n'y firent rien. Il était hors de question que je risque nos vies ou un conflit ouvert avec notre hôte. Le mariage eut donc lieu le lendemain. Réaliss ne me pardonna pas cette "trahison", quant à Arween elle me voua depuis ce jour une haine tenace qui failli me couter la vie... Après une semaine de célébrations, il fut temps de prendre congé du roi et rentrer en domnonée. Seulement, je n'avais aucune envie de revenir à cette vie fade et rébarbative. J'avais envie d'aventures, de batailles, de liberté! Toutes ces choses qu'aelsarc m'avait dépeint en me narrant ses péripéties, je voulais les voir, les gouter, les vivre par moi même! Ayant le soutient de notre hôte qui s'était pris d'amitié pour moi au cours de la semaine, j’annonçais à tous que je restais et que je les chargeais d'en avertir mon père (Rohan). Après une heure de discussions ils finirent par accepter ma décision, non sans craindre la réaction de Rohan à l'annonce de la nouvelle.   


[18 à 27 ans : 567 ap.jc - 615 ap.jc ]

Dès notre première rencontre un fort sentiment d'amitié s'était établi entre Aelsarc et moi. Il nous arrivait de discuter toute la nuit, de partir à la chasse juste tous les deux, ou encore d'échanger des passes d'armes. Il se moquait toujours de mon petit gabarit, me comparant à une bougie de cire qui en fondant aurait perdu corps; Mais était toujours admiratif de ma grande faculté d'apprentissage, ainsi que de ma pugnacité même lorsqu'il valait mieux pour moi abandonner. Si physiquement je ne pouvais rivaliser avec lui, j'avais l'avantage au tir à l'arc et était une excellente cavalière. Au sol, je n'avais aucune chance face à cet ours brun, mais à dos de cheval j'étais imbattable. Nos forces et qualités nourrissaient notre admiration respective l'un pour l'autre, et ne faisait que renforcer nos liens. D'ailleurs notre relation commençait à en gêner plus d'un. La plus part des leudes ou antrustions voyaient en leur roi un moyen de gagner possessions et renommer, les faveurs du roi étaient donc disputés, tous voulant être au plus près de celui qui pourrait pérenniser leurs capitaux. Quand moi je n'avais pas les même intention à son égard. Je le voyais comme un ami, voir comme un oncle adoptif. Je n'étais pas la seule à avoir cette vision car dès que Rohan fut mis au courant de ma décision, il m'envoya une missive ordonnant mon retour immédiat auprès de lui. Il fallut toute la diplomatie du roi et une bonne dose de courage et entêtement de ma part, pour que rohan abdique non sans avoir fait Aelsarc prêter serment par le sang, qu'il veillerait toujours quoi qu'il arrive à ma sauvegarde. Ce serment ne me fut dévoilé que des années plus tard, alors que j'agonisais dans les bras de mon ami.

- Cela faisait un an que j'étais auprès d'aelsarc, et enfin j'allais pouvoir faire mes preuves au combat. Une querelle avait éclaté entre lui et un de ses voisins, qui sous l'affront souhaitait voir au bout d'une pique la tête du roi de Cardenn. Sous l'avis de ses leudes qui voyaient en cette occasion un moyen de se débarrasser de moi, Aelsarc me proposa de me joindre à la bataille. Je ne me fis pas prier et comme une enfant m'imaginais quelques batailles glorieuses. Seulement les récits sont toujours plus ou moins romancés, et il n'y avait rien de glorieux sur ce champs de bataille. La pluie battait son plein, pieds et sabots s'enfonçant dans ce sol boueux. Les belles armures qui nous viennent de suite en pensée lorsque nous imaginons chevaliers étaient choses extrêmement chers. Chacun devant se protéger par ses propres moyens vous imaginez bien que nous n'étions pas tous en tenue rutilante. Et même sans le cout de la chose, nous étions emprunts de cultures romaines et celtics aussi cela s'en ressentait sur notre armement et armures . Les protections les plus courantes étaient donc la cote de maille annulaire (plus solide et maniable), cuirasse (cuir et acier), pour ceux qui le pouvait des protections cuirs aciers pour les épaules, les avants bras et les tibias. Par contre, armée jusqu'aux dents, nous l'étions! Hache, lance/javelots, épées (Scramasaxe / Semispatha), dagues, boucliers, chars, tout ce qui pouvait trancher ou embrocher tintait sous les gouttes de pluie qui tombaient de manière discontinu. Oubliez les belles batailles rangées des romains, ou encore celles des armées du haut moyen age. Ici, vous n'aviez que la fougue et le courage pour alliés! L'acier tranchait dans le vif, le sang et la boue obstruaient votre vision, il arrivait que vous manquiez de vous faire embrocher par vos compagnons qui sous l’adrénaline écharpaient tout ce qui se trouvait sur leur route. Non... il n'y avait rien de glamour, et lorsque la corne retentit annonçant ainsi notre victoire, je n'arrivais pas à croire que j'étais encore en vie et en un seul morceau, bien qu'amochée!  Je vécus bien d'autres batailles, mes blessures ne mettant jamais en danger mon identité, mais bientôt celle ci allait éclater aux yeux de la personne qui me haïssait le plus a Cardenn: Arween!

20 ans - Souvenez vous, j'avais mis un terme aux espoirs de la reine d’échapper à son mariage, et depuis elle n'avait eu de cesse de me faire clairement comprendre que je n'étais pas la bienvenue à Cardenn. Que cela soit de manière sournoise en s'alliant aux leudes d'aelsarc qui ne souffraient ma présence, ou que cela soit de manière plus explicite, en demandant clairement au roi de me réexpédier en terre de Loons. Voyant ses efforts vains et pire ma relation avec aelsarc se renforcer, sa rancœur s'était muée en une haine féroce et une sorte de jalousie malsaine! N'oubliez pas que pour tous, j'étais un homme aussi je ne comprenais pas cette rivalité qu'elle semblait nourrir à mon égare vis à vis de son époux. J'aurai bien continué à éviter soigneusement cette vipère, si mon ami ne m'avait pas enjoint de faire partie de l'escorte de cette sorcière, et ce lors d'un banquet devant tous les leudes. Plus tard, il m'avoua qu'au vu de la relation plus que tendue entre sa femme et moi, il était persuadé que j'aurai décliné l'offre -chose vraie- et donc m'avait coupé l'herbe sous les pieds, m’ôtant toute possibilité de refus. une semaine avant l'arrivée de l'hiver, nous partions avec sa seigneurie direction l'est à l'actuelle pontivy ou devaient nous rejoindre les hommes de sa familles qui se chargeraient de la mener à bon port. En effet, pour mon plus grand bonheur la reine prenait deux mois de "vacances" en Broërec auprès de sa famille. Les tensions entre elle et le roi étaient telles qu'ils faisaient chambre à part et que les murs du château tremblaient trois à quatre fois par jours. Las, Aelsarc avait fini par "inviter" sa femme à visiter ses parents pour une plus ou moins longue période.

Cela faisait quatre jours que nous étions en route, nous avions pris deux jours de retard dans notre avancée car Madame n'en faisait qu'à sa tête, ce qui repoussait notre délai de sept jours à neuf journées; il me fallait juste un peu de courage et nous en serions débarrassé. Au sixième jour la brume se leva, il faisait grisâtre et le sol était boueux dû à la pluie de la veille. Je rêvais avec Braam d'un bon foyer et d'un repas chaud, lorsque surgissant de partout et nulle part, des hommes armés nous attaquèrent. L'attaque surprise était parfaitement coordonnée, les flèches pleuvant d'un peu partout, tandis que le gros de la masse fonçait sur nous. Nous étions quinze, eux une vingtaine et je peux vous dire que nous nous bâtîmes comme des lions. Aelsarc avait envoyé de très bons guerriers auprès de la reine et ceci lui firent honneur. Il ne restait que braam, Keyn et moi contre six adversaires. Nous étions à bout de souffle et blessé mais il était hors de question que nous mourrions sans tout donner. Le combat fut rude, nos adversaires étant loin d’être des novices et lorsque le dernier coup de hache fut porté à la tête de notre adversaire, il ne restait que braam et moi. J'étais blessée à l'abdomen, braam par la grâce divine n'avait rien de grave. Se précipitant pour ouvrir la porte du "carrosse" d'arween il fut accueilli par la lame d'une épée le transperçant de part en part. La traitresse était à l'origine de cette embuscade et pensant braam seul rescapé elle s'était chargée de l'envoyer six pieds sous terre. Surprise et horrifiée de me voir debout, elle tenta de me porter un coup fatal, mais reçu en pleine mâchoire l'expression de toute ma haine et mon dégout. K.O, je lui nouais les mains et la chargeais sur le seul cheval encore présent. Il était blessé tout comme moi et je savais qu'il ne nous ramènerait pas à Cardenn, mais le peu qu'il pouvait m'éviter à pied était bon à prendre.

- Le cheval tint une journée avant de s’effondrer agonisant, ne nous laissant d'autre choix que de poursuivre à pieds. Durant ce laps de temps, la reine avait cherché à m'amadouer, me menacer, me culpabiliser, me soudoyer mais rien n'avait fonctionné. Elle me répugnait et l'inverse était tout aussi valable. Le troisième jour, j'avais tant de fièvre que je commençais à délirer. Arween liée à moi par une corde, je mis mes dernières force à trouver un abri dans une espèce de petite grotte, prendre de quoi faire un feu et allumer celui ci avant de m'effondrer. Hilare alors que je sombrais peu à peu, je me moquais de la brune qui n'attendant même pas que la vie quitte mon corps, s'était précipitée sur moi pour prendre de quoi couper les liens. Pensait elle pouvoir sortir de cette foret en un seul morceau? Et quand bien même, une femme seule en terres inconnues, combien d'hommes passerait elle avant d'atteindre le Broërec? Mes paroles firent leur office, car je m'éveillais deux jours plus tard arween à mes cotés.

- Les gens du broerec et plus précisément ceux des terres natales d'arween avaient une grande réputation quant à leurs capacités médicinales, et par la grâce divine j'avais pu constater cela. Bien qu'ayant toujours de la fièvre, ma blessure prenait un bon chemin même si un rétablissement complet était loin d’être envisageable dans l'immédiat. Sombrant de nouveau, je m'éveillais une journée plus tard buvant à petites gorgées l'eau qui m'était offerte. Cela dura une semaine... j'oscillais entre semi-éveil et profond sommeil, mais le jour ou je fus pleinement consciente de mon environnement, et réalisais que j'avais été débarrassée de ma cote de maille ainsi que de tout ce qui me permettait de dissimuler ma poitrine; je pris conscience que ma pire ennemie détenait de quoi m'anéantir. Contrairement à ce que j'aurai cru, arween était plus intéressée par le comment j'avais fait pour tromper tout mon monde, que par l'opportunité de se servir de ce secret contre moi. Et si au début je fus plutôt méfiante, je ne pouvais que constater le changement de comportement de la brune envers moi. Douce, attentionnée, volontaire, j'avais l'impression de m’être éveillée dans une autre réalité. La brune chassait, dépeçait, cuisait ses proies comme si elle avait toujours vécu dans les bois. L'hiver était là, la foret se couvrant de neige. Nous n'avions d'autres occupations que celles de nourrir notre feu et discuter. Sans jeu de mot, cela brisa la glace entre nous. Je finis par en apprendre plus sur qui elle était réellement, sur ses désirs, ses qualités et rêves d'enfants; ses défauts ne m'étant guère inconnus. Au final, nous n'étions pas si différentes en terme de caractère, et peut être aurais je moi aussi tout tenter pour fuir un mariage non désiré, et un époux que je ne parvenais à aimer malgré les années.

- Cela faisait deux semaines que nous étions contraintes de rester sur place au vu de ma blessure. Mais en ce premier jour de la troisième semaine, je me sentais bien mieux, signe qu'il était temps que nous reprenions notre route. Après de longues tractations, arween parvint à me convaincre que la meilleure des choses à faire était d'aller auprès de son père et c'est ce que nous fîmes. La neige ralentissant notre progressions, nous primes une semaine et demi pour trouver âme qui vive. Le chasseur nous conduisit à un petit village ou j'échangeais ma cotte de maille, ainsi que la bague de mariage d'arween contre un cheval. Neuf jours plus tard nous parvînmes à Pontivy, et fîmes parvenir un messager auprès du père d'arween. Deux jours plus tard nous étions escortés en son domaine. Notre récit convainquant tout le monde car les corps des hommes d'aelsarc et ceux des assaillants avaient été découvert deux semaines plus tôt à l'endroit relaté. Au final nous avions passés un mois et onze jours seules dans ces bois, et bien que le père d'arween était heureux de retrouver sa fille en vie, le doute subsistait quant à la vertus de notre relation.  

- Je passerai tous les évènements qui nous lièrent plus étroitement arween et moi, mais au bout d'un mois auprès de son père, nous étions comme de vieilles amies. Arween avait du mettre son père au courant pour ma personne, celui ci menaçant de m'éliminer pour faire taire toute rumeur autour de sa fille. Sa surprise fut plus que grande, mais soulagé il accepta de garder le secret. De ce fait, je pouvais passer mes journées auprès d'arween sans que celui ci n'y voit d'objections. Un soir pourtant tout dérapa... Nous étions chez un ami d'enfance de la brune, ivres nous discutions de tout et rien lorsque le sujet des expériences charnelles fut mis sur le tapis. A ma gène et mon silence tous comprirent que j'étais l'innocence incarnée, ce qui ne manqua pas d'amuser ou d'étonner. Plaisanteries douteuses et petit bizutage en règle passé, les invités partirent se coucher, laissant arween, ludvid et moi même seuls. Susurrant quelque chose à l'oreille de ludvid, arween m'invita à les suivre. Intriguée et ivre, je les suivis jusqu'à la chambre de notre hôte, ou commençant à caresser son "ami", arween me dit d'une voix ardente de regarder et d'apprendre. D'un coté mon amitié pour aelsarc m'intimait de mettre un terme à cela. De l'autre, mon ami avait connu plus de couches que je n'en saurais compter. Hypnotisée, mon corps ne tarda pas à s'enflammer troublant mes pensées qui n'avaient pour seul sujet que la brune. Et alors que chevauchant ardemment son amant, ses pupilles scintillant de plaisir accrochèrent les miens. M'invitant à venir à elle d'un geste de la main, mes lèvres goutèrent pour la première fois à la douceur d'un baiser qui ne tarda pas à gagner en fougue. M'arrachant à son étreinte, je fuyais les lieux perdue et troublée. Ce ne fut pas la seule fois ou arween coucha avec ludvid, ni  la seule fois ou j'assistais à leurs ébats, m’enivrant de leurs soupirs, dévorant parfois cette bouche tentatrice aux embruns d'alcool, je tatouais toujours plus profondément le nom de la brune en mon coeur. Deux mois, nous avions passé que deux mois en broerec avant qu'une escorte ne nous soit envoyée par aelsarc au retour du printemps. Mais le mal était déjà fait, en nous couvait un feu qui ne cessa de grandir durant les deux années qui suivirent, jusqu'à une nuit d'automne ou incapable de nous contenir plus longtemps, nous cédâmes à nos désirs. A mes 22 ans, je connus l'ivresse de la passion et  avec celle ci, l'amère gout de la trahison...

[27 à 32 ans : 615 ap.jc - 620 ap.jc ]

- Notre liaison fut ponctuée de hauts et de bas. Parfois ma conscience me ramenait à la raison pour quelques mois, une année tout au plus; mais je revenais toujours au creux de ses reins quérir soupirs et cris. Le revirement de notre relation n'avait pas échappé aux anciens alliés d'arween qui se chargèrent de répandre rumeurs, formuler explicitement ou non des accusations ou tout simplement créer de fausses preuves. Tout cela était épuisant! Épuisant pour moi, pour arween et aelsarc. Mais malgré ses propres doutes, celui ne m'avait jamais retiré sa confiance ou son amitié. Et bien que cela puisse paraitre contradictoire, mon amitié pour lui n'en était que plus forte. Je ne saurais comment l'expliquer... Arween et Aelsarc n'étaient tout simplement pas fait l'un pour l'autre! Ce mariage n'était que convenance et faux semblant, rien d'autre! Aussi avais je  finis au fil des années à éprouver de moins en moins de culpabilité quant à cette liaison qui en d'autres circonstances aurait fait une union pérenne et heureuse.

- Ma mort: Les batailles, missions périlleuses, ruses, pièges de toutes sortes n'y firent rien. J'étais toujours présent auprès du roi qui songeait à m'adopter et faire de moi son gendre. En effet, de son union avec arween était née huit ans plutôt, une fille du nom de Lévana. Souhaitant que j'épouse celle ci à ses seize ans, aelsarc prévoyait de m'intégrer à la famille de manière à ce que si il lui arrivait quoi que ce soit, je sois en mesure d'hériter de ses terres, avec pour condition que j'épouse sa fille à ses seize printemps. Autant vous dire que la chose "réjouissait" arween et les leudes. Les tensions se firent de plus en plus vives, et au fond de moi je sentais qu'il valait mieux que je rentre en loons ne serait ce que pour quelques mois. Prévenant Briac et Rohan, je leur demandais de venir avec quelques hommes à Cardenn de manière à repartir en toute sécurité avec eux. Repoussant sans cesse la date de mon départ sous les demandes d'aelsarc et arween, je repoussais celle ci une fois de trop et tombais dans une embuscade lors d'une sortie de chasse, fomentée par six des antrustions les plus proches du roi. Leur plan était non seulement de m'éliminer, mais également ce roi cocu pour lequel ils avaient perdu tout respect et cette reine adultère qu'ils comptait bien bruler vive. La lutte fut ardue mais nous parvînmes à nous en sortir et regagner le château. Donnant l'alerte, nous fumes mis en sécurité ou Baléor le bras droit d'aelsarc nous attendait en ses appartements. Je ne sais pas ce qui me mit la puce à l'oreille, mais réagissant au quart de tour, je reçue à la place de mon ami la dague empoisonnée qui lui était destinée. Embrochant Baléor,  Aelsarc me prit dans ses bras m'interdissant de mourir, et ne cessant de me répéter que l'on viendrait bientôt pour me soigner. Le chaos régnait au dehors, il semblait que les loups étaient plus nombreux que ce que nous pensions. Arween parvins à nous rejoindre avec un "médecin" qui sentant la lame de la dague annonça à la brune et son époux ce que je savais déjà. Il n'y avait rien à faire, aucun antidote contre un des poisons les plus violent de l'époque et jusqu'à nos jours: Le cyanure.  Mon agonie ne fut pas trop longue, une dizaine, vingtaine de minutes tout au plus, ma blessure aidant à accélérer les choses. J'avais à mes cotés arween celle qui m'avait éveillée à l'amour, aelsarc mon ami et compagnon d'aventure, briac mon mentor et rohan mon père d'adoption. Je pouvais fermer les yeux non sas quelques larmes de regrets, non sans quelque désirs de vivre ne serait ce que quelques heures, minutes, secondes....

- Éveil à ma vie d'immortel: Mon réveil fut plus que brutal et confus. J'avais à mes cotés Briac qui pleurait accompagné de Rohan. Autant dire que nous trois primes peur et qu'il fallut quelques minutes pour que le "calme" se fasse. Miracle ou sorcellerie nous ne parvînmes à trancher mais il fallait agir vite, avant que les flammes de mon lit funéraire ne lèchent mon corps ampli du souffle de vie.  Cela faisait un jour entier que j'étais morte. Dans les faits j'avais surement dû reprendre "vie" quelques heures après ma mort, mais dans un état végétatif proche de la mort. Le temps que mes organes terriblement touchés soient débarrassés du poison, et sachant qu'il s'agissait là de mon premier éveil, il m'avait fallu du temps pour être de nouveau solide sur mes deux pieds. Nous mimes en place un stratagème dont la première phase était la demande de Rohan à Aelsarc de respecter une vieille coutume du royaume de Loons, qui consistait à recouvrir la dépouille d'une personne s'étant distinguée, d'un linceul couleur or aux armoiries de Loons. La demande fut acceptée et les tisseuses mises au travail, l'ouvrage demandant une journée de confection. Durant ce temps, j'entendais les complaintes de ceux que j'avais connu, de ceux que j'avais aimé, tous s'étonnant et se ravissant que ma dépouille soit préservée des affres de la mort (ni odeur, ni perte de couleur), et attribuant cela à une bénédiction divine obtenue par mon sacrifice. Une fois le linceul finit, Briac se chargea de "remplacer" ma dépouille durant mon transport vers mon buché funéraire, et je fus conduis en terre natale sans que personne ne découvre le stratagème.

Ami voila mon histoire fille d'Eon de Loons et de la belle Katel de Bragen. Un destin tronqué, une vie écourtée mais au combien riche. C'est ainsi qu'aurait dû finir l'histoire, mais cela fait 1454 ans qu'elle se prolonge et s'écrit dans les larmes, le sang, les amours et trahisons... Ami vivez, aimez, rêvez car la vie est faite pour cela! L'immortalité quand à elle n'est guère cette ambroisie aux gouts de miel, ne vous y trompez pas! N'y porter guère vos lèvres au risque que celles ci n'ait un gout de sang et de fiel. Ami vivez et mourez!
     
                                                                           T.L